L'Infirmière Libérale Magazine n° 257 du 01/03/2010

 

SANTÉ PUBLIQUE

Actualité

ÉTAT DES LIEUX > L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) tire un bilan mitigé des politiques de prévention des grossesses non désirées et de la prise en charge des interruptions volontaires de grossesse (IVG) en France.

«H uit ans après l'adoption de la loi de 2001(1), le contexte français demeure paradoxal : la diffusion massive de la contraception n'a pas fait diminuer le nombre des IVG, qui se maintient aux environs de 200 000 par an, et le fonctionnement réel des dispositifs contredit trop souvent la volonté affichée de donner la priorité à une approche préventive », constate l'Igas, dans son rapport titré «Évaluation des politiques de prévention des grossesses non désirées et de prise en charge des interruptions volontaires de grossesse suite à la loi du 4 juillet 2001»(2).

Remis le 2 février dernier à Roselyne Bachelot, ministre de la Santé et des Sports, cet état des lieux met notamment en exergue le fait que 72 % des femmes qui ont eu recours à une IVG employaient une méthode contraceptive. Parmi elles, 42 % utilisaient la pilule ou un stérilet, deux moyens médicaux théoriquement réputés comme très efficaces.

Cibler la prévention

Pour l'Igas, « ces échecs reflètent une inadéquation des méthodes et pratiques contraceptives [...]. La diversification des attentes et des modes de vie, l'évolution des relations de couple, qui ne s'inscrivent pas nécessairement dans le cadre d'une conjugalité établie et stable, ne sont pas suffisamment prises en compte dans les prescriptions contraceptives auxquelles les utilisatrices(eurs) ne sont pas suffisamment associés ».

Dès lors, pour l'Igas, une partie des IVG serait évitable par « un effort accru et mieux ciblé de prévention des grossesses non désirées ». Même si, travaux de recherche à l'appui, elle admet qu'il serait illusoire « d'en attendre une maîtrise totale de la fécondité ». Ainsi, une augmentation de 50 % de la prévalence à la contraception ne diminuerait que de 32 % le nombre d'IVG.

Par ailleurs, le rapport note que les obligations légales concernant l'éducation sexuelle dans les établissements scolaires « ne sont que partiellement et inégalement appliquées ». L'évaluation de l'Inspection relève cependant une amélioration globale dans les délais d'accès à l'IVG, bien que persistent des disparités géographiques. Ces progrès demeurent néanmoins fragiles, car, comme elle le souligne, « la place de l'IVG dans le système de soins n'est pas encore normalisée ».

Forte de ses constats, l'Igas formule diverses recommandations à l'adresse des pouvoirs publics en matière de contraception et d'IVG. Petit aperçu...

→ Intégrer l'activité d'IVG à part entière dans l'offre de soins en l'inscrivant dans le plan stratégique régional de santé, dans les relations contractuelles entre les futures agences régionales de santé et les établissements de santé, et dans les projets d'établissement et de pôle.

→ Inscrire les actions de prévention, et notamment l'éducation à la sexualité, dans les orientations des «commissions de coordination des politiques publiques de santé» prévues par la loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST) au niveau régional.

→ Intégrer un volet information et prévention en matière de santé sexuelle et reproductive dans les actions et lieux qui reçoivent des jeunes ou des populations en situation de vulnérabilité.

→ Développer la place des questions relatives à la maîtrise de la fécondité dans la formation des professions médicales, notamment pour les médecins généralistes et les sages-femmes.

→ Assurer dans les faits un accès gratuit à la contraception pour les jeunes de moins de 18 ans et pour les 18-25 ans dépourvus de couverture sociale autonome, en développant des réseaux de professionnels de santé acceptant le tiers payant.

(1) Loi du 4 juillet 2001 relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.

(2) Téléchargeable sur le site .