Les traitements médicamenteux - L'Infirmière Libérale Magazine n° 254 du 01/12/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 254 du 01/12/2009

 

Cahier de formation

Savoir faire

Hélène D. est en protocole d'AMP depuis 1 an. Au cours d'une visite, elle s'interroge : sa cousine, également en traitement, commence ses injections plus tôt dans le cycle. Elle a d'ailleurs lu sur un site Internet que cela augmente les chances de procréation. Pourquoi pas elle ?

Rappelez-lui qu'il existe des protocoles longs et courts et diverses façons d'associer les produits en fonction de la réponse ovarienne. Que le médecin choisit celui qui correspond le mieux à chaque cas. Dites-lui que les forums sont des espaces d'échange mais qu'il est inutile d'y comparer ses traitements puisqu'ils sont individualisés. Une relation de confiance avec le médecin est nécessaire.

LES PRODUITS

Les traitements (cf. tableau p.35) permettent de mimer ou d'amplifier chimiquement le cycle physiologique afin d'obtenir un ou plusieurs follicules matures et d'augmenter les chances de grossesse. Ils peuvent agir à différents stades et sont plus ou moins associés selon des protocoles définis.

Prévenir l'ovulation spontanée

Pour stopper l'ovulation spontanée induite par le pic de LH, on utilise des produits qui bloquent l'activité de l'hypophyse gonadotrope. C'est le rôle des analogues (agonistes ou antagonistes) de l'hormone libérant l'hormone lutéinisante (LH-RH pour luteinizing hormone-releasing hormone aussi appelée gonado-libérine, GnRH pour gonatropin-releasing hormone), hormone secrétée de façon pulsatile par l'hypothalamus qui stimule l'hypophyse.

Les agonistes de la LH-RH

Mode d'action : ils «bloquent» l'hypophyse en occupant de façon permanente (et non plus pulsatile) les sites de l'hormone naturelle. Cela se traduit d'abord par une libération massive de FSH (hormone folliculo-stimulante) et de LH pendant deux jours (effet flare up : élévation brutale de la testostéronémie) puis par un blocage de la libération de ces hormones. En effet, l'hypophyse ne fonctionne plus si elle est stimulée de façon permanente par l'hormone hypothalamique.

Produits : triptoréline (Décapeptyl®) en injection sous-cutanée (SC 0,1 mg) ou intra-musculaire (IM 3 mg), buséréline (Supréfact®) en solution injectable SC et Nafaréline (Synarel®) en solution nasale.

Posologie : les injections SC et les pulvérisations nasales sont administrées quotidiennement, une à deux fois par jour. La solution Décapeptyl® IM 3 mg s'administre en une seule fois, le deuxième jour du cycle.

Les antagonistes de la LH-RH

Mode d'action : les antagonistes agissent directement au niveau de l'hypophyse en bloquant les récepteurs de l'hormone hypothalamique. Cette hormone n'agissant plus, les secrétions de FSH et LH sont alors interrompues.

Produits : cétrorélix (Cetrotide®) et ganirelix (Orgalutran®) en solution injectable SC.

Mode d'emploi : une injection quotidienne de Cetrotide® 0,25 mg ou d'Orgalutran® 0,25 mg au niveau de la paroi abdominale, dans la cuisse ou dans l'épaule (pour les femmes un peu rondes) à partir du 5e ou 6e jour de stimulation. Cetrotide® dosé à 3 mg (actif 72 à 96 heures) s'administre en une fois à partir du 5e ou 6e jour de la stimulation (avec si besoin un complément par des injections à 0,25 mg quotidiennes ultérieures).

À savoir : lors de la reconstitution de Cetrotide®, agiter doucement par un mouvement circulaire afin d'éviter la formation de bulles. La première injection de Cetrotide® doit être réalisée sous la surveillance d'un médecin (risques de réactions allergiques). Les injections s'effectuent au même moment que la FSH mais en des sites d'injections différents.

Stimuler la croissance folliculaire

Les gonadotrophines FSH et LH

Mode d'action : les hormones folliculo-stimulantes FSH et LH stimulent la croissance et la maturation des follicules ovariens.

Posologie : elle varie suivant leur utilisation. Peu de FSH pour assurer le développement d'un follicule ou deux en vue d'une insémination, plus de FSH pour obtenir plus de follicules en vue d'un recueil ovocytaire pour une FIV.

Produits : l'urofollitropine (Fostimon®), d'origine urinaire : poudre et solvant pour injection SC, seringues préremplies ou flacons multidoses ; la follitropine alfa (Gonal-F®), produite par génie génétique : poudre et solvant pour solution injectable SC en flacons multidoses ou solution injectable pour stylo ; la follitropine bêta (Puregon®), produite par génie génétique : solution injectable par voies IM ou SC et cartouches pour stylo.

Posologie : la dose initiale, comprise entre 50 et 225 UI en une injection par jour, est ajustée individuellement selon la réponse jusqu'à 300 UI (le maximum de 450 UI par jour est réservé à des situations exceptionnelles).

À savoir : pour éviter l'injection de volumes trop importants, il est possible de dissoudre jusqu'à trois flacons de poudre de Fostimon® 75 ou 150 UI ou 3 flacons de Gonal-F® 75 UI dans 1 ml de solvant. Pour éviter les injections douloureuses et pour limiter les fuites au point d'injection, Puregon® doit être administré lentement par voie intramusculaire.

Produit : la lutropine alfa (Luveris®), poudre et solvant pour solution injectable SC.

