L'Infirmière Libérale Magazine n° 245 du 01/02/2009

 

Éditorial

Hiver 2009. Aux premiers flocons, les services municipaux s'organisent : il faut vite fermer les parcs et jardins. Pourquoi ? « Parce qu'on peut glisser et tomber », répondent-ils très sérieusement. Le refrain semble avoir gagné toutes les grandes villes de France et de Navarre. Le pays aurait-il oublié que la neige est un phénomène climatique normal, lié à l'hiver ? Enfants des villes, fuyez comme la peste ces flocons glacés qui vous rongeront les mains, ces ruisseaux gelés aux allures de folle patinoire et ne parlez surtout pas aux bonshommes qui portent une carotte en guise de nez. Ceux qui s'y risqueront seront fichés comme de dangereux rêveurs, de doux dingues qui finiront peut-être enfermés eux aussi, mais derrière d'autres grilles.

L'excès de précaution caractérise tellement notre société que tout cela en devient risible. Oui, les municipalités craignent d'avoir à essuyer des procès d'usagers mécontents. Des procès pour accident de glissade. Mais pourquoi, alors, ne fermer que les espaces verts ? Fermons les piscines où l'on boit la tasse, le bus qui risquerait de nous faire arriver à l'heure au travail, les boulangeries qui font grossir, les cafés hantés par le spectre de la nicotine... Et fermons, pourquoi pas, les hôpitaux où l'on meurt, parfois. Parce que dans la vraie vie, les soignants ne sauvent pas tout le monde. Les hôpitaux sont des lieux que l'on ne devrait fréquenter qu'en cas de réel besoin. Petits bobos, bosses et engelures sur les doigts... Laissons glisser les enfants. Les grands auront alors autre chose pour horizon qu'un pays qui s'ennuie ferme.