Les maux de la bouche - L'Infirmière Libérale Magazine n° 214 du 01/04/2006 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 214 du 01/04/2006

 

Formation continue

Fiches techniques

Les maux de la bouche ne sont pas tous bénins. Loin s'en faut. Organe important et complexe, la bouche peut être le siège de pathologies bien spécifiques, qu'elles touchent les dents ou les muqueuses.

LA CARIE DENTAIRE

- C'est une maladie bactérienne insidieuse qui détruit lentement les tissus durs de la dent. Elle évolue de la périphérie (émail) vers le centre (pulpe dentaire) et peut entraîner la destruction complète de la dent, ainsi que des infections (locales ou générales).

La carie dentaire est due à l'action combinée de trois facteurs :

> la plaque dentaire ;

> le terrain ;

> les sucres.

La prévention de la carie dentaire fait appel à des mesures relativement simples :

> brossage efficace des dents ;

> utilisation du fluor ;

> alimentation contrôlée ;

> visites régulières chez le chirurgien-dentiste (une ou deux fois par an).

LES ATTEINTES DE L' ÉMAIL

Les dents sensibles

Lorsque l'émail s'use et se déminéralise, la dent peut être le siège d'une hypersensibilité désagréable.

Il en va de même lorsque la gencive se rétracte, découvrant la base de la dent.

Il faut alors utiliser des produits thérapeutiques spécifiques de la sensibilité dentaire (dentifrices adaptés, gels fluorés...) qui réduisent la sensibilité de la dent.

Les dents jaunes

L'hérédité et le vieillissement - mais aussi la consommation de café, de thé ou de tabac - influent sur la couleur des dents, qui peuvent devenir jaunes.

Le blanchiment permet d'éliminer les colorations. Il peut être effectué au cabinet dentaire (de préférence) ou en ambulatoire.

Des patchs blanchissants (kits de blanchiment) à base de peroxyde d'hydrogène (eau oxygénée) sont vendus en pharmacie. Ils sont réservés à l'adulte et s'utilisent seulement sur des dents saines et naturelles. Ils ne doivent pas être appliqués sur les prothèses, facettes, couronnes et céramiques.

Les produits de blanchiment peuvent provoquer des effets secondaires : réactions d'hypersensibilité des dents et des gencives, irritation de l'intérieur des lèvres, picotement de la langue. Ils sont déconseillés pendant la grossesse et l'allaitement. Ils sont contre-indiqués en cas de carie, fêlure, maladie parodontale ou en cours de soins.

Avant le traitement, un bilan bucco-dentaire est conseillé. Pendant tout le traitement, la consommation d'agrumes et d'aliments acides doit être évitée (car elle augmente la sensibilité dentaire).

LES PARODONTOPATHIES : GINGIVITE ET PARODONTITE

Les parodontopathies (maladies parodontales) sont des atteintes du parodonte (le parodonte étant l'ensemble des structures de fixation et de soutien de la dent sur le maxillaire).

Elles peuvent être superficielles (gingivites) ou profondes (parodontites).

Elles sont généralement dues à une mauvaise hygiène bucco-dentaire, qui entraîne la formation de plaque dentaire, puis de tartre.

D'autres facteurs peuvent favoriser le développement des maladies parodontales, notamment des variations hormonales temporaires (règles, grossesse), le tabagisme, le stress, certaines affections systémiques (comme le diabète, les hémopathies...) et certains traitements (ciclosporine...).

La gingivorragie peut être le signe d'une maladie parodontale (locale), mais aussi le premier signe de surdosage d'un patient sous traitement anticoagulant (héparine ou AVK).

La gingivite

C'est une inflammation du parodonte superficiel (gencive) a priori réversible.

La gencive est rouge, gonflée, lisse, sensible, saignant au moindre contact.

Non traitée, la gingivite peut également évoluer vers la parodontite.

La parodontite

C'est une inflammation du parodonte profond (os alvéolaire, ligament, cément) pouvant entraîner sa destruction irréversible, avec déchaussement, mobilité dentaire puis perte d'attache progressive.

La gencive est violacée, décollée, douloureuse, souvent infectée (haleine fétide).

Chez l'adulte, l'évolution est généralement lente, parfois entrecoupée d'épisodes aigus.

La prévention des parodontopathies consiste à éviter la formation de plaque dentaire, puis de tartre, par un brossage complet après chaque repas (cf. prévention de la carie dentaire).

Il existe des dentifrices "spécial gencives", des solutions de prébrossage et des brosses à dents adaptées (à poils souples).

Brosses électriques, hydropulseurs, brossettes et fils dentaires peuvent aussi être utiles.

LES ULCÉRATIONS BUCCALES : APHTES ET APHTOSE

L'aphte est une petite lésion superficielle de la muqueuse buccale (et aussi parfois de la muqueuse génitale). Il se manifeste par une ulcération douloureuse, à bords nets et à fond jaunâtre, entourée d'un halo inflammatoire rouge vif. Les récidives sont fréquentes.

