Se faire connaître quand on s'installe - L'Infirmière Libérale Magazine n° 253 du 01/11/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 253 du 01/11/2009

 

COMMUNICATION

Votre cabinet

Sortie de l'école ou de retour sur le marché libéral, l'infirmière doit habilement user des outils qui sont à sa disposition pour parvenir à se faire connaître. Tout un art quand on veut satisfaire aux exigences de la profession qui interdit toute publicité. Une démarche à mener avec diplomatie et patience.

« La profession d'infirmier ou d'infirmière ne doit pas être pratiquée comme un commerce »

Cette phrase tirée de l'article R.4312-37 du Code de Santé publique et régissant les règles professionnelles de l'exercice infirmier résume à elle seule l'enjeu auquel doivent faire face les nouvelles recrues infirmières lors de leur installation. Ainsi « tous les procédés directs ou indirects de réclame ou publicité sont interdits aux infirmiers ou infirmières », poursuit l'article. Comment, dès lors, percer dans le métier lorsque l'on vient tout juste d'arriver dans une nouvelle ville ou un quartier inconnu ? Qu'est-il autorisé de faire et quels impairs mieux vaut-il éviter ?

Première chose à retenir, la publicité englobe toute forme de communication faite dans le cadre d'une activité commerciale, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la vente de biens ou de services. Les soins ne représentent donc pas un service comme un autre et l'infirmière qui exerce son métier le fait non pas pour vendre un service, mais pour répondre à une demande. Exit donc, de facto, la notion de publicité. Il existe cependant des astuces pour percer parmi les professionnelles du soin.

Bien choisir son cabinet

Après une mini-étude de marché, Véronique, infirmière dans le béthunois (Pas-de-Calais), a préféré opter pour un cabinet un peu excentré : « Je connaissais déjà quelques futures consoeurs et certaines avaient un portefeuille de patients important. Je savais que ce serait difficile. J'ai donc choisi une installation un peu à l'écart de la ville et j'ai contacté par courrier des cabinets médicaux et mes connaissances dans le secteur des soins. J'ai ainsi pu me créer un nouveau vivier de patients sans marcher sur les plates-bandes des autres », explique-t-elle.

Car il faut garder à l'esprit qu'en arrivant dans un nouvel endroit, vous devrez conquérir sainement votre patientèle : « Tous procédés de concurrence et notamment tout détournement déloyal de clientèle sont interdits », rappelle le Code de la Santé publique. Oubliez donc les mauvais plans pour détourner les patients chèrement acquis d'une consoeur qui a pignon sur rue depuis des années : en plus de vous prendre un râteau, vous risquez d'être définitivement prise en grippe par les autres infirmières libérales qui jugeront complètement déloyale votre démarche. Exit aussi les publicités dans le journal ou les cartes de visite nonchalamment laissées en libre-service dans la salle d'attente du médecin du quartier : « Je me souviens d'un infirmier qui a suivi une formation spécifique en addictologie pour aider les patients à se sevrer du tabac et qui en avait fait la publicité dans le journal communal, sous forme d'un encart non nominatif, sur un centre d'information tenu par un professionnel de santé », explique Marie-Ange Testelin, infirmière et directrice de l'Espace de concertation et de liaison addictions tabagisme (Eclat) à Lille : « Mais ce genre de pratiques est interdit. Nous avons le devoir de le lui rappeler. »

Étayer son réseau

Quant à Céline, infirmière à Paris, elle se veut rassurante pour ce qui est de se faire connaître : « Nous avons décidé, moi et trois amis infirmiers, de former un cabinet fonctionnant sur deux arrondissements. Pour dénicher notre future patientèle, nous avons simplement utilisé les pages jaunes. Nous avons ciblé tous les médecins généralistes, pharmacies et petites cliniques du secteur où nous souhaitions nous installer et leur avons rendu visite pour nous faire connaître. Et puis, une source potentiellement intéressante de patients, à ne pas négliger, ce sont les laboratoires d'analyses médicales. Ils sont souvent en recherche de préleveurs à domicile, nous les avons donc également contacté », conclut-elle en précisant que le véritable casse-tête est administratif. « Si j'ai un conseil à donner, c'est de ne pas mettre la charrue avant les boeufs, tempère la jeune infirmière. Nous avons eu des freins administratifs auxquels on ne s'attendait pas, alors que nous avions déjà une patientèle presque constituée. » Pour faire face à cela, Céline conseille de faire appel à un juriste spécialisé en création de cabinet paramédical, pour éviter les pièges et écueils du primo-installant. Et de porter le projet à plusieurs, car il faut des épaules solides ensuite « pour assurer un service complet auprès de ses patients ».

À retenir

Les 4 règles d'or de l'installation

- Une plaque sobre tu apposeras : celle-ci ne doit pas excéder les dimensions de 25 x 30 cm et comportera uniquement les prénoms, nom, titre et diplôme reconnu.

- Aucune pub tu ne feras : ne pas oublier que la profession n'est pas pratiquée comme un commerce.

- Sur les pages jaunes (des professionnels) tu t'inscriras : simplement et clairement avec un numéro de fixe et de portable si possible.

- Confrères et consoeurs tu inviteras (pour te faire connaître) : rappelons en effet que la concurrence et le détournement déloyal de clientèle sont interdits.

DÉMARCHE Jusqu'où communiquer ?

Une fois votre cabinet choisi, votre plaque apposée, la tentation est grande d'avertir tout le monde de votre arrivée. Oui, mais pas n'importe comment. Exit la page de publicité dans le journal local, le flyer distribué aux habitants du quartier ou l'affiche A4 placardée chez les médecins du coin. Vous pouvez tout à fait envoyer un courrier aux professionnels de santé du quartier où vous comptez exercer pour les informer de votre arrivée, et même éventuellement les convier à l'inauguration de votre cabinet - une pratique qui devient de plus en plus courante et qui, bien réalisée, peut se révéler payante (cf. rubrique Exercice au quotidien ILM n°250) ! Et si les consoeurs ne font pas forcément le déplacement, vous ne pourrez néanmoins pas vous voir reprocher d'avoir fait votre installation en douce ! Même chose pour les cartes de visite : impossible d'en laisser traîner dans la salle d'attente du médecin en libre-service, mais vous pouvez néanmoins laisser vos coordonnées au médecin qui pourra, le cas échéant, orienter ses patients qui demandent une adresse précise. Enfin, sachez que selon l'article R.4312-36 du Code de la Santé publique, vous avez droit, pour vous faire connaître lors de votre installation, à deux insertions consécutives dans la presse, afin de faire connaître vos horaires (clause valable également en cas de changement d'adresse).