L'Infirmière Libérale Magazine n° 255 du 01/01/2010

 

POLITIQUE DE SANTÉ

Actualité

TOXICITÉ > En Italie, les victimes de l'amiante sont pour la première fois entendues au cours d'un procès. Face à la toxicité du matériau, la responsabilité des industriels et de l'état sera-t-elle reconnue?

À Turin, depuis le 10 décembre dernier, après plus de cinq ans d'instruction et à l'issue des audiences préliminaires débutées en avril, les anciens responsables du groupe de matériaux de construction Eternit - l'ex-propriétaire suisse, le milliardaire Stephan Schmidheiny, et l'ancien haut dirigeant belge, Jean-Louis Marie Ghislain de Cartier de Marchienne - sont accusés d'avoir provoqué intentionnellement une catastrophe environnementale et enfreint les règles de la sécurité au travail lors de la transformation de l'amiante. L'État italien est également cité à comparaître pour responsabilité civile.

La mort de 2 900 personnes pèse dans la balance, ainsi que la vie de centaines de malades, anciens ouvriers ou habitants dans les environs des usines italiennes ; 700 parties civiles sont enregistrées et leur nombre pourrait s'élever à 2 000. Les inculpés risquent de trois à douze ans de prison. Les victimes devraient demander plusieurs centaines de millions d'euros de dédommagements.

Peut-être un précédent ?

En Europe, les associations de victimes soutiennent et observent attentivement le déroulement des événements qui pourrait créer un précédent. Un ancien dirigeant d'Eternit a été mis en examen en France fin novembre.

Procès historique

Rappelons que l'amiante, dont la toxicité est un fait public, comme le souligne un rapport du Sénat - « dès 1906, le lien entre exposition aux fibres d'amiante et survenue de décès professionnels est clairement établi » -, n'est classée cancérigène en France qu'en 1977 et son utilisation n'est interdite qu'en 1997 (en Europe, officiellement en 2005). 3 000 personnes meurent chaque année dans l'Hexagone de pathologies liées : cancer des poumons, mésothéliomes de la plèvres et du péritoine, asbestose et autres pathologies non tumorales.

DÉCHETS D'AMIANTE, EN VIGILANCE ACCRUE

Aujourd'hui, la législation est aux prises avec le désamiantage, très long et coûteux. Ainsi le ministre du Travail Xavier Darcos lance-t-il une campagne expérimentale de prélèvements et de mesures des fibres d'amiante par microscopie électronique à transmission analytique (META) en milieu professionnel d'une durée d'environ six mois. La réglementation sera modifiée en fonction courant 2010. En effet, un rapport, résultat de trois ans d'études et d'analyses, pousse l'Afsset à recommander d'abaisser la valeur limite d'exposition en milieu professionnel. Les fibres courtes et fines (jusqu'à 20 % des nuages d'amiante), alors écartées du comptage, sont désormais considérées comme cancérigènes. Seulement, la microscopie électronique devient indispensable. 107 000 travailleurs en France sont concernés par le désamiantage, 2 millions si l'on considère les activités de maintenance et d'entretien (Institut national de recherche et de décurité, INRS, 2007).