Gérard Larcher : « Il faut s'intéresser à la rémunération des infirmièr es en début de carrière » - L'Infirmière Libérale Magazine n° 235 du 01/03/2008 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 235 du 01/03/2008

 

Interview

Dans quelques semaines, le sénateur UMP Gérard Larcher présentera dans les conclusions de la mission qu'il préside sur les secteurs hospitaliers, publics et privés. Les infirmières y ont un rôle essentiel, assure-t-il.

Vous présidez une commission sur les missions de l'hôpital qui doit rendre ses conclusions en avril. Quel est l'objectif de ces travaux : sauver l'hôpital public ou permettre un maillage du territoire optimal ?

Ni l'un, ni l'autre, véritablement. L'objet de la mission est de dire comment on répond, en termes de qualité, d'égalité et d'adaptabilité, aux besoins de santé des Français.

De ce point de vue, voyez-vous une évolution depuis que vous avez été président de la Fédération hospitalière de France (FHF), de 1997 à 2004 ? Avez-vous l'impression que la situation empire en termes d'offre de soins ?

Oui et non. Je vois que le secteur de la chirurgie par exemple est de plus en plus le fait de l'hospitalisation privée et que les problèmes de démographie des professionnels de santé se posent de manière plus forte. À l'inverse, je remarque que des établissements se sont bien adaptés à l'évolution des besoins en santé.

Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), plaide pour une stimulation nationale des coopérations public/privé. Que faut-il faire pour impulser de telles coopérations, au niveau national et local ?

La tarification à l'activité doit viser, outre la convergence des tarifs, celle des contraintes, des droits et des devoirs. Par ailleurs, il est évident que tout incite à une coopération des deux secteurs de l'hospitalisation mais aussi à une coopération avec la médecine de ville. La question est de savoir comment l'on conçoit l'ensemble des acteurs comme participant au service public. Il faut qu'ils soient incités, stimulés, et pas seulement financièrement. Un système de coopération et de partage des charges ou des activités doit être mis en place. C'est là, entre autres, le rôle des agences régionales de santé (ARS), instances qui seront mises en place prochainement.

Qu'apportent les réseaux de soins aux établissements hospitaliers ? Peut-on en attendre plus ?

Tout le monde est d'accord pour dire que les réseaux sont nécessaires. Mais l'une des limites de ces organisations - je pense au rapport Igas sur la question - réside dans le fait que leur succès repose sur la bonne volonté et le charisme des animateurs. Il faut aussi revoir les modalités de financement des réseaux. C'était notamment l'objet de la réunion du 28 février. On voit bien la nécessité de les intégrer dans une contractualisation pérenne.

Les réseaux contractualiseraient avec les établissements hospitaliers ?

Oui, avec les établissements, mais sous le contrôle de l'ARH (Agence régionale de l'hospitalisation). À chaque début d'année, les réseaux de soins doivent se poser la question de savoir s'ils vivront l'année suivante, par exemple. Il faudra que nous fassions des propositions à ce sujet.

Roselyne Bachelot a tout récemment fait savoir qu'elle ne souhaite pas fermer de structures hospitalières mais restructurer celles qui ne répondraient pas aux besoins de la population locale. Comment gérer un tel chantier ?

Notre objectif, c'est la prise en charge la plus équitable et de la meilleure qualité possible sur l'ensemble du territoire. Et le défi le plus pointu en la matière, c'est que qualité ne rime pas avec proximité. Il ne s'agit pas en effet de fermer des structures hospitalières mais de recomposer le paysage. La question est de donc connaître les besoins réels des malades. Là aussi, la dimension régionale doit faire évoluer les moyens, les structures.

L'attractivité des métiers de l'hôpital est une préoccupation permanente des hospitaliers. Qu'en est-il des infirmières ?

La démographie hospitalière pose en effet quelques problèmes pour certains métiers. C'est le cas pour la radiologie, la chirurgie générale, l'anesthésie, la psychiatrie et l'ophtalmologie, mais c'est aussi le cas pour les sages-femmes, les manipulateurs radio et les kinésithérapeutes. Pour ce qui concerne les infirmières, la situation est en revanche inégale sur le territoire. Des solutions régionales doivent donc être trouvées.

Il faut aussi se poser la question de la rémunération des infirmières en début de carrière. Celles-ci constituent un maillon important de l'offre de soins, elles ont notamment toute leur place dans la relation ville- hôpital que nous venons d'évoquer. Au sein de la mission que je préside, nous ne sommes pas uniquement "médecin-centrés". Pour nous, l'acteur paramédical, l'infirmière, mais aussi le kinésithérapeute par exemple, sont essentiels. L'infirmière est incontournable dans le suivi d'un certain nombre de maladies chroniques. Mais c'est un point sur lequel nous n'avons pas encore conclu.

Enfin, vous avez évoqué la possibilité de rémunérer en partie les médecins à l'activité et à l'équipe. Est-ce possible pour les paramédicaux, pour les infirmières ?

Nous allons faire des propositions pour prendre en compte l'activité et les responsabilités exercées. Il faut aussi considérer les parcours professionnels et ouvrir à de nouveaux métiers, c'est toute la question de la délégation de tâches. Je ne suis pas non plus insensible au souhait des infirmières d'intégrer leur formation à l'Université.

Les propositions que vous communiquerez en avril devront alimenter le débat de la modernisation de l'accès aux soins et le projet de loi que la ministre de la Santé présentera à l'été.

Tout à fait, de la même manière que les travaux de Philippe Ritter sur les ARS, que les États généraux de l'organisation des soins [Égos, cf. actualités p. 16] auxquels participent les représentants de la profession infirmière et que la mission conduite par le député André Flajolet [cf. encadré ci-dessus] sur les inégalités territoriales en matière de santé publique. Les propositions que nous ferons, dans quelques semaines, seront de trois ordres : législatif, réglementaire et organisationnel.

Gérard Larcher en quelques dates-clés

- 1983 : pour la première fois, élu maire de Rambouillet, il l'est toujours

- 1986 : il devient sénateur (UMP)

- 1997-2004 : président de la Fédération hospitalière de France

- 2004-2007 : ministre délégué aux Relations du travail puis ministre délégué à l'Emploi, au Travail et à l'Insertion professionnelle des jeunes

Santé publique : la mission Flajolet sonde les disparités territoriales

> En octobre 2007, le député UMP André Flajolet (Pas-de-Calais) a été chargé par le Premier ministre d'une mission sur les disparités territoriales des politiques de prévention sanitaires, en se concentrant sur le Nord-Pas-de-Calais.

> Avec les conclusions des États généraux de l'organisation de la santé (Égos), la création des ARS (cf. actualités p. 12) et la mission Larcher sur l'hôpital, elle servira de base au projet de loi de modernisation du système de santé prévu au second semestre.

> Dans un rapport intermédiaire dont l'Agence de presse médicale (APM) a eu copie, André Flajolet recommande notamment la création de nouveaux métiers en appui de la prévention pour accentuer l'effet sur la santé. Il veut mettre en place des « métiers de coordination locale des actions de prévention » menées sur le territoire par les différentes institutions (écoles, entreprises, communes, associations...). Les autres métiers proposés concernent des missions « d'éducation, d'accueil, d'écoute, d'orientation » afin de dégager du temps médical pour les médecins, d'appuyer leur action thérapeutique et de faciliter le maintien à domicile.

> Le député finalisera ses propositions fin février début mars avant de rendre un rapport définitif en avril.