Il donne des ailes aux pieds des patients - L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009

 

Christophe Hervier, pédicure-podologue

La vie des autres

Lorsqu'un pédicure-podologue prend en main les pieds de ses patients, c'est bien sûr pour leur redonner toute leur fonctionnalité, mais également pour améliorer la posture générale du corps. Christophe Hervier, installé à Paris, adore ce métier qui lui permet de répondre efficacement et rapidement aux attentes des patients.

La pédicurie-podologie ne fait pas forcément partie des voies professionnelles que l'on emprunte par vocation, mais plutôt de celles qui révèlent leurs meilleures facettes à ceux qui se donnent la peine de la découvrir sans préjugé. Bien qu'essentiel pour « tenir droit dans ses bottes », le pied se cache plus qu'il ne se montre dans nos sociétés. On l'associe à des odeurs désagréables, une apparence un peu rebutante, remarque Christophe Hervier, qui exerce dans un cabinet parisien. « Je n'ai pas voulu être podologue depuis mon plus jeune âge, confirme-t-il. J'ai fait une prépa paramédicale. Je voulais soigner après des études rapides et dans un cadre qui permette d'obtenir des résultats immédiats. »

Cachez ce pied...

L'ostéopathie l'attire beaucoup mais des discussions familiales l'orientent vers le milieu médical. La pédicurie-podologie émerge de ces échanges. Renseignements pris, elle semble réunir les caractéristiques que Christophe Hervier recherche : il se lance donc dans cette voie. Dès la première des trois années d'études, l'enseignement pratique des soins de pédicurie commence. « C'est assez dur de se mettre face à un pied, constate-t-il alors, même pour juste couper les ongles, alors que c'est ce qu'on fait le plus souvent pour soi-même ! » De plus, « on est tout de suite confronté au patient et à notre propre dextérité. Mais cela s'est très bien passé. J'ai tout de suite adoré soigner ». Le reste de la formation porte sur la podologie, notamment les examens cliniques et la correction de certains problèmes par des semelles, l'appareillage.

Axée sur les soins de la peau et de l'ongle du pied, la pédicurie, parfois confondue avec les soins esthétiques des pieds, ne bénéficie pas, au sein de la profession, des «lettres de noblesse» dont jouit la podologie, dédiée à la structure du pied. Mais les deux disciplines ont immédiatement séduit le jeune homme. Alors fraîchement diplômé en 1998, il se lance rapidement après un an de remplacement. En 2000, il ouvre son propre cabinet : « Je me suis lancé avec pas mal de dettes après des études payantes et un crédit pour l'achat de matériel de qualité et de la présentation de clientèle, très chère à Paris », raconte-t-il. Non content de se consacrer à fond à son métier, il entreprend en même temps des études d'ostéopathie, comme l'y poussait sa première idée.

Aujourd'hui, son activité se répartit en différentes strates. Le lundi est consacré à l'enseignement dans une école de pédicurie-podologie parisienne. Les autres jours, il pratique la pédicuriepodologie et l'ostéopathie, facilement complémentaires.

Si un quart de la clientèle de Christophe Hervier est constituée de personnes âgées - ce qui est normal compte tenu de l'évolution de la population française - « de plus en plus de jeunes viennent en prévention », note le pédicure-podologue. Les parents sont de plus en plus conscients des problèmes de pied. Autre fait marquant : un nombre croissant d'hommes franchissent le seuil du cabinet. Quels qu'ils soient, de plus en plus de patients consultent directement en première intention, les autres étant adressés par leur médecin.

Plus de prévention

Comme le praticien apprécie toutes les facettes de son métier, les soins de pédicurie représentent une grosse partie de son activité. Les patients qui lui confient leurs pieds lui demandent en effet souvent de soigner leurs ongles incarnés, mais il intervient également pour l'exérèse des cors, des durillons, sur l'hyperkératose des talons... En podologie, la palette de soins est très vaste : après examen clinique, Christophe pratique aussi bien les orthoplasties de protection et de posture, qui consistent à éviter le contact ou le chevauchement entre deux orteils, que les orthonyxies qui permettent de redresser des ongles hypercourbés. Qu'ils soient dus à un problème de bassin, de lombaires, de cervicales ou à un hallux valgus (oignon), les défauts de posture, potentiellement sources de douleurs, peuvent être corrigés par des semelles déterminées par le praticien. Dans une discipline comme dans l'autre, le podologue s'attache à ne pas poser son regard sur les seuls pieds de ses patients. Il a besoin de savoir s'ils souffrent de diabète, d'hypertension, etc., mais aussi de décoder leur posture, la position de leur bassin, de leur ceinture scapulaire... Une démarche que l'ostéopathie complète parfaitement. Christophe Hervier apprécie ce regard global et la pluridisciplinarité dans la prise en charge. Sa plus grande satisfaction ? Que les patients quittent son cabinet le pied léger !

Il dit de vous !

« Je ne rencontre pas beaucoup d'infirmières libérales car j'exerce en cabinet. En tout cas, les patients me disent qu'il est très difficile de trouver une infirmière à Paris et ils me demandent souvent de leur donner des adresses. On demande aux confrères, aux kinésithérapeutes... Peut-être faudrait-il imaginer, au niveau de l'ordre des pédicures-podologues ou de la Fédération nationale des podologues, d'avoir quelqu'un à qui l'on pourrait s'adresser pour contacter les infirmières ? Car on a besoin d'elles ! Les patients peuvent nécessiter de soins en cas d'ulcérations, par exemple. Avec les personnes diabétiques, on pourrait imaginer une fiche de liaison commune. En formation, j'ai rencontré une infirmière devenue podologue : elle nous a appris beaucoup sur les pansements. Les infirmières peuvent aussi avoir envie de mieux connaître notre champ d'action. »

QUESTION DE STATUT

Plusieurs revendications en marche

Les 10 800 pédicures-podologues bénéficient de la libre réception de leurs patients, du droit au diagnostic et à la prescription, ce qui caractérise les professions médicales à compétence définie. La Fédération nationale des podologues (FNP) insiste sur l'importance de ce statut, qui devrait aussi lever la limitation des actes à ceux qui n'impliquent pas d'effusion de sang. Toutefois, diplômés d'État au terme de trois années d'études, les podologues sont souvent assimilés à des professionnels paramédicaux. Ils disposent d'un ordre professionnel depuis le 12 juillet 2006. Leur activité est encadrée par un Code de déontologie (2007) et par un décret de compétence du 30 juillet 2008. La FNP réclame aussi un élargissement du droit à prescription et un meilleur remboursement pour les patients. Plus d'infos sur le site .