L'observance du traitement médicamenteux - L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 247 du 01/04/2009

 

Cahier de formation

Savoir faire

Monsieur D. est sous traitement depuis son infarctus. Cela fait quelques jours qu'il présente une fatigue et des vertiges. Il pense que son traitement bêtabloquant ou que les dérivés nitrés en sont responsables et il a donc tout arrêté. Que faire ?

Il faut informer le patient qu'un traitement ne doit pas être arrêté. Les signes qu'il présente sont probablement occasionnés par les bêtabloquants. Le médecin, qu'il faut contacter, adaptera les doses. Il faut l'informer aussi sur le mode d'action des traitements.

LES BÊTA-BLOQUANTS

Actions des bêtabloquants

Les bêtabloquants, en s'opposant aux effets des catécholamines, s'opposent à l'augmentation des besoins en oxygène du myocarde induite par l'effort et le stress.

→ Ils diminuent la fréquence cardiaque et la pression sanguine artérielle et, de ce fait, la consommation myocardique en oxygène, assurant une protection locale du territoire ischémié. Ils ont un effet protecteur sur les troubles du rythme.

→ Ils réduisent, par ailleurs, la progression de la fibrose myocardique et du remodelage ventriculaire en post-infarctus.

→ Ils diffèrent en fonction de leur sélectivité pour les récepteurs bêta 1 ou bêta 2 adrénergiques. Ceux du premier groupe sont appelés «cardiosélectifs», de meilleure tolérance (cf. tableau ci-contre).

Effets secondaires

En raison de leur mode d'action, les bêtabloquants diminuent les performances à l'exercice physique. Ils peuvent parfois provoquer un certain degré de fatigue, surtout en début de traitement.

Les bêtabloquants sont généralement bien supportés, mais la dose doit être adaptée à chaque malade. En effet, si le dosage est trop élevé, le coeur peut se ralentir de façon excessive et la tension artérielle devenir trop basse, entraînant alors fatigue, vertiges et parfois même perte de connaissance. Aux doses utilisées dans le traitement de l'angine de poitrine, ils peuvent aggraver une insuffisance cardiaque, alors que l'administration prudente de faibles doses de bêtabloquants est utile dans le traitement de certaines insuffisances cardiaques en luttant contre les effets toxiques des catécholamines.

Modalités

On commence par la dose la plus faible et on adapte par paliers progressifs. Ils sont contre-indiqués chez les asthmatiques et en cas de bronchopneumopathie obstructive.

On ne doit jamais arrêter brusquement un traitement par bêtabloquants, il faut le faire de façon progressive (en une à deux semaines), car l'arrêt brutal peut provoquer une recrudescence des crises angineuses.

LES ANTIAGRÉGANTS PLAQUETTAIRES

Les antiagrégants plaquettaires s'opposent à l'agrégation plaquettaire, qui intervient à différents niveaux de la formation du thrombus, et sont utilisés dans le traitement d'urgence des syndromes coronaires aigus et dans leur prévention.

L'aspirine

L'aspirine est utilisée à la dose de 160 à 500 mg (en l'absence de contre-indication), dans le syndrome coronaire aigu, et à la dose de 75 à 325 mg/j de façon systématique chez un patient coronarien chronique.

Effets indésirables : gastrite, douleurs abdominales, parfois hémorragie du tube digestif, saignement du nez ou des gencives, accidents allergiques.

Le clopidogrel (Plavix®)

Le clopidogrel est utilisé à la dose de 75 mg/j.

Effets indésirables : hémorragies intestinales ou nasales, nausées, diarrhées, éruptions cutanées. Il peut également entraîner des atteintes hépatiques ou hématologiques (surveillance de la NFS, coagulation, fonctions hépatiques).

Soins dentaires : l'arrêt du traitement antiagrégant plaquettaire avant des soins dentaires (notamment en cas d'extraction) n'est pas justifié.

LES STATINES

Actions

Les statines diminuent le LDL cholestérol sanguin (LDL : low density lipoprotein) et les dépôts de LDL en excès dans les parois artérielles. Elles réduisent également les phénomènes inflammatoires, prolifératifs et d'agrégation plaquettaire au niveau des plaques athéroscléreuses.

