Ces auteurs qui piquent là où ça fait mal

Le baroud d'honneur, celui dont rêve tout employé convaincu de l'incohérence du système qui l'emploie, le voilà. William Réjault a raccroché sa blouse après un incident de trop dans la maison de retraite parisienne où il travaillait. Non sans régler ses comptes.

Dans son dernier opus⁽¹⁾, l'exblogueur (Ron l'infirmier, c'était lui) dénonce la course au profit qui amène à « maltraiter les vieux ». Il appelle un chat un chat. Et le mot maltraitance, il sait aussi le poser là où il faut. Quand la viande n'est pas coupée pour tenir la cadence de distribution, qu'on oublie l'appareil dentaire, la prothèse auditive... Ou encore lorsqu'on interdit à un patient diabétique âgé de 97 ans ses derniers plaisirs sucrés. Utile à qui ? « Avec le recul, je crois que parfois la maltraitance c'est aussi de suivre les règles à la lettre » écrit l'auteur. Et il y a pire...

William Réjault ne tire pas à vue sur ses collègues. Pas toujours excusables, ils ne deviennent en effet que ce que leurs « salaires minables » pouvaient faire d'eux. En cause, aussi : la précarité de l'emploi, le manque de formation et la complicité de l'administration rompue à la loi du silence.

A quelques encablures dans les rayonnages des librairies, si Anne-Marie David a elle aussi décroché la blouse, la comparaison avec William Réjault s'arrête là : après quarante ans d'exercice (et de silence) dans la fonction publique, elle est à la retraite. Infirmière puis cadre de santé à la Pitié-Salpêtrière (Paris), elle a connu les coiffes amidonnées mais aussi la valse des réformes, la canicule de 2003 et la course à la rentabilité. Son ouvrage ⁽²⁾, qui retrace une histoire pourtant pas si ancienne, étonnera les plus jeunes. Pour les autres, un puissant raviveur de mémoire.