En route vers la concertation ? - L'Infirmière Libérale Magazine n° 242 du 01/11/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 242 du 01/11/2008

 

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RÉFORME DES ÉTUDES PARAMÉDICALES > Attendu depuis plusieurs mois, un rapport de l'Igas préconise de reconnaître la formation initiale des paramédicaux au niveau licence. Concernant les infirmières, il plaide plus précisément pour une licence professionnelle.

Le 17 novembre prochain, débutera sous l'égide du ministère de la Santé une série de réunions de concertation autour de la réforme des études paramédicales, promise par Nicolas Sarkozy. Il semble que la méthode utilisée soit fondée sur le modèle de ce qui s'est passé avec la loi Hôpital, patients, santé et territoires que la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, s'apprête à défendre devant la représentation nationale. En effet, c'est parce que la profession infirmière s'est mobilisée en 2007 pour réclamer l'intégration de la filière au sein du système LMD (licence, maîtrise, doctorat) que le débat s'est ouvert. En mai 2007, lors d'un déplacement à Dunkerque, le chef de l'État s'était d'ailleurs engagé à permettre aux infirmières d'obtenir le niveau licence. C'est dans ce contexte que les quatre ministres Roselyne Bachelot (Santé), Valérie Pécresse (Enseignement supérieur), Éric Woerth (Budget et Comptes publics) et André Santini (Fonction publique) avaient commandé, en septembre 2007, un rapport sur le sujet à l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et à l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Après beaucoup de retard, le texte a finalement été rendu public, fin septembre.

Une évolution jugée nécessaire mais coûteuse

Le texte préconise de permettre aux professions paramédicales d'entrer dans le système LMD, considérant notamment que « la France serait de plus en plus isolée si elle se maintenait dans un système sans aucun lien avec l'Université et le dispositif LMD ». Cette évolution permettrait en outre « l'émergence de nouveaux métiers ». Pour autant, la mission insiste sur l'importance d'écarter « toute formule qui ferait courir le risque d'une formation élitiste ou trop abstraite ». Et suggère d'instaurer « autant que possible des passerelles » entre les formations paramédicales.

Par ailleurs, la mission signale que cette « perspective de progrès (...) pourrait se révéler coûteuse ». Les infirmières hospitalières passeraient alors en catégorie A, ce qui améliorerait leurs rémunérations et conduirait à terme à une revalorisation devenue essentielle des infirmières libérales. La mission évalue dans ce cadre à 90 millions d'euros le « surcoût Ondam » (objectif national des dépenses d'assurance maladie) lié à la revalorisation subséquente des infirmières libérales.

Pour une insertion progressive

Quoi qu'il en soit, la mission Igas-IGAENR privilégie la piste de la licence professionnelle s'agissant des infirmières, de manière à permettre « l'insertion progressive des personnes issues de la formation professionnelle (aides-soignantes) dans le cadre et le mode de fonctionnement de l'Université ». Les deux premières années d'étude continueraient à être organisées dans les organismes professionnels. La mission préconise enfin un calendrier de mise en place progressive avec instauration concrète de la licence professionnelle en soins infirmiers à l'université en lien avec l'institut de formation en soins infirmiers en septembre 2011.

Les infirmières sont critiques

Pour l'heure, les infirmières ne sont globalement pas séduites par les recommandations de la mission et les syndicats de la profession n'ont pas tardé à exprimer leur désapprobation. La Fédération nationale des infirmières (FNI) évoque ainsi une formation « sacrifiée sur l'autel des vieux clichés franco-français de l'infirmière dévouée, limitée intellectuellement et devant rester à tout prix manuelle ». Le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) considère en outre que la licence professionnelle « déconnecte la profession de la recherche en soins infirmiers » tandis que le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) parle d'une « sous-licence proposée aux cendrillons des soins ». La Fédération des étudiants (Fnesi) partage ces analyses et sa présidente, Livia Laine, ajoute que la reconnaissance d'une licence générale améliorerait « l'attractivité de la formation ». D'autant que, surenchérit Martine Laurent, cadre de santé infirmier, qui a été formatrice pendant six ans, « aujourd'hui, les jeunes viennent chercher un diplôme en Ifsi, pas un métier ».

Pour l'heure, Roselyne Bachelot veut se montrer rassurante. Il y a quelques jours, à l'occasion d'une visite à l'Ifsi de Saint-Nazaire, la ministre de la Santé a en effet indiqué aux élèves que ce rapport n'est pas « une feuille de route ». Dans ce contexte, elle s'est d'ailleurs prononcée en faveur d'un développement de la recherche en soins infirmiers. Point sensible pour les infirmières en exercice ou en formation.

3 questions à

... Geneviève de Gouberville, formatrice à l'Ifsi à Lannion

Les étudiants infirmiers ont-ils besoin de la reconnaissance d'un niveau licence professionnelle ?

Ce qui importe, c'est une reconnaissance à bac+3, que la licence soit générale ou professionnelle. Ils vivent la situation actuelle comme une humiliation.

Que manque-t-il aujourd'hui à la formation des infirmières ?

Les étudiants ont besoin d'acquérir une maturation professionnelle, d'améliorer leur capacité d'analyse des situations mais aussi d'avoir confiance en eux.

Que pensez-vous de l'instauration de passerelles entre les formations paramédicales ?

Ce n'est pas forcément souhaitable car cela signifie que l'on va morceler la formation infirmière. On s'expose au risque d'une diminution de l'identité infirmière.

EN SAVOIR +

LES KINÉS SONT DANS LE MÊME BATEAU

Les masseurs-kinésithérapeutes sont également concernés par le rapport Igas. Leur formation s'effectuant en quatre ans, la Fnek (Fédération nationale des étudiants en kinésithérapie) réclame un niveau master 1. Pour ces étudiants, les auteurs du rapport « restent totalement aveugles aux attentes et aux propositions des étudiants et des professionnels masso-kinésithérapeutes ».