L'Infirmière Libérale Magazine n° 257 du 01/03/2010

 

MIDI-PYRÉNÉES

Initiatives

Les candidats aux élections régionales vont bientôt achever leur campagne. Nathalie Nowak, depuis peu infirmière libérale à Bagnères-de-Bigorre, a décidé de se présenter en tête de liste au suffrage des électeurs de Hautes-Pyrénées, sous l'étiquette du rassemblement Europe Écologie.

En guise d'accueil, son patient s'exclame : « On vous a vue l'autre jour dans le journal ! » Et pour cause : depuis la mi-janvier, Nathalie Nowak, infirmière libérale dans les Hautes-Pyrénées, est entrée en campagne pour les élections régionales en Midi-Pyrénées. Elle est tête de liste pour son département, sous l'étiquette du rassemblement Europe Écologie. « En 1968, j'avais neuf ans et mes parents étaient très impliqués politiquement. J'ai baigné dans cette ambiance. » De tentatives en apprentissages, elle fait ses armes en politique. « En classe de seconde, je me suis inscrite aux jeunesses communistes. Mais cela a été très vite le choc : la découverte des camps, du romancier et dissident russe Alexandre Soljénitsyne... J'ai quitté le parti, mais mon engagement est resté. Je me suis tournée vers le syndicalisme. »

D'ailleurs, cette option l'accompagne tout au long de sa vie. Jeune infirmière, elle choisit la CFDT-santé ; lorsqu'elle devient libérale, l'Onsil (Organisation nationale des syndicats d'infirmiers libéraux) a ses faveurs. « Lorsque j'ai changé de région, de la Normandie pour les Hautes-Pyrénées, c'est tout d'abord à travers le syndicat que j'ai rencontré les premières personnes. Pour moi, c'est une façon de vivre la citoyenneté et la solidarité », estime-t-elle. La maturité a aussi fait son chemin. « Adolescente, j'étais marxiste et avoir un copain de droite, ce n'était pas concevable ! Aujourd'hui, j'ai une approche beaucoup plus nuancée de la réalité sociale et humaine. Je me suis peu à peu orientée vers l'écologie politique qui place au centre de ses préoccupations l'homme dans son environnement et non pas un système ni le culte de la personnalité. » Le Parti socialiste avec le mouvement Utopia sera la première étape, Europe Écologie une échappée de la logique de parti.

La relation autrement

S'intéresser aux autres est son quotidien, avec son métier d'infirmière. « Je voulais travailler dans le social. La relation au patient m'a attirée, plutôt que le côté technique, même s'il est important. » Diplômée depuis à peine deux ans, elle reprend la voie de la formation et devient infirmière puéricultrice. « J'ai souhaité très tôt mon indépendance, avec l'envie de rester longtemps étudiante, ironise-t-elle en revenant sur son parcours. J'aime l'effort intellectuel : apprendre me nourrit. » Pour preuve : parallèlement, elle suit une maîtrise en sciences de l'éducation... et décide de se reconvertir. Elle passe le concours de professeur des écoles, et, en 1992, la voilà enseignante ! De villages en quartiers chauds, elle rencontre son premier auditoire pour douze années d'implication.

« Autrement » paraît être son leitmotiv dans tout ce qu'elle entreprend. Car, au sein de l'Éducation nationale, elle pratique la pédagogie Freinet, basée sur l'expression libre des enfants et un apprentissage issu de l'expérience. « Pour moi, cette approche correspond à un esprit d'ouverture, cohérent avec ma façon d'aborder la politique. Mais cela exige beaucoup de travail car l'enseignement n'est jamais deux fois le même. Avec quatre enfants - dont le troisième, Martin, est né handicapé -, c'est devenu trop difficile. » Après douze ans de bons et loyaux services, Nathalie laisse les cours d'école derrière elle et reprend sa profession d'origine via des remplacements en institution. « Étonnamment, je m'y suis remise très facilement. » Elle est alors loin de se douter de la tournure que va prendre son quotidien.

