La listériose est une infection alimentaire qui, bien que rare, demeure préoccupante du fait de sa gravité. Des mesures de précautions méritent donc d’être formulées aux femmes enceintes, aux personnes immunodéprimées et aux personnes âgées.
Le genre Listeria comporte cinq espèces, parmi lesquelles seule l’espèce L.monocytogenes (communément appelée Listeria) peut conduire à des infections alimentaires. C’est une bactérie aérobie à Gram positif très répandue dans l’environnement (sols, végétaux, eau, tube digestif de porteurs animaux ou humains asymptomatiques, torchons, réfrigérateur, etc.). Elle peut contaminer de nombreux produits alimentaires crus comme le lait et les produits laitiers, la viande, le poisson et les légumes. Elle peut aussi contaminer des aliments lors d’étapes de préparation ou de conservation situées après la cuisson. Les propriétés physico-chimiques de Listeria en font un pathogène alimentaire redouté. Notamment sa tolérance, à des degrés variables, à l’acidité et aux concentrations en sel, et sa croissance, peu exigeante, maximale entre 30 et 37 °C, mais possible jusqu’à des températures légèrement inférieures à 0 °C. Enfin, elle est détruite par la cuisson.
Le mode de contamination essentiel est l’ingestion d’aliments contaminés. Chez la femme enceinte, l’infection est transmise au fœtus et à l’enfant in utero par passage transplacentaire, ou bien au cours du passage de la filière génitale pendant l’accouchement. Si de nombreuses personnes peuvent être porteuses de Listeria, peu d’entre elles développent la maladie. Listeria peut être responsable de gastro-entérites aiguës chez le sujet immunocompétent après ingestion d’une quantité importante de bactéries, souvent dans un contexte de toxi-infection alimentaire collective. La gravité de la listériose tient à ses formes invasives (formes maternofœtales, septicémiques et neurologiques). Le plus souvent, elles surviennent sous forme sporadique chez les femmes enceintes et leurs nouveau-nés, les sujets âgés, les personnes immunodéprimés ou les malades présentant une comorbidité (cirrhose, dialysés, diabète, éthylisme).
Les personnes immunodéprimées considérées à risque sont celles qui reçoivent une chimiothérapie hématotoxique, des corticoïdes, des immunosuppresseurs, des anti-TNF (tumour necrosis factor) dans le cadre de maladies inflammatoires, hémopathies, néoplasies ou greffes d’organes, et les patients atteints du sida et non traités.
Chez les femmes enceintes, l’infection peut prendre la forme d’un syndrome grippal, de troubles digestifs, d’une fièvre isolée ou se révéler asymptomatique. Les conséquences de l’infection sont extrêmement sévères en l’absence d’un diagnostic et d’un traitement précoces : fausse-couche spontanée, mort fœtale in utero, accouchement prématuré, infection néonatale sévère. Chez un malade immunodéprimé, la listériose peut souvent prendre la forme d’une septicémie, se manifestant par une fièvre isolée. L’infection du système nerveux central se traduit par une méningite ou une méningo-encéphalite, ou encore une atteinte encéphalitique, voire un abcès isolé. Le traitement reposant sur l’association d’amoxicilline et de gentamycine est efficace sur Listeria, mais le taux de mortalité peut atteindre 30 % malgré un traitement bien conduit.
La listériose est cosmopolite et fait l’objet d’une surveillance soutenue au niveau européen, aux États-Unis et au Canada. En France, la déclaration est obligatoire depuis 1998. Parallèlement aux mesures prises par la filière agro-alimentaire, l’incidence de l’infection avait fortement diminué depuis 1987 en France pour se stabiliser de 2002 à 2005 autour de 0,35cas pour 100 000 habitants.
Une augmentation du nombre de cas a été constatée depuis 2006 en France (0,46/100 000 habitants en France en 2006, 0,50/100 000 en 2007 et 0,43/100 000 en 2008), comme dans d’autres pays d’Europe. Elle ne semble pas attribuable à une circulation accrue de produits contaminés et concerne deux populations : les sujets immunodéprimés et les sujets âgés de plus de 65 ans. Différentes hypothèses sont avancées et en cours d’investigation, comme par exemple le rôle des traitements anti-acides ou inhibiteurs de la pompe à protons ou encore les pratiques alimentaires des personnes âgées.
La prévention repose sur des règles d’hygiène et l’éviction de certains aliments considérés comme “à risque” en cas de terrain particulier (femmes enceintes, personnes immunodéprimées, voire âge élevé). « Pour les personnes âgées, ce qui me semble important avant tout, c’est de bien respecter les règles d’hygiène, la consommation rapide des produits “sensibles” et donc de privilégier l’achat d’aliments conditionnés en petites quantités », indique le docteur Véronique Goulet, de l’Institut de veille sanitaire (InVS).
→ Si possible, transporter les produits réfrigérés dans des contenants isothermes.
→ Nettoyer périodiquement son réfrigérateur, laver une étagère dès qu’elle est souillée et s’assurer que sa température est suffisamment basse (4 °C).
→ Protéger les produits nus dans un film alimentaire ou les placer dans une boîte.
→ Respecter les dates limites de consommation ainsi que les indications relatives à la préparation.
→ Veiller à une consommation rapide des produits entamés.
→ Ne pas dépasser deux heures d’attente avant réfrigération des aliments qui viennent d’être cuits.
→ Un produit, fabriqué chez un artisan, à domicile ou encore vendu au détail, ne doit pas être conservé plus de trois jours.
→ Décongeler les aliments dans le réfrigérateur ou au four à micro-ondes, mais jamais à la température de la pièce.
→ Laver les mains, les ustensiles de cuisine et plans de travail après la manipulation d’aliments crus.
→ Bien laver à l’eau les légumes, fruits et herbes aromatiques (suffisant pour une décontamination de surface).
→ Préférer les fromages pasteurisés et enlever la croûte des fromages.
→ Éviter la consommation de lait cru et de fromages préparés à base de lait cru.
→ Éviter les fromages à pâte molle à croûte fleurie (type camembert, brie) ou lavée (type munster, Pont-L’Évêque), les fromages râpés industriels non cuits.
→ Éviter la consommation de rillettes, de pâté, de foie gras et de produits de charcuterie avec de la gelée.
→ Éviter la consommation des produits de la mer : poisson fumé, coquillages crus, surimi, tarama, sushi, poisson mariné.
→ Préférer les produits préemballés aux produits achetés à la coupe.
→ Bien cuire les aliments crus d’origine animale (viande, poissons, charcuterie telle que lardons et saucisse type “Francfort”).
→ Réchauffer soigneusement les plats cuisinés ou les restes alimentaires avant consommation (30 minutes à 60 °C ou bien jusqu’à ébullition).
REMERCIEMENTS AU DR VÉRONIQUE GOULET (INVS) POUR SA RELECTURE