BIEN PLUS QUE LA VACCINATION ANTIGRIPPALE - L'Infirmière Libérale Magazine n° 242 du 01/11/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 242 du 01/11/2008

 

Valorisation des infirmières :

Le débat

Les pouvoirs publics ont présenté la vaccination antigrippale comme un enrichissement des compétences des infirmières. Pourtant, à première vue, pas de quoi séduire démesurément la profession... Une réelle et profonde valorisation du métier est toujours attendue.

Jean-Paul Hamon est médecin généraliste, président de la section généraliste de la FMF (Fédération des médecins de France)

Confier la vaccination antigrippale aux infirmières va-t-il dans le sens d'une valorisation de leur métier ou bien s'agit-il simplement de décharger le médecin ?

Les infirmières sont autre chose que des piqueuses ! Cherche-t-on à redire que les infirmières savent faire les piqûres ? C'est de la fausse revalorisation. Elles vont être payées le double d'une intra-musculaire, la belle affaire ! Voilà qu'on leur donne la pièce et on juge qu'on les revalorise... Ce n'est pas ainsi qu'il faut s'y prendre. Et ce n'est pas cela non plus qui va alléger le quotidien des médecins.

La valorisation du métier d'infirmière doit-elle passer par une délégation de tâches de la part des médecins ou bien faut-il imaginer de nouveaux actes, tels que l'éducation thérapeutique ?

Les infirmières devraient être rémunérées dans le cadre du maintien à domicile de personnes en fin de vie. De la même manière, dans la mesure où la chimiothérapie à domicile est protocolisée, pourquoi ne pas leur permettre d'investir ce champ ? Maintenir la plupart des chimiothérapies à domicile serait beaucoup moins coûteux. S'agissant de l'éducation thérapeutique, oui, on peut aisément intégrer les infirmières pour tout ce qui concerne la prise en charge de la douleur. Cependant, l'éducation thérapeutique, on ne la fait pas tout seul dans son coin. C'est toute l'équipe de soignants, autour du patient, qui doit s'en occuper.

Vous souhaitez que l'on permette aux infirmières de salarier des aides-soignantes...

Oui, on aura alors une équipe gériatrique avancée à domicile. Il ne faut pas oublier d'ailleurs que, si l'on a besoin d'infirmières libérales, on nécessite aussi des aides-soignantes à domicile. Il faut permettre aux infirmières de salarier des aides-soignantes via des structures légères, sans pour autant avoir à monter des Ssiad. On n'aurait alors plus aucun problème de maintien à domicile. Cela suppose donc que les infirmières soient rémunérées pour ce nouveau travail.

Michèle Bressand est infirmière, conseillère générale des établissements de santé, chargée en septembre par Roselyne Bachelot d'une mission de «coopération entre professionnels de santé»

Confier la vaccination antigrippale aux infirmières va-t-il dans le sens d'une valorisation de leur métier ou bien s'agit-il simplement de décharger le médecin ?

Ni l'un, ni l'autre. L'arrêté du ministère de la Santé était trop restrictif. Il permet aux infirmières de vacciner sans prescription médicale et hors primovaccination les personnes à risque. Ce n'est donc pas une valorisation du métier d'infirmière puisqu'elles faisaient déjà cela avant et cela ne décharge pas non plus les médecins généralistes. Il s'agit juste d'une simplification de l'accès à la vaccination pour les personnes qui bénéficient d'une délivrance gratuite du vaccin. Et c'est un pas de plus vers la coordination des soins.

Quelle est la place de l'infirmière dans la coordination des soins, justement ?

Le professionnel de santé le plus présent auprès du patient doit coordonner. Ce peut donc être l'infirmière comme le médecin ou le kiné. Mais, ce qui importe dans la coordination des soins et pour la valorisation des métiers, c'est de dire ce que chacun fait, reconnaître qu'il le fait et le rémunérer en fonction.

La valorisation du métier d'infirmière doit-elle passer par une délégation de tâches de la part des médecins ou bien faut-il imaginer de nouveaux actes, tels que l'éducation thérapeutique ?

Les infirmières s'occupent déjà d'éducation thérapeutique. Mais cela ne souffre pas la médiocrité et suppose d'adapter la formation initiale et continue. Il est en outre important que chaque professionnel de santé s'y investisse, pour peu que les choses soient plus formalisées. L'éducation thérapeutique s'apprend et s'évalue. Il faut cesser d'improviser.

Jean-Paul Hamon préconise de permettre aux infirmières libérales d'encadrer des aides-soignantes ou des auxiliaires de vie dans le cadre par exemple du maintien à domicile de personnes âgées. Partagez-vous cette idée ?

J'estime que chacun doit pouvoir travailler selon le mode d'exercice qu'il a choisi, à condition que cela réponde aux besoins des malades et que cela ne se fasse pas dans l'optique d'augmenter les coûts de prise en charge. Permettre aux infirmières libérales de salarier des aides-soignantes et des auxiliaires de vie ne me choque pas, a priori. Après tout, dans leur exercice salarié, les infirmières encadrent bien ces professionnels.