Une pathologie
Cahier de formation
Le point sur
La lombalgie aiguë commune, la plus fréquente des lombalgies (plus de 90 %), peut être considérée comme un incident banal de vie ou mener à l'invalidité. Une meilleure connaissance des facteurs de risque de chronicité a modifié sa prise en charge.
La lombalgie commune est d'origine microtraumatique ou dégénérative. Elle est liée à différents désordres responsables de douleur : détérioration discale dégénérative, arthrose interapophysaire postérieure, distension ligamentaire, contracture musculaire. Si elle dure moins de 4 semaines, elle est aiguë, entre 4 et 12 semaines, elle est subaiguë, et, au-delà de 12 semaines, elle est chronique.
Il s'agit d'une pathologie très fréquente en France et dans les autres pays industrialisés. Le pourcentage de la population adulte qui en souffre ou en a souffert est de 70 %. Près de 10 % de ces lombalgies évoluent vers l'invalidité.
La lombalgie se définit comme une douleur ou une gêne fonctionnelle située entre la 12e côte et la partie inférieure de la fesse, avec ou sans irradiation dans le membre inférieur. Elle peut être médiane, en barre, latéralisée.
Cette symptomatologie peut relever de causes variées, et le diagnostic de lombalgie commune n'est évoqué qu'après avoir exclu les lombalgies symptomatiques d'affections diverses (tumeurs, fractures...) qui doivent être éliminées précocement, car elles nécessitent un traitement spécifique. C'est la raison pour laquelle toute lombalgie justifie une consultation médicale.
En cas d'irradiation douloureuse dans les membres inférieurs (lombosciatiques et lombocruralgies), il faut rechercher des signes de gravité qui imposent une indication chirurgicale et l'envoi du patient en centre spécialisé pour une prise en charge adaptée.
Les signes de gravité sont :
→ un déficit moteur radiculaire sur le territoire atteint ;
→ un syndrome de la queue de cheval ;
→ une radiculalgie hyperalgique, définie par la persistance d'une douleur insupportable malgré un traitement par un antalgique majeur (opiacés).
Il faut éliminer une lombalgie symptomatique - moins de 5 % des cas - où le symptôme révèle une affection nécessitant un traitement spécifique (fracture vertébrale, ostéoporose, infection, tumeur, anévrysme de l'aorte...).
Ce diagnostic est évoqué devant la présence de signes d'alerte et conduit à la prescription précoce d'examens complémentaires (radiographies du bassin et du rachis lombaire de face et de profil, IRM, et autres examens en fonction de l'orientation) et d'un traitement adapté.
L'absence de signes d'alerte évoque une lombalgie commune. On ne demande pas de radiographies dans les sept premières semaines de l'évolution (sauf quand on envisage un traitement par manipulations).
En effet, on connaît la très grande fréquence de signes radiologiques de discopathie chez les sujets indemnes de lombalgie. De plus, on a montré qu'un diagnostic - le plus souvent injustifié - de lésion vertébrale ou discale dans les sept premiers jours d'évolution augmente de près de cinq fois le risque d'évolution chronique par comparaison aux diagnostics non spécifiques (douleur, étirement, tour de reins, dérangement...).
En revanche, l'absence d'évolution favorable peut conduire à raccourcir ces délais, et la tomodensitométrie, l'IRM ou la scintigraphie sont alors les examens les plus adaptés.
Les épisodes aigus de lombalgie commune s'améliorent rapidement (50 % en moins d'une semaine, 90 % en moins d'un mois), mais guérissent lentement : au 12e mois d'évolution, une douleur persiste dans 2 tiers des cas et une rechute s'est produite dans 1 cas sur 2. Les malades doivent être prévenus que la persistance ou la récidive de la douleur dans les mois qui suivent un épisode aigu est fréquente, banale et sans gravité, afin de ne pas s'inquiéter injustement. L'inquiétude et les craintes générées par la douleur, les pensées catastrophiques, sont, en effet, des déterminants essentiels de l'évolution chronique. L'évolution prolongée des lombalgies communes aboutit cependant, dans certains cas, à une désinsertion sociale et professionnelle grave après quelques mois d'évolution, l'invalidité lombalgique. C'est cette évolution que l'on cherche à prévenir.
La démarche a trois objectifs : informer le patient, soulager sa douleur pour lui permettre de retrouver des activités quotidiennes rapidement et éviter la récidive.
Il faut rassurer le patient sur la bénignité de la lombalgie, quand elle est prise en charge de façon adéquate par le patient et le médecin, le sensibiliser à l'inutilité des examens complémentaires et à l'importance de rester actif.
→ Les traitements médicamenteux
Le paracétamol est prescrit en première intention, puis les anti-inflammatoires non stéroïdiens, plus efficaces. Le traitement AINS ne doit pas être poursuivi au-delà de 8 à 15 jours sans revoir le médecin traitant. Les myorelaxants peuvent être associés.
→ Le repos au lit
Il est autorisé si l'intensité de la douleur l'impose, mais pas au-delà de trois jours.
→ La reprise des activités
Les patients doivent pouvoir maintenir ou reprendre leurs activités aussi rapidement que la douleur le leur permet. Il faut insister sur l'absence de dangerosité de cette reprise.
→ Les manipulations vertébrales lombaires
Elles peuvent être pratiquées dans les six premières semaines de l'évolution.
Leurs principales contre-indications sont la douleur à la manipulation, le mouvement opposé à la direction douloureuse, toute suspicion d'une cause spécifique ainsi qu'une raideur rachidienne.
→ Programmes multidisciplinaires
Vers la 6e semaine, si l'évolution favorable ne s'est pas clairement dessinée, des programmes multidisciplinaires doivent être proposés.
→ Apprendre à réaliser de la manière correcte les gestes de la vie courante visant à moins solliciter le dos dans le cadre professionnel.
→ Pratiquer une activité physique (marche rapide, course à pied, bicyclette, natation, au moins deux heures par semaine avec renforcement progressif) et des exercices physiques au travail.
→ Améliorer les conditions de travail, éviter de porter des charges lourdes, de s'exposer aux vibrations ou de pratiquer des sports qui provoquent des douleurs.
→ Avoir une meilleure hygiène de vie (contrôle du stress, alimentation équilibrée, sommeil suffisant, apprentissage de ses propres limites, contrôle de la respiration...).
→ Âge inférieur à 20 ans ou supérieur à 50 ans.
→ Antécédent récent de traumatisme violent.
→ Douleur constante et progressive non mécanique.
→ Douleur dorsale.
→ Antécédent de tumeur maligne.
→ Utilisation prolongée de corticoïdes.
→ Toxicomanie, immunodépression, infection par le VIH.
→ Mauvais état général, amaigrissement inexpliqué.
→ Atteinte neurologique étendue.
→ DDéformation structurale.
→ Fièvre.