Les aphtes peuvent être isolés, ou bien s'intégrer dans une maladie plus générale, c'est-à-dire l'aphtose.

Leur origine est inconnue. Les facteurs favorisants peuvent être immunologiques, infectieux, hormonaux (règles, grossesse), traumatiques (morsure), alimentaires et liés au stress.

Les aphtes de petite taille guérissent spontanément en une dizaine de jours.

Le traitement peut faire appel à l'application d'antiseptiques (bains de bouche), d'anesthésiques locaux, voire d'antibiotiques.

LA BOUCHE SÈCHE

La diminution pathologique (hyposialie) ou l'arrêt (asialie) de la sécrétion salivaire favorisent les maladies buccales telles que caries ou ulcérations. Elles perturbent aussi la mastication, la déglutition et la phonation. Elles peuvent entraîner une instabilité des appareils dentaires, une perte du goût, voire une mauvaise haleine.

Pour lutter contre la bouche sèche, il est conseillé de boire de l'eau (en petite quantité, mais de façon répétée), de mastiquer des chewing-gums et de sucer des bonbons sans sucre.

Si nécessaire, il est possible d'appliquer un gel humectant sur les gencives et le palais.

LES APPAREILS DENTAIRES

Les prothèses amovibles (appareils dentaires ou "dentiers") peuvent, ou même doivent être enlevées pour la nuit (brossage et/ou trempage).

Le brossage doit idéalement être effectué après chaque repas (ou au moins deux fois par jour) avec une brosse à double implantation (poils souples pour l'intérieur de la prothèse, poils plus durs pour l'extérieur) et un dentifrice spécifique.

Le trempage doit également être effectué au moins deux fois par jour pendant une dizaine de minutes (ou même davantage) dans un produit de trempage bien spécifique.

Après action du produit de trempage, brosser et rincer la prothèse.

L'HALITOSE (MAUVAISE HALEINE)

L'halitose matinale temporaire doit être considérée comme normale. En effet, pendant la nuit, la bouche produit moins de salive... ce qui favorise le développement des bactéries anaérobies génératrices d'odeurs.

L'halitose chronique (celle qui dure toute la journée...) peut constituer un véritable handicap social. Elle est généralement due à un problème bucco-dentaire (gingivite, parodontite...). Elle peut aussi être provoquée par le stress (raréfaction salivaire) ou par une affection d'origine ORL (nez bouché, sinusite, amygdalite...), digestive, pulmonaire, rénale ou métabolique. La consommation d'ail, d'oignon, d'alcool et de tabac peut également être en cause.

Le dos de la langue est la source principale de composés soufrés volatiles malodorants engendrés par des bactéries anaérobies Gram négatif lorsque le pH est neutre ou alcalin (alimentation riche en protéines).

Le traitement de l'halitose dépend de son étiologie. En cas de persistance, une consultation chez le chirurgien-dentiste est recommandée.

Menthe, chewing-gums, bonbons et sprays buccaux camouflent les odeurs... mais sans traiter l'origine du problème.

Il faut éviter la consommation d'aliments épicés (ail, oignon...), d'alcool et de tabac, de même que les régimes hyperprotéinés.

L'huile essentielle de persil peut neutraliser les mauvaises odeurs. Présente dans certains compléments alimentaires, elle est contre-indiquée chez la femme enceinte (risque abortif).

Une bonne hygiène bucco-dentaire permet d'éliminer un maximum de bactéries. Il est toujours utile de conseiller un brossage soigneux après chaque repas (si nécessaire, utiliser un fil dentaire ou un hydropulseur) en finissant par un brossage du dos de la langue (au gratte-langue) et un bain de bouche sans alcool.

Boire beaucoup et mâcher des chewing-gums sans sucre permettent d'activer la production de salive et donc l'élimination des bactéries génératrices d'odeurs.

EN QUÊTE DE "FLAVEUR"...

Pour libérer les composés de la flaveur - à savoir la saveur et l'arôme - des aliments, des chercheurs de l'Inra Dijon ont mis au point un simulateur de mastication qui reproduit fidèlement les principales fonctions de la bouche humaine. Véritable machine à mâcher, cette bouche artificielle infatiguable peut avoir des applications dans les domaines agroalimentaire, médical et pharmaceutique.

À lire

Montmorency Anne, Dents et denture, in L'infirmière libérale magazine, 2005, n° 203, p. 24.

Montmorency Anne, La carie dentaire, in L'infirmière libérale magazine, 2005, n° 209, p. 41.

Montmorency Anne, Traumatismes dentaires de l'adulte, in L'infirmière libérale magazine, 2006, n° 211, p. 33.

Videment Éric, Les maux de la bouche, in Le moniteur des pharmacies et des laboratoires, 2005, n° 2584, Cahier II.