Le débat
Éviter la maison de retraite à ceux qui le souhaitent, voilà le pari lancé par la mission “Vivre chez soi”. Parmi les 18 propositions présentées dans un rapport déposé en juin, l’une d’elles préconise un meilleur accès des anciens aux nouvelles technologies. De quoi faciliter le maintien à domicile ?
secrétaire d’État chargée des Aînés
Le projet “Vivre chez soi” que j’ai lancé cette année répond à une évolution sociétale majeure de notre temps. Il vise à sécuriser la vie à domicile en réduisant les risques grâce à un habitat adapté, à des installations et équipements domestiques conformes et ergonomiques, aux technologies et services de l’autonomie (communication, téléassistance, télésanté, domotique). Enfin, vivre chez soi n’est pas le confinement à domicile : il inclut aussi la mobilité, l’accessibilité des lieux, l’existence de services de proximité, la sécurité. Bref, un environnement urbain et social de qualité.
Rien ne remplacera jamais l’aide humaine. Les technologies de l’information et de la communication peuvent, elles, améliorer la vie à domicile. Elles augmentent les capacités des personnes âgées en réduisant l’impact des déficits physiques, sensoriels et psychiques sur leur vie quotidienne. Elles renforcent la sécurité et apportent un réel confort, notamment pour celles qui sont en risque d’isolement, de pathologies chroniques, ou encore de mobilité réduite… Le travail des professionnels de santé, du médicosocial et d’autres services à la personne s’en trouve facilité. En réduisant le temps consacré à certaines tâches répétitives et en permettant un partage de l’information, ces technologies améliorent la coordination de leurs interventions. Les aidants familiaux y trouvent aussi des solutions aux difficultés diverses qu’ils rencontrent. Leurs relations avec les aînés gagnent en qualité.
Non, je ne crois pas. On disait la même chose du téléphone dans les années 1970 ! Or il n’a jamais été un obstacle au maintien des liens, bien au contraire. Pour peu qu’on garde cela à l’esprit, les technologies peuvent faciliter la communication et multiplier les opportunités d’échanges et de rencontres avec les proches, les amis, les voisins… La Journée nationale des aidants que je lance le 6octobre prochain sera l’occasion de valoriser ces expériences et de les diffuser au plus grand nombre.
co-auteure du livre Bien vieillir grâce au numérique
En raison des progrès de la médecine, de l’alimentation, de l’accès à la connaissance, aux soins, etc., nous vivons de fait plus longtemps en bonne santé, et donc à notre propre domicile. Même si cela nécessite quelques aménagements (escalier, salle de bain, rapprochement vers les centres villes…). Mais ce qui contribue véritablement au bien vieillir chez soi, c’est un réseau relationnel riche et maintenu.
Elles sont déjà très présentes dans le quotidien des personnes âgées : électroménager, domotique, technologies de l’information et de la communication. Depuis une dizaine d’années, les gérontechnologies, la télé-assistance et la télé-médecine se sont développées pour soutenir et accompagner le vieillisement à domicile. Mais le niveau d’appropriation de ces services n’est pas encore à la hauteur des espérances, pour de multiples raisons. Une des principales difficultés concerne les représentations très négatives de la vieillesse que ces services sous-tendent parfois malgré eux. En revanche tout ce qui participe à augmenter les capacités physiques, physiologiques, à repousser les limites de l’âge (implants, prothèses, chirurgie esthétique…) est plus facilement accepté. Des questions éthiques peuvent toutefois se poser… Le développement de l’Internet, des réseaux sociaux, de la téléphonie mobile participent quant à eux à créer de nouvelles formes de liens entre les personnes, qui ne se substituent pas aux modes habituels de relations sociales, mais viennent les compléter. Diverses initiatives très intéressantes voient le jour comme les sites www.voisin-age.fr, www.webnapperon.com et www.aidonsensemble.fr.
Quand les services technologiques stigmatisent les personnes, de fait ils aboutissent à un isolement. Que ce soit en considérant le vieillissement de façon négative ou, au contraire, en infantilisant les personnes âgées sous prétexte de leur rendre ces technologies accessibles. De ce point de vue, il y a un vrai risque. La vieillesse n’est pas une maladie !
*Bien vieillir grâce au numérique de Carole-Anne Rivière et Amandine Brugière, éd. FYP, coll. “La Fabrique des possibles”, juin 2010.