Concilier grands principes et quotidien

D'un tempérament plutôt discret et peu encline aux rythmes effrénés, Nathalie n'a pas cherché à occuper la scène politique. « J'aime travailler en coulisses, mais il n'y avait pas d'autre femme prête à s'impliquer comme tête de liste aux Régionales, afin de respecter la parité. » Au vu de son parcours, elle ne manque cependant pas de ressources. En l'occurrence, si Nathalie peut relever le défi, c'est grâce à son installation en libéral il y a moins d'un an. « En 2007, j'ai eu de gros problèmes d'hypertension suite à une collaboration désastreuse avec la directrice de la maison de retraite où j'étais infirmière coordonnatrice. Il était peut-être temps de passer à autre chose. La souffrance, la maladie, la mort... J'avais besoin de plus de légèreté. » Elle souhaite davantage de cohérence entre ses idées et son quotidien. Bref, elle réalise un bilan de compétences qui confirme son attirance pour le relationnel. Puis l'opportunité de gérer une biocoop lui passe sous le nez. L'idée d'un café alternatif s'envole. Alors pourquoi pas le libéral ? « J'avais une opinion partagée car je suis une défenseuse du service public et j'aime l'échange du travail en équipe. Je cherchais... Deux collègues en cabinet m'ont proposé un mois de remplacement : je me suis très bien entendue avec elles et, dans la foulée, nous nous sommes associées. Finalement, j'apprécie les différents aspects du métier : la liberté d'action, l'importance des connaissances techniques, l'assurance du geste, savoir se débrouiller avec les moyens du bord et la relation privilégiée avec les malades. Désormais, je travaille sur une base de deux jours par semaine, ce qui me permet de dégager du temps pour ma famille, le sport et mes activités politiques. Travailler moins est d'ailleurs un choix politique qui me permet de garder le recul dont j'ai besoin. »

La campagne, tous les jours

Son implication dans la vie du territoire, elle la construit en toute simplicité. « L'an passé, je me suis investie pour les élections européennes avec Europe Écologie et, l'année précédente, pour les élections municipales sur une liste divers gauche, Bagnères Solidaire, menée par mon mari Michel Bouteiller. »

Pour autant, sa démarche ne cède en rien à son éthique. « Je fais attention à ne pas mélanger les genres. Avec mes collègues, nous n'abordons pas spécialement le sujet. Il est clair que nous ne sommes pas toutes du même bord, mais nous respectons les opinions de chacune. En revanche, lorsque j'ai eu à me rendre sur Toulouse pour la présentation officielle de la liste des 107 candidats, l'une d'elle n'a pas hésité à me remplacer. » Quant aux patients, elle reste pour eux dans son rôle d'infirmière : « Dans l'intimité des gens, je me dois d'être discrète et présente en tant que professionnelle. Mais s'ils posent des questions, je dis ce que je pense. »

Si la campagne ne franchit pas le seuil des patients, Nathalie a clairement pris position sur la question de la grippe A/ H1N1 et a refusé de vacciner. Car pour notre infirmière qui jongle entre tournées, réunions publiques, meetings ou journées à tracter, la politique ne se résume pas à quatre mois intenses et au scrutin tout proche : « Pour se soigner, il y a souvent une autre façon de faire, notamment avec l'homéopathie. Mais pour la vie de tous les jours, il existe aussi une autre approche : l'éco-construction, la relation aux autres, une consommation raisonnée, une alimentation saine... Le message politique, c'est aussi la petite musique du quotidien ; ce que l'on dit à son voisin, aux gens que l'on rencontre... Un travail de fourmi, loin des feux de la rampe. »

Les régionales en pratique

Tous les six ans, la population de la région Midi-Pyrénées élit 91 conseillers régionaux par suffrage universel direct. Il s'agit d'un scrutin proportionnel à deux tours. Les prochaines élections ont lieu ces 14 et 21 mars. La Région est la collectivité locale la plus récente et un récent projet de loi prévoit de la modifier. Les conseillers régionaux et généraux seraient remplacés par des conseillers territoriaux.

EN SAVOIR +

→ Le site officiel de l'équipe Europe Écologie en région Midi-Pyrénées : .

→ Le site de l'Institut coopératif de l'école moderne regroupant les activités et recherches des acteurs de la pédagogie Freinet : .