POLITIQUE DE SANTÉ
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À SUIVRE > Fin juillet à Vienne, la ministre de la Santé s’est prononcée en faveur des salles de consommation de drogues à moindre risque. Trois semaines plus tard, le chef du gouvernement François Fillon la contredit. Mais dès le 24 septembre, de nouvelles déclarations sont à prévoir…
Durant l’été, les déclarations ont fusé de tous les côtés. Et rien ne semble encore décidé… Première à ouvrir les débats à l’occasion de la 18e Conférence internationale sur le sida, la ministre de la Santé Roselyne Bachelot s’est dite favorable à l’expérimentation de ces “centres de consommation supervisés”. Elle entend ainsi « engager une concertation avec tous les partenaires concernés et notamment les collectivités locales », à commencer par Paris et Marseille. Dans les heures qui suivent, le maire de la cité phocéenne salue cette position, tout en rappelant que « Marseille tient et tiendra toujours sa place pour conduire dans le cadre de la réduction des risques en termes de sida et de toxicomanies, une politique audacieuse face à un fléau planétaire ».
Mais le 11 août, François Fillon désavoue sa ministre. Du même avis qu’un groupe de députés issus du collectif Droite populaire, il estime ces salles « ni utiles, ni souhaitables ». Les réactions ne tardent pas. À Marseille, Jean-Claude Gaudin recule. Son adjoint Patrick Padovani annonce que la municipalité UMP « ne va pas jouer au bras de fer avec M. Fillon. Si M. Fillon décide qu’aujourd’hui, dans son esprit, il ne voit pas l’utilité de ce dispositif, c’est lui qui est décideur ».
À son tour, le Collectif du 19mai passe à l’attaque
Les discussions risquent à nouveau de s’enflammer, notamment en Île-de-France où le Comité de coordination régionale de la lutte contre le VIH (CoreVIH) affiche des « inquiétudes sur la continuité et la qualité de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH ». Idem dans le Sud, comme en témoigne la mobilisation du “collectif du refus” rassemblant neuf associations, dont le réseau marseillais Mistral (cf. interview). Dénonçant une baisse des moyens accordés par l’Agence régionale de santé, ce dernier redoute l’abandon du soutien public, qui l’amènerait à cesser son activité dès juin 2011. Le réseau ne dispose plus, depuis cet été, de financement public pour dispenser des séances d’éducation thérapeutique à ses patients (ETP). Le rapport du Pr Yeni sur la prise en charge médicale du patient atteint du VIH, cité par la ministre à Vienne, indique pourtant « l’intérêt essentiel » de l’ETP en termes de santé publique…
Au-delà des effets d’annonce, d’aucuns s’interrogent désormais sur les moyens que l’État français compte allouer à la lutte contre le sida, en amont et en aval… D’autant que la ministre de la Santé préconise l’ouverture « dès 2011, d’au moins dix centres de dépistage réalisés par des non-professionnels de santé […] bénéficiant de financements pérennes. Cela sera l’une des mesures phares du prochain plan VIH ». Pour sûr, l’accent semble mis sur la prévention. Reste à savoir ce qu’il adviendra des patients déjà atteints…
(1) Le collectif regroupe Asud, Anitea, Act Up-Paris, Gaïa Paris, Safe, Sos Hépatites Paris et salledeconsommation.fr.
(2) L’expertise de l’Inserm, rendue en juillet à la ministre, est consultable sur www.inserm.fr.
Jusqu’à quelle période le financement de votre réseau est-il assuré ? Notre convention n’a été renouvelée que jusqu’en 2011, et ce, de façon partielle. Avec la création de l’Agence régionale de santé (ARS) et le système d’appels d’offres, on nous explique que l’objectif est de former des réseaux d’envergure régionale. Pourquoi pas ? Mais que se passe-t-il entre-temps ? Pourquoi ne pas permettre aux réseaux existant d’assurer une transition ? Que deviennent les patients ?
Quelles conséquences cela augure-t-il ? Nous devrons fermer en juin prochain. Nous n’aurons pas le temps de répondre à l’appel d’offres, vu que l’on ne sait toujours pas quand il sera lancé ! Nous essayons tout de même de trouver d’autres financements auprès de collectivités locales et de fonds privés.
Quoi d’autre ? Depuis juin, l’ARS a cessé de financer l’éducation thérapeutique que nous dispensions aux patients (ETP), préférant nous aider pour les fibrotests par exemple… Or, si nous avions eu le choix, nous aurions abandonné les fibrotests plutôt que l’ETP qui nous paraît primordiale ! Il y a vraiment un manque de dialogue.
* Ce réseau, basé sur Marseille, assure une coordination de professionnels de la santé qui a pour but d’améliorer la prise en charge globale des personnes infectées par le VIH et/ou le VHC, à leur domicile comme à l’hôpital.
→ 7 000 et 8 000 nouveaux cas d’infection par le VIH chaque année en France.
→ 40 000 à 50 000 personnes infectées par le VIH sans le savoir.
→ 24 septembre : remise de la synthèse du séminaire de l’association Élus, santé publique et territoires (ESPT) sur les salles de consommation contrôlée à moindres risques pour usagers de drogues.
Alors que le tissu associatif et les professionnels de santé s’agitent, Roselyne Bachelot tente d’apaiser les consciences. à Vienne, elle a annoncé des « financements pérennes » en vue de créer des « centres de dépistage réalisés par des non-professionnels de santé ». Sur le terrain aussi, les Agences régionales de santé (ARS) tâchent d’expliquer leur méthode de travail. Désormais, « les porteurs de projets seront liés par des contrats », détaille Martine Riffard-Voilque, à la tête de la direction Patients, offre de soins et autonomie à l’ARS Paca. Délicat à imaginer pour le moment, étant donné que les cahiers des charges de ces futurs appels à projets sont encore en cours de conception. « Nous en saurons plus à partir de 2011 », poursuit la directrice. Pour l’heure, les seules certitudes concernent les priorités édictées par l’ARS en termes de réseaux de santé. Quatre axes sont ainsi fixés : la cancérologie, la périnatalogie, les soins palliatifs et les personnes âgées. « Cela ne signifie pas que les autres thèmes sont moins importants, ajoute Martine Riffard-Voilque. Mais ils ne nécessitent pas un travail en réseau. »