La HAS encourage la délégation - L'Infirmière Libérale Magazine n° 237 du 01/05/2008 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 237 du 01/05/2008

 

Actualité

politique de santé

RECOMMANDATION > La Haute autorité de santé se félicite des expérimentations et espère que ses propositions trouveront leur place dans la prochaine loi sur la modernisation du système de santé.

«Si on avait dit cela il y a cinq ans, il y aurait eu une levée de boucliers. » Pour Laurent Degos, président du collège de la Haute autorité de santé (HAS), le dossier de la délégation et du transfert de compétences bénéficie aujourd'hui d'un climat favorable. D'abord, il y a eu le succès des seize expérimentations conduites - essentiellement à l'hôpital - suite au rapport Berland sur les transferts de tâches daté de 2003 : « Après évaluation, on peut dire que le patient en est satisfait ». Ensuite, le questionnaire en ligne sur le site de la HAS : « On a reçu 228 réponses, dont un tiers d'infirmières. Presque tous les répondants demandaient que ces nouvelles formes de coopérations s'appliquent à leur profession. »

Logique de mission

Dans sa recommandation présentée le 16 avril dernier à Paris, la HAS suggère de prolonger les expérimentations, et de créer un cadre juridique pour « développer de nouvelles formes de coopération au cas par cas. »

Mais, plus globalement, c'est un cadre structurel qu'il s'agit de redéfinir autour de la notion de mission : « Le cadre juridique doit dépasser l'approche nécessairement restrictive d'une liste d'actes autorisés par profession pour évoluer vers une logique mixte, définissant également les professions de santé par les missions qui leur sont confiées. » Bref, assouplir le cadre, désegmenter les actes, privilégier une vision globale de la prise en charge.

Payer plus

Reste l'épineuse question de la formation. La réforme LMD est identifiée comme une possibilité de progression, avec trois niveaux de compétences : le métier socle, les savoirs théoriques ou pratiques plus élevés, acquis au moyen des DU (qu'il faudrait homogénéiser), et, enfin, un approfondissement de ces connaissances. « C'est dommage d'obliger les paramédicaux à s'arrêter à bac+3 », note Yvon Berland, président de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS). Et de déplorer l'absence de niveaux de formations intermédiaires entre la plupart des paramédicaux à bac+3 et des spécialistes à bac+13 voire +14, sans que certaines activités de ces derniers justifient systématiquement d'un tel niveau de formation. « Il y a là une perte de temps qui ne peut plus être toléré », a-t-il souligné.

Nouveaux métiers

Autre frein, la rémunération. Si on demande plus aux professionnels, il faudra les payer plus, estime la HAS.

Enfin, de nouveaux métiers seraient créés, comme celui de coordonnateur de soins (cf. encadré). Un concept qu'évoquent aussi les rapports Ritter sur les Agences régionales de santé (ARS) et Flajolet sur la politique de santé publique.

"Concepts flous"

Laurent Degos, qui souhaite que ces propositions trouvent leur place dans la loi sur la modernisation du système de santé prévue à l'automne, pêche-t-il par excès d'optimisme ? Le 26 mars, l'Académie de médecine et l'ordre des médecins ont cru bon de rappeler que « le médecin assume la responsabilité de la coordination des soins confiés à chaque professionnel de santé ». En d'autres termes : un coordonnateur, pourquoi pas, à condition qu'il soit médecin. Quant à la délégation, elle « ne peut se faire sur la base de concepts flous, mais renvoie à des délégations d'actes clairement identifiés par chacun des professionnels de santé accompagnées d'une information des patients ».

EN SAVOIR +

→ La recommandation DE L'HAS est disponible sur http://www.has.sante.fr

→ Le rapport Berland sur la coopération entre professionnels de santé de 2003 est disponible sur http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/berland

3 questions à...

Dr Régis Aubry, président des Fédérations des réseaux de santé de Franche-Comté

Vous mettez sur pied un master de coordonnateur des soins à l'université de Franche-Comté... Pour construire ce diplôme, nous sommes d'abord partis de l'observation des différentes fonctions de coordonnateurs des soins existantes - à l'hôpital, dans les réseaux, etc. - afin de répondre à un besoin très fort de formation, puis nous avons analysé de quoi sera fait ce métier demain.

Quel sera-t-il ? Une fonction très encrée dans des logiques territoriales et permettant aux professionnels de santé de se consacrer à leur métier, allégés d'une tâche lourde à gérer et réclamant des compétences spécifiques.

Quel profil pour ce coordonnateur ? Ce pourrait être un professionnel de santé (médecin, infirmière...), mais pas seulement. Il s'agit de décloisonner entre social et sanitaire, privé et public, etc.