Le traitement chirurgical de l'épilepsie pharmacorésistante - L'Infirmière Libérale Magazine n° 216 du 01/06/2006 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 216 du 01/06/2006

 

Formation continue

Fiches techniques

Pour les quelque 120 000 à 150 000 personnes présentant une épilepsie partielle pharmacorésistante, un traitement chirurgical doit être envisagé. Selon les cas, la technique chirurgicale peut être curative ou palliative. La stimulation du nerf vague représente une nouvelle alternative prometteuse.

CHIRURGIE DE L'ÉPILEPSIE

La chirurgie constitue le seul traitement curatif de l'épilepsie. Au cours des dix dernières années, elle a connu d'importants progrès, en particulier grâce au développement de la vidéo-encéphalographie et de la neuro-imagerie. Cette technique, associée aux autres moyens d'évaluation préchirurgicale, a en effet permis de mieux visualiser les crises des patients, d'identifier les lésions de très petites tailles, de mieux localiser les zones épileptogènes et de poser l'indication chirurgicale avec beaucoup plus de certitudes quant à son efficacité.

UN TIERS DES EPPR

Toutefois, la place de la chirurgie curative demeure relativement limitée. Elle est réservée aux épilepsies pharmacorésistantes (EPPR) sévères symptomatiques ou cryptogéniques (sans cause connue) pour lesquelles il existe une lésion (tumeur, malformation, séquelle d'infection ou de traumatisme) ou un foyer épileptogène localisé susceptible d'être enlevé (cortectomie) sans créer de déficit fonctionnel (troubles moteurs, de la vision, du langage ou de la mémoire). Cela représente un tiers des épilepsies pharmacorésistantes et concerne les enfants comme les adultes. Au-delà de la cortectomie, d'autres techniques chirurgicales peuvent être proposées dans des cas particuliers : callosotomie (section du corps calleux), hémisphérotomie (déconnexion d'un hémisphère), microdissection. Il s'agit de traitements palliatifs choisis après échec des traitements médicamenteux et impossibilité d'une solution chirurgicale curative. Toutes ces techniques nécessitent un bilan préchirurgical très spécialisé. Or, les centres disposant des moyens nécessaires en personnel médical et infirmier qualifié pour réaliser ces bilans de façon optimale sont peu nombreux, ce qui limite l'accès des patients à la chirurgie. Une situation d'autant plus dommageable aux patients que toutes les études s'accordent à dire qu'une indication posée précocement permet de limiter les conséquences des crises sur le développement cérébral et l'insertion sociale ou scolaire.

UN BILAN PRÉOPÉRATOIRE APPROFONDI

La réalisation du bilan préopératoire nécessite plusieurs hospitalisations de 1 à 3 semaines chacune pour définir la zone du cortex à enlever. Le patient doit être hospitalisé pour pouvoir enregistrer ses crises et procéder à l'examen de ses réactions pendant leur déroulement. La très courte durée des crises impose une réactivité immédiate de l'infirmier qui joue un rôle d'observateur capital. Le bilan repose sur l'enregistrement vidéo-encéphalographique (vidéo-EEG). Il peut durer de 24/48 heures à plusieurs jours. Lorsque la vidéo-EEG n'apporte pas les renseignements voulus, il est possible d'avoir recours à des enregistrements par stéréo-encéphalographie (SEEG) nécessitant l'implantation d'électrodes dans le cerveau. Sont également réalisés : une ou plusieurs IRM cérébrales de haute définition pour mettre en évidence une éventuelle lésion cérébrale ou une anomalie morphologique, des tests neuropsychologiques spécialisés permettant d'étudier la mémoire et le langage et d'évaluer le pronostic dans ce domaine et, si nécessaire, des investigations de neuro-imagerie dite fonctionnelle : étude de la perfusion et du métabolisme cérébraux par Spect (scinbtigraphie de perfusion) et Pet-Scan (métabolisme)*.

QUELS RISQUES ?

Les complications de l'acte chirurgical (infectieuses, vasculaires, ischémiques ou hémorragiques) sont rares (3 % des cas). Généralement transitoires, elles n'entraînent qu'exceptionnellement un handicap permanent. En fonction de la zone opérée, des séquelles sont parfois observées (perte du champ visuel, troubles de la mémoire verbale, déficit neurologique). Dans la grande majorité des cas, elles sont prévisibles après un bilan préopératoire bien mené et font l'objet d'une discussion entre l'équipe médico-chirurgicale, le patient et son entourage. Les résultats de cette chirurgie sont particulièrement bons dans les épilepsies du lobe temporal : les crises disparaissent dans 70 à 90 % des cas. Pour les autres localisations (frontales, pariétales, occipitales) le taux de guérison varie entre 40 et 60 %. Les résultats sont également excellents dans les cas où la chirurgie peut se limiter à l'exérèse d'une lésion identifiable. Le traitement antiépileptique doit néanmoins être maintenu pendant les deux années qui suivent l'intervention. Il est ensuite progressivement diminué sous surveillance neurologique (contrôle EEG) jusqu'à l'arrêt définitif. Parfois, un traitement léger doit être poursuivi.

LA STIMULATION DU NERF VAGUE

Il s'agit pour les patients qui n'ont pas accès à la chirurgie de leur proposer un traitement palliatif visant à réduire la fréquence et/ou la sévérité des crises. C'est un atout complémentaire au traitement médicamenteux. Introduit en France en 1996, ce traitement, conçu sur le principe du pace-maker, délivre une stimulation électrique au niveau du nerf vague (ou nerf pneumogastrique) par l'intermédiaire d'une électrode enroulée le long de ce nerf et reliée à un boîtier implanté sous la clavicule gauche. La stimulation électrique de ce nerf, programmée toutes les 5 minutes pendant 30 secondes, modifie l'activité cérébrale. Les ajustements de stimulation sont effectués en consultation tous les mois. Un pourcentage important de patients voit la fréquence de ses crises diminuer d'au moins 50 %. Ce dispositif permet également de réduire la durée et l'intensité des crises (moins de chutes et de traumatismes). Toutefois, il ne permet pas d'arrêter les médicaments dont les doses peuvent néanmoins être diminuées, ce qui améliore la vigilance en diminuant les périodes de somnolence pharmaco-induites.

* Source : Épilepsies, guide à l'usage des patients et de leur entourage - Aispace-Arpeije-Eole, Édition Bash.