POLITIQUE DE SANTÉ
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RÉFORME > Le gouvernement veut réformer l'hôpital, mais plus largement, le système de santé, jugé insuffisamment organisé pour répondre aux besoins de la population. L'aménagement du territoire en matière de santé, voilà l'objectif de la loi Bachelot.
Bonne année... et surtout bonne santé ! Cette année - peut-être plus encore que d'habitude - les bons voeux échangés n'ont pas manqué de faire référence à la santé. Et pour cause : les fêtes de fin d'année ont été entachées par plusieurs accidents médicaux fortement médiatisés.
D'abord, il y a eu ce bébé de six mois qui a succombé suite à un surdosage de substitut alimentaire dans sa perfusion. Puis, le 24 décembre, Yliès, petit garçon de trois ans, est décédé à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris, suite à l'administration par erreur de chlorure de magnésium. Ensuite, un homme âgé de 57 ans, victime d'une attaque cardiaque, est décédé, faute d'avoir pu être admis dans un service de réanimation. Enfin, une dame âgée de 82 ans, souffrant de déshydradation et d'insuffisance respiratoire, serait décédée « faute d'avoir reçu des soins », à Metz.
Autant de drames humains qui soulèvent une fois de plus la question de l'organisation hospitalière et, plus largement, du système de santé.
Si certaines organisations syndicales, à l'instar de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), et certains partis politiques comme le PS considèrent qu'une réorganisation hospitalière ne pourra se faire sans moyens financiers supplémentaires, le gouvernement ne voit pas les choses de cet oeil et s'en remet entièrement au projet de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) qui devrait être débattu à l'Assemblée nationale à partir du 10 février*.
Nicolas Sarkozy a en ce sens assuré, lors de la présentation de ses voeux aux personnels hospitaliers, le 9 janvier dernier à Strasbourg, que l'année 2009 ne sera pas « l'année des annonces » mais celle « des résultats tangibles, concrets, perceptibles par tous ». Le chef de l'État considère en effet que la future loi Bachelot constitue « un ensemble cohérent de mesures qui produira des résultats ».
Les accidents survenus pendant les fêtes posent aussi la question, une nouvelle fois, de la permanence des soins. Les professionnels de santé de ville, de même que les cliniques, ont à nouveau été montrés du doigt.
Martial Olivier-Koehret, président du syndicat MG-France, défend sa profession : « La nuit, les dimanches et jours fériés, 3000 médecins généralistes assurent l'astreinte dans les secteurs de permanence des soins et 400 maisons médicales de garde sont ouvertes sur le territoire. » L'hôpital public, même s'il fonctionne à effectif réduit, reste ouvert, partout, toute l'année. Mais à quel prix ?
Les infirmières, exténuées, réclament du renfort. À Bordeaux et à Lyon notamment, elles sont mobilisées depuis plusieurs semaines, dénonçant l'insuffisance des personnels hospitaliers. À leur endroit, Nicolas Sarkozy déclarait à Strasbourg : « Le don de soi qui vous anime force le respect et, en tant que chef de l'État, je vous soutiendrai en toute circonstance. » Pour lui, « les drames récents ne sauraient remettre en cause la confiance que la Nation porte à l'hôpital ».
Mais pour répondre aux problématiques dénoncées par les personnels hospitaliers, Nicolas Sarkozy, épaulé par sa ministre de la Santé Roselyne Bachelot et par son ministre de la Fonction publique Éric Woerth, affirme que la loi Hôpital, patients, santé et territoires va, sinon tout révolutionner, au moins améliorer l'organisation des soins.
Pour ce faire, plusieurs leviers sont mis en avant par le chef de l'État. Ainsi, il n'y aura qu'un patron à l'hôpital, dont il va s'agir de «renforcer l'autorité». Les professionnels de santé pourront en outre participer, dans leurs établissements, à la définition d'un « projet médical clair, ancré dans le territoire ». Quant aux agences régionales de santé (ARS), élément-clé de la réforme, elles auront la responsabilité des urgences et de la permanence des soins. Le président de la République voit dans cette évolution des choses la « garantie d'une action plus efficace sur le terrain ». Les associations de patients, dont le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss) préviennent qu'elles n'excluent pas, à terme, d'intenter des actions en justice contre les directeurs d'ARS en cas de « manquement aux soins », lorsque, par exemple, la permanence des soins ne sera pas assurée.
Les professionnels de santé de ville seront impactés de plein fouet par la réforme. Leurs interlocuteurs vont changer et la stratégie en termes d'aménagement du territoire, d'accès aux soins, de prise en charge de la population, sera revue au plus près des besoins des usagers du système de santé. Des dizaines d'amendements seront présentés lors des discussions sur la loi HPST, parmi lesquels des offensives autour de la coordination ville-hôpital mais aussi ville-ville, autour de la délégation de tâches, mais aussi autour de la fin de l'exercice isolé et du regroupement de professionnels de santé sous un même toit.
* L'ouverture des débats a déjà été plusieurs fois reportée. La date peut à nouveau être modifiée, compte tenu du calendrier parlementaire particulièrement chargé en ce début d'année.
Yves Bur, député UMP du Bas-Rhin
Quelle analyse faites-vous de la situation actuelle ?
L'actualité rattrape le projet de loi HPST. Jusqu'à présent, le débat parlementaire autour de ce texte s'annonçait serein. Au vu de l'actualité, on voit bien qu'il n'en sera rien.
Que changera la loi HPST ?
18 à 20 % des patients qui vont à l'hôpital n'ont rien à y faire. Il faut organiser le système pour que les gens soient pris en charge là où ils doivent l'être. Et mettre en place un pilotage du système au plus près des gens.
Cette loi sera le «grand soir» du système de santé ?
Non, cette loi ne va pas changer définitivement la donne. Il faudrait presque un HPST tous les ans. Pourquoi ne pas aborder ce thème dans le PLFSS ?
Face à la mauvaise situation budgétaire des hôpitaux, la Fédération hospitalière de France (FHF) prévient que « l'emploi est la seule variable sur laquelle les hôpitaux peuvent jouer pour réduire leurs déficits ». Le Parti socialiste précise : « Contre toute logique sanitaire, contre tout bon sens économique, un plan social déguisé portant sur au moins 20 000 postes à l'hôpital public est en train de s'imposer aux acteurs de la santé, aux personnels hospitaliers, aux élus et aux Français. »