L'assurance en responsabilité civile professionnelle - L'Infirmière Libérale Magazine n° 235 du 01/03/2008 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 235 du 01/03/2008

 

Juridique

La responsabilité civile professionnelle (RCP) oblige celui qui a causé directement ou indirectement un dommage à autrui, du fait de son activité professionnelle, à le réparer. Cette obligation légale définie aux articles 1382 et suivants du Code civil s'impose à tous, y compris aux infirmières.

Aujourd'hui, les pressions sont de plus en plus fortes de la part de certaines compagnies d'assurance qui n'hésitent pas à se faire l'écho des retentissements médiatiques de quelques affaires judiciaires mettant en cause des infirmières : pourtant, l'assurance en responsabilité civile ne présente que peu d'intérêt à l'infirmière du secteur public comme du secteur privé.

En effet, lorsque l'infirmière est salariée, c'est-à-dire lorsqu'elle est liée par un contrat de travail à un médecin ou une clinique, ou encore à une entreprise, les patients ne passent pas le contrat de soins directement avec celle-ci, mais avec la clinique, le médecin ou l'entreprise qui l'emploie.

FACULTATIVE EN ÉTABLISSEMENT...

Ainsi, l'infirmière salariée agissant comme préposée de son employeur, dans l'exécution des soins courants, voit sa responsabilité civile couverte par celle de celui-ci. Conformément à l'article 1384 du Code civil, c'est l'employeur - ou plus exactement sa compagnie d'assurance - qui paie les dommages et intérêts. Dans ces conditions, il n'existe aucun intérêt d'avoir contracté une assurance en responsabilité civile.

L'assureur d'une clinique, quant à lui, ne peut en aucun cas se retourner contre l'infirmière salariée fautive : une telle action est interdite par le Code des assurances, sauf "malveillance" de la part de l'infirmière. En cas de faute de l'infirmière à l'hôpital dans l'exécution d'un soin sous la surveillance directe d'un médecin, ou de mauvaise réalisation d'un acte de soins, la victime engagera alors son action en réparation du préjudice subi directement contre l'établissement et devant le tribunal administratif.

L'impunité de l'agent n'est pas pour autant écartée : l'infirmière peut toujours être poursuivie sur le plan pénal ou disciplinaire, la sanction à son encontre pouvant aller du simple blâme à l'avertissement, voire à sa révocation. L'assurance en responsabilité n'a encore une fois que peu d'intérêt.

...MAIS OBLIGATOIRE POUR LA LIBÉRALE

La responsabilité civile se traduit par l'octroi de dommages et intérêts. Ainsi, lorsqu'une infirmière libérale blesse un patient ou provoque involontairement le décès de celui-ci, les dommages et intérêts seront acquittés par sa compagnie d'assurance.

Rappelons que l'assurance de l'infirmière libérale reste une obligation professionnelle à laquelle personne ne saurait échapper, sous peine d'interdiction d'exercice : l'infirmière engage quotidiennement sa responsabilité et c'est dès le premier jour de son exercice professionnel qu'il devra souscrire une telle assurance.

Dans le cadre de la souscription d'une assurance en responsabilité civile professionnelle, il peut aussi être utile de souscrire en plus une protection juridique qui prendra en charge les conflits d'ordre professionnel (assistance d'un avocat) ou privé de l'infirmière, ou lui permettra de bénéficier de conseils juridiques, tout au long de sa carrière.

ASSURANCE ET POURSUITES JUDICIAIRES

En l'absence d'indemnisation de la part de la compagnie d'assurance de l'infirmière dont la responsabilité a été mise en cause (lorsque la victime et la compagnie d'assurance sont en désaccord, par exemple sur le montant des dommages et intérêts accordés), une action judiciaire reste ouverte au patient, lequel prétend avoir subi un dommage.

La victime du dommage devra alors pouvoir démontrer la faute de l'infirmière, le préjudice subi et le lien de causalité entre les deux.

TRENTE ANS POUR AGIR

C'est la règle de la prescription civile de droit commun qui s'applique alors. La victime devra prouver le dommage ou le préjudice dont elle demande réparation, la faute technique ou d'humanisme de l'infirmière, la faute de négligence ou d'imprudence, et le lien de causalité entre cette faute et le dommage subi.

Généralement, c'est le tribunal de grande instance qui est compétent. Néanmoins, si la victime d'un acte infirmier estime que la réparation du préjudice est inférieure à 7 600 euros, c'est le tribunal d'instance qui doit connaître de l'action en responsabilité.

L'appel de la décision rendue par le tribunal de grande instance est toujours possible alors que, devant le tribunal d'instance, l'appel n'est recevable que si l'affaire porte sur une somme supérieure à 3 800 euros.

Notre expert vous répond

- Je suis infirmière collaboratrice. Dois-je souscrire ma propre assurance en responsabilité civile professionnelle ?

Oui, l'infirmière libérale, quel que soit son statut, est dans l'obligation d'avoir sa propre assurance en responsabilité civile professionnelle.

- En cas de poursuites pénales, l'assurance en responsabilité civile professionnelle aura-t-elle un intérêt ?

L'infirmière libérale, comme l'infirmière du secteur public ou privé, devra répondre à titre personnel et individuel d'une infraction pénale qu'elle aura pu commettre. La responsabilité pénale suppose un manquement à la loi pénale, c'est-à-dire la réalisation d'une infraction prévue et sanctionnée par la loi pénale. Elle a pour but, non pas la réparation du dommage, mais la condamnation à une peine : amende et/ou prison. En matière pénale, l'assurance en responsabilité civile s'avère inefficace. Parallèlement, la victime du dommage pourra engager une action civile afin d'obtenir réparation de son préjudice, qui prendra la forme de l'octroi de dommages et intérêts.

Mais si la responsabilité pénale d'une infirmière est engagée devant les tribunaux, l'assurance lui permettra peut-être de bénéficier gratuitement des services d'un avocat. Mais bien évidemment, personne n'ira éventuellement en prison à sa place, ni ne paiera de peine d'amende ou de dommages et intérêts à sa place. Et en matière d'infractions pénales, les contrats d'assurance prévoient la plupart du temps des clauses d'exclusion, c'est-à-dire refusant toute prise en charge d'honoraires ou dommages et intérêts, lorsque le client est poursuivi sur un plan pénal.