C'est pas permis - L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009

 

Éditorial

En toute impunité, notre territoire s'est hérissé d'interdits qui élèvent la solidarité au rang de délit. En France, on n'a pas le droit d'ouvrir sa porte à un étranger en situation irrégulière. Défendu de lui offrir à la maison un repas chaud, ni de lui permettre de se doucher après des jours d'errance.

Nous avions rencontré à Calais, l'année dernière, quasiment jour pour jour (ILM n°237), une infirmière libérale, Monique Delannoy, qui avait assuré les soins des migrants au lendemain de la fermeture du camp de Sangatte, géré par la Croix Rouge (sur ordre du ministre de l'Intérieur de l'époque...). Elle a pris une camionette, quelques pansements, du désinfectant et a commencé à panser des plaies. Recoudre. Soigner, tout simplement(1). Parce que ça, elle sait le faire. Et aussi parce « qu'elle ne pouvait pas regarder sans rien faire des gens souffrir dans la rue, à quelques kilomètres » de chez elle. Exercice illégal de la médecine ? Sans doute, elle le disait elle-même. La fermeture du camp où les migrants pouvaient recevoir des soins remonte à novembre 2002. Six ans et des poussières plus tard, la sortie du film Welcome de Philippe Loiret(2) amène enfin des députés à déposer une proposition de loi visant à « changer une loi absurde qui confond, sous l'incrimination d'aide au séjour irrégulier, ces gestes de solidarité humaine avec la vénalité des réseaux de passeurs ». Certes, on n'enferme pas les coupables de « délit d'entraide » dans des geôles du genre de celles que fuient les migrants de l'après Sangatte. Mais on les interroge, on les menace. On leur fait peur. La compassion, ça se soigne, docteur ?

(1) Monique Langlois ne soigne plus «à la sauvage» mais agit toujours. Vous pouvez envoyer des dons à son association La Belle Étoile, BP 34, 62 370 Audruicq.

(2) Dans son film Welcome, sorti en salle le 11 mars, Philippe Loiret raconte l'avalanche de problèmes qui s'abat sur un maître-nageur, interprété par Vincent Lindon, lorsqu'il décide d'aider un jeune Irakien sans papiers.