Modalités

La prescription d'une statine est systématique, quel que soit le taux de LDL, et les doses sont ajustées pour obtenir un LDL inférieur à 1 g/l (2,6 mmol/l).

Les statines sont généralement bien supportées. Mais elles peuvent entraîner des effets secondaires, hépatiques ou musculaires (douleurs musculaires qui peuvent nécessiter l'arrêt du traitement). Dans des cas très exceptionnels, une rhabdomyolyse peut survenir, traduisant des lésions musculaires sévères. Cependant, à condition de surveiller les malades, surtout en début de traitement ou en cas de doses élevées, et de ne pas associer certains médicaments (un médicament de la classe des fibrates), les douleurs musculaires observées sous statines n'ont aucune conséquence grave.

La surveillance repose sur le contrôle des transaminases, en début de traitement et tous les ans. Tout symptôme musculaire inexpliqué justifie un dosage des créatinines phosphokinases.

LES INHIBITEURS DE L'ENZYME DE CONVERSION

Actions

Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) réduisant l'hypertrophie et la fibrose cardiaque, le remodelage ventriculaire (déformation après l'infarctus) et la progression vers la défaillance cardiaque. De plus, ils freinent l'athérogenèse, réduisent le tonus sympathique, restaurent la fonction endothéliale et possèdent des actions anti-oxydantes. Ils sont indiqués après l'infarctus, dans le syndrome coronarien chronique, l'insuffisance cardiaque et l'HTA.

Effets secondaires

Les IEC sont généralement bien tolérés. Une toux sèche et opiniâtre peut survenir et nécessiter l'arrêt du traitement. Ils peuvent aggraver certaines insuffisances rénales (dosages systématiques de l'urée, créatinine et potassium sanguins).

Ils peuvent être remplacés par les inhibiteurs de l'angiotensine II (valsartan) qui sont aussi des inhibiteurs du système rénine-angiotensine. Ils ont les mêmes effets secondaires mais ne provoquent pas de toux.

LES DÉRIVÉS NITRÉS

Actions

Ils entraînent une vasodilatation veineuse, diminuent la précharge ventriculaire et donc le travail cardiaque, et lèvent un éventuel spasme coronaire. Ils sont indiqués en cas d'angor persistant malgré le traitement. La posologie efficace devra être atteinte progressivement.

Les dérivés nitrés d'action immédiate et courte

Modalités

Pulvérisation sous la langue ou pilule à croquer lentement et à garder quelques temps dans la bouche.

Traitement curatif : en cas de crise, la posologie est d'une pulvérisation ou une pilule, à renouveler une ou deux fois avec un intervalle de 2 ou 3 minutes si la crise persiste. Si la prise doit être renouvelée, il est conseillé au patient de s'asseoir et de rester assis pendant une dizaine de minutes après la deuxième administration.

Traitement préventif : une pulvérisation dans les 2 à 3 minutes précèdant une circonstance susceptible de déclencher une crise d'angor.

Effets secondaires

La trinitrine est généralement bien supportée. Une bouffée de chaleur et des céphalées peuvent être ressenties. Une brève diminution de la tension artérielle avec vertige peut survenir surtout chez le sujet âgé (utiliser de préférence le dosage faible). Le seul produit contre-indiqué avec la trinitrine et les dérivés nitrés est le Viagra® (risque d'hypotension importante).

La trinitrine est contre-indiquée en cas de choc, d'hypotension. Éviter les surdosages en spray (risque de syncopes).

Les dérivés nitrés d'action prolongée

Doses usuelles : 10 à 80 mg par 24 heures réparties en 2 à 3 prises.

Le patient doit être informé de deux particularités : l'«effet rebond» et la nécessité d'un «intervalle libre».

L'effet rebond : possibilité d'augmentation des crises d'angor en cas d'arrêt brutal et prolongé du traitement.

L'intervalle libre : nécessité de respecter, sur les 24 heures, un intervalle de temps sans dérivés nitrés d'action prolongé. Ils peuvent en effet perdre leur efficacité : c'est le phénomène d'échappement. Un patch doit être retiré au moins 8 heures, en général la nuit. La prise des comprimés devra aussi respecter cet intervalle libre.