L'Infirmière Libérale Magazine n° 258 du 01/04/2010

 

PROFESSION

Actualité

RÉACTION > La Fédération nationale des infirmiers (FNI) a adressé le 8 mars une lettre ouverte au président de la République pour lui rappeler que les 68 000 libéraux souhaitent relever le «défi présidentiel» visant à refonder le système de santé. À condition toutefois d'y être associés...

Devant l'avalanche de déclarations présidentielles engageant l'avenir de la médecine de ville, la Fédération a réuni la presse le 11 mars. Dans sa ligne de mire : l'arrêté sur les coopérations du 31 décembre (cf. Actualités ILM n°247), le discours des voeux présidentiels à Perpignan(1), suivi de celui de Laon(2) le 2 mars. Au cours de de ce dernier discours, Nicolas Sarkozy a annoncé en guise de feuille de route que « la médecine libérale doit prendre sa part des gardes et doit être disponible pour recevoir à n'importe quelle heure des patients [...] pour que l'hôpital ne soit plus seul pour accueillir tout le monde » et a déclaré miser sur « la responsabilisation des médecins libéraux », réexaminée dans le cadre de la mission Legmann.

Pour Philippe Tisserand, « les infirmiers libéraux n'ont pas attendu pour assurer la continuité des soins, c'est même une obligation légale ».

Lettre ouverte

Le 8 mars, la FNI a donc adressé une lettre ouverte(3) au Président de la République. « Nous avons accueilli avec satisfaction la volonté du chef d'État, annoncée au cours de ses voeux, de refonder la médecine de ville. Le triptyque médecin généraliste/pharmacien d'officine/ infirmière libérale est essentiel. Mais là où les égos ont pêché, c'est que tout le monde veut coordonner... » La FNI déplore notamment que la mission pilotée par le président du Conseil national de l'Ordre des médecins, Michel Legmann, soit menée « d'une part par une équipe d'experts exclusivement composée de médecins, et d'autre part connaissant peu ou pas le domaine libéral ».

La Fédération, qui a demandé audience auprès du chef de l'État, propose de tenir des assises « pour une organisation rénovée du système de santé de ville » auxquelles elle suggère d'associer ses partenaires médecins de ville et pharmaciens d'officine.

La FNI s'est dit profondément inquiète du démantèlement du décret de compétences infirmières, tel qu'il s'esquisse dans l'arrêté du 31 décembre 2009. Ce texte ouvre en effet la possibilité au premier prescripteur de transférer des tâches à du personnel peu ou pas qualifié, sur simple attestation d'expérience et non de qualification.

Recours en contentieux

« C'est la mort des diplômes », assène Philippe Tisserand. « Ce qui pourra se faire en HAD pourra ensuite être étendu à d'autres structures telles que les Ssiad, les centres de dialyse, voire les maisons médicales... », alerte Daniel Guillerm, vice-président de la Fédération. Concernant cet arrêté, les représentants de la FNI ont donc fait savoir qu'ils avaient déposé un recours contentieux au Conseil d'État, avant la date limite du 15 mars. Leur jugement est sans appel : « Sous couvert d'améliorer la coopération, il ne faut pas faire n'importe quoi. La loi HPST ne doit pas devenir une loi déprofessionnalisante. »

Privilégier les protocoles

En matière de pistes concrètes, la FNI s'est contentée de rappeler les pratiques qui fonctionnent déjà, comme l'ajustement de doses des AVK, le contrôle des diabétiques insulino-dépendants, etc. « Plutôt que de se concentrer sur modèle anglo-saxon des Primary Care Trust(4), de construire des murs et désorganiser le système ambulatoire, faisons preuve d'efficacité ! Rien ne s'oppose dès aujourd'hui, dans les textes existants, au partage de compétences sur un mode protocolisé, entre médecins et infirmiers. »

(1) Discours du 13 janvier relatif à la mise en place de la mission Legmann sur l'évolution de la cartographie et l'organisation relative des acteurs (cf. ILM n°246). (2) Table ronde dédiée à l'avenir de la fonction publique.

(3) Téléchargeable sur .

(4) Centres de santé communautaires.

EN CHIFFRES

D'après la FNI, les infirmières libérales, au nombre de 68 000, réalisent 93 % des soins rémunérés à l'acte en ambulatoire, les CSI (Centres de soins infirmiers) ne représentant qu'une part marginale de l'offre de soins. Cette activité englobe les soins aux personnes âgées dépendantes, qu'il s'agisse des prises en charge traditionnelles représentant 75 % des cas ou dans le cadre de leur collaboration avec les Ssiad qui ont en charge le quart de ces personnes dépendantes.