POLITIQUE DE SANTÉ
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DISPOSITIF > Le 16 février dernier, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une loi créant une allocation journalière pour les proches accompagnant un malade en fin de vie à domicile.
Quelque 49 euros : c'est le montant journalier de l'allocation à laquelle pourront prétendre les ascendants, descendants, frères, soeurs, personne partageant le même toit* ou personne de confiance désignée par le patient, lorsqu'ils accompagneront, à son domicile, un malade « en phase avancée ou terminale d'une affection grave incurable qu'elle qu'en soit la cause ». Portée par le député Jean Leonetti début 2009, à la suite de la mission d'évaluation de la loi sur « les droits des malades et la fin de vie » qu'il avait présidée, et qui avait été adoptée à l'unanimité en première lecture par les députés le mois suivant, a été définitivement adoptée le 16 février dernier. Toujours à l'unanimité. La loi entrera en vigueur dès sa publication au Journal officiel et ses modalités d'application précisées par décret. Selon le gouvernement, cette mesure pourrait coûter vingt millions d'euros.
Cette nouvelle loi s'inscrit dans la volonté du gouvernement de réduire le coût d'une prise en charge en établissement en favorisant le maintien à domicile.
21 jours maximum
Elle répond à une demande des associations de patients et à un souhait des professionnels de santé fréquemment confrontés au désarroi des familles : les proches doivent parfois renoncer à une activité professionnelle pour assister l'un des leurs.
Concrètement, la loi propose durant 21 jours maximum, consécutifs ou non, d'aider financièrement l'aidant en contrepartie de son investissement auprès du malade : cette aide pourra être répartie entre plusieurs membres de l'entourage et maintenue si le malade est hospitalisé. Pour leur part, les députés s'étaient prononcés pour une période de trois semaines non fractionnable. Cette prestation sera versée par le régime d'assurance maladie du proche après accord de celui du malade. Au préalable, s'il est salarié, l'accompagnant devra avoir pris un congé de solidarité familiale, à temps complet ou partiel. Les fonctionnaires, les chômeurs et les indépendants pourront également prétendre à bénéficier de cette allocation.
En revanche, à la demande du gouvernement, elle ne pourra se cumuler avec aucune autre prestation sociale : congé maladie, congé accident de travail, congé parental, indemnité de chômage... Mais les sénateurs ont souhaité pour l'accompagnant le maintien de sa couverture assurance maladie et de maternité durant le congé.
« Ce dispositif est un progrès, retient Olivier Fernandez, chargé de mission santé du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), mais nous avons des réserves sur le fond. »
Le Ciss regrette notamment que l'allocation n'ait pas d'emblée été étendue aux proches hospitalisées, sachant que près de sept personnes sur dix décèdent actuellement en établissement.
Plusieurs réserves
Un point de vue partagé par Anne Richard, praticien hospitalier, présidente de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap). « À l'hôpital comme à domicile, dit-elle, les proches sont extrêmement sollicités. [...] Ils s'épuisent et leur médecin est souvent obligé de leur prescrire un arrêt maladie. Ce coût financier, et social, n'est pas pris en compte par la loi. Dommage... » La période de 21 jours est aussi critiquée. « Pourquoi, interroge Olivier Fernandez, ne pas l'avoir alignée sur le congé de solidarité familiale d'une durée de trois mois et qui n'est pas rémunéré ? » Par ailleurs, souligne Anne Richard, « il est très difficile de prévoir la durée d'une fin de vie. C'est une réalité, avec ou sans allocation ». Dans ces conditions, en effet, il sera bien difficile pour le proche d'estimer s'il est temps de demander cette prestation, le risque étant qu'il soit trop tôt ou trop tard. D'ailleurs, le Ciss propose que l'Observatoire des pratiques médicales de la fin de vie, qui devrait être installé au cours de ce trimestre, se saisisse rapidement de cette question.
* Époux, concubin, pacsé.
Godefroy Hirsch, vice-président de la Sfap et médecin en équipe mobile de soins palliatifs à domicile et en Ehpad
« La Sfap a défendu la création d'une allocation pour les accompagnants lors de son audition par la mission d'évaluation conduite par Jean Leonetti en 2008. La caractéristique du maintien à domicile est de s'appuyer sur les proches. Sans leur investissement quotidien, ce maintien serait très difficile, voire impossible dans la très grande majorité des cas. Avec les professionnels de santé qui interviennent à domicile, et notamment les infirmières libérales, nous le constatons chaque jour. De fait, en valorisant leur engagement, cette allocation affirme la solidarité nationale. Même s'il faut saluer ce premier pas, cette mesure n'est pour autant pas pleinement satisfaisante : l'indemnisation de 49 euros est modeste et, plus grave, en écartant les patients hospitalisés, ce dispositif se fonde sur une inégalité d'accès. D'emblée, cela doit nous alerter et, à court terme, appeler à l'évaluation du dispositif. Reste à savoir si les proches des malades bénéficiant d'une hospitalisation à domicile pourront obtenir cette allocation. »
Depuis 2006, et sur présentation d'un certificat médical établi par le médecin traitant de la personne à assister, ce congé permet à tout salarié (ascendant, descendant, personne partageant le domicile) de s'absenter pour assister un proche souffrant d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital. D'une durée de trois mois maximum, renouvelable une fois, il n'est pas rémunéré, sauf disposition conventionnelle au sein de l'entreprise. Il peut se cumuler avec un congé sans solde ou sabbatique et un congé pour événement familial prévu en cas de décès. Pour en bénéficier, le salarié doit, quinze jours avant son départ, adresser une lettre recommandée à son employeur qui ne peut ni refuser ni reporter la demande ; ce congé peut être transformé en période à temps partiel. En cas d'urgence absolue, constatée par écrit par le médecin qui a établi le certificat médical, le congé peut débuter dès réception de la lettre par l'employeur. À l'issue du congé, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d'un salaire au moins équivalent.
Source : ministère du Travail.
→ 540 000 personnes décèdent, en moyenne, chaque année en France (selon l'Inserm, 66 % meurent en institution, 28 % au domicile et 6 % sur la voie publique).
→ 3 personnes sur 4 meurent à l'hôpital, sans un proche à leurs côtés. Alors que la grande majorité des Français souhaite décéder à domicile.