Posologie : une injection quotidienne sous-cutanée de 75 UI/jour pouvant être augmentée par paliers de 37,5 à 75 UI jusqu'à 150 UI par jours.

À savoir : on peut reconstituer Gonal-F® 75 UI avec la lutropine alfa et les administrer ensemble à condition de reconstituer Luveris® en premier.

Produits : la ménotropine ou hMG (Menopur®), poudre et solvant pour solution injectable SC ou IM (75 UI de FSH et LH) et Pergoveris®, poudre et solvant pour solution injectable SC (150 UI de FSH et 75 UI de LH).

Présentation : Menopur® s'administre à raison de 75 à 150 UI/j. Pergoveris® à raison d'une injection par jour (la posologie peut être augmentée par paliers si besoin).

À savoir : on peut reconstituer 3 flacons de poudre de Menopur® avec 1 ml de solvant. On peut mélanger Pergoveris® avec la follitropine alfa et administrer les deux produits en une seule injection.

Les antioestrogènes

Mode d'action : les antioestrogènes bloquent les récepteurs aux oestrogènes de l'hypothalamus qui répond en stimulant l'hypophyse, donc la production de FSH et de LH. Ils peuvent être associés aux gonadotrophines et sont surtout indiqués en première intention, en vue de rapports programmés ou d'une insémination artificielle.

Produits : citrate de clomifène (Clomid, Pergotime).

Posologie : 50 à 100 mg/j durant 5 jours en débutant entre le 2e et le 6e jour du cycle.

À savoir : la prescription devrait toujours être accompagnée d'une surveillance attentive de la réponse ovarienne (échographie et dosages hormonaux).

Déclencher l'ovulation

Les hormones gonado-chorionique HCG

Mode d'action : les gonadotrophines chorioniques ont le pouvoir, par leur structure analogue à la LH de mimer le pic naturel et de déclencher l'ovulation. Le recueil ovocytaire pourra se faire 34 à 36 heures après l'injection.

Produits : la gonadotrophine chorionique Endo®, d'origine urinaire, lyophilisat et solution pour injection IM et la choriogonadotropine alfa (Ovitrelle®), produite par génie génétique, solution injectable SC à 250 µg/0,5 ml en seringue préremplie.

Posologie : 3 000 à 10 000 UI par voie IM de gonadotrophine chorionique Endo® ou 250 µg en SC d'Ovitrelle® en une injection unique 24 à 48 heures après la dernière injection de gonadotrophines ou après obtention d'une croissance folliculaire adéquate.

La gonadoréline

Mode d'action : la gonadoréline est un analogue de la LH-RH naturelle sécrétée de façon pulsatile par l'hypothalamus pour stimuler l'hypophyse. Elle est administrée de façon pulsatile pour mimer cette action grâce à une pompe programmable (Zyklomat Pulse) dans certaines anovulations d'origine hypothalamique et ne concerne actuellement que 250 femmes en France. La pose est très majoritairement assurée par les centre agréés.

Produit : Lutrelef® se présente sous forme de poudre et solvant pour solution injectable SC ou IV.

Posologie : 5 µg à 20 µg par pulse de quelques secondes toutes les 90 minutes pendant 10 jours renouvelables.

À savoir : le traitement est souvent poursuivi pendant la phase lutéale. Le cathéter veineux du système Zyklomat est introduit dans des conditions stériles dans une veine de l'avant-bras, en SC ; le cathéter est introduit dans l'hypoderme entre la symphyse pubienne et l'ombilic. La préparation de la solution nécessite de dissoudre la poudre dans le solvant et d'ajouter 1 000 UI d'héparine dans la cuve de la pompe.

PRÉCAUTIONS

Attention aux consignes de conservation des produits (cf. tableau p.35). Ceux qui se conservent au réfrigérateur doivent être remis à température ambiante une demi-heure avant l'injection.

En cas d'injections sous-cutanées répétées, penser à changer les sites d'injection pour limiter le risque de douleurs et lipoatrophie.

PROTOCOLES

Les protocoles de soin sont adaptés en fonction du type d'infertilité, de l'âge de la femme, des traitements déjà reçus... Selon le type de produits utilisés pour le blocage de l'ovulation, on définit cependant des protocoles dits «standards». Dans tous les cas, le déclenchement de l'ovulation se fait par une injection unique d'HCG.

La fécondation, in vivo ou in vitro, doit alors avoir lieu environ 36 heures plus tard.

Le protocole agoniste long

Il associe :

→ un analogue de la GnRH à partir du 21e jour du cycle précédent ou du 2e jour du cycle (phase folliculaire) ;

→ les gonadotrophines, 10 à 20 jours après (une fois que la désensibilisation hypophysaire a été validée).

Les deux sont poursuivis conjointement jusqu'au déclenchement de l'ovulation.

Indication : c'est le plus utilisé en première intention si la réserve ovarienne est a priori normale.

Le protocole agoniste court

Les analogues agonistes et les gonadotrophines sont associés à J2 et poursuivies jusqu'à l'ovulation.

Indications : convient mieux en cas d'insuffisance ovarienne. Diminue le taux d'hormones reçues mais aussi le nombre de follicules potentiels.

Le protocole antagoniste

Il associe :

→ des gonadotrophines dès le début du cycle ;

→ un antagoniste de la GnRH autour du 6e jour selon la taille des follicules obtenus.

Indication : l'intérêt de ce protocole est de diminuer le risque d'hyperstimulation ovarienne.