Grossesse et maladie de Basedow - L'Infirmière Libérale Magazine n° 265 du 01/12/2010 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 265 du 01/12/2010

 

Cahier de formation

Savoir faire

Chez une patiente traitée pour une maladie de Basedow, il est peu recommandé de débuter une grossesse qui pourrait s’avérer délicate. Toutefois, les médicaments ou la chirurgie permettent aujourd’hui de gérer cette situation.

Mme M. est suivie pour une maladie de Basedow. Elle envisage d’avoir un enfant et son médecin lui remplace son antithyroïdien de synthèse, le Neomercazole, par du Proracyl. Elle ne comprend pas cette modification du traitement, d’autant qu’une amie a conservé le Neomercazole pendant sa grossesse.

Si les différents antithyroïdiens de synthèse ont des mécanismes d’action similaires, de rares cas de malformations ont été rapportés seulement lors d’un traitement par Néomercazole. Ces effets tératogènes rares se manifestant en début de grossesse, si celle-ci est diagnostiquée avant la 7e semaine d’aménorrhée, un changement de traitement est préconisé. Mais la prise d’antithyroïdiens ne justifie nullement un avortement thérapeutique.

HYPERTHYROÏDIE ET GROSSESSE

L’hyperthyroïdie concerne 1 à 3 % des grossesses : elle est soit préexistante, soit révélée pendant la grossesse. La maladie de Basedow en est la principale cause et toucherait 2 % des femmes enceintes. D’autres causes spécifiques de la grossesse (hyperthyroïdie gestationnelle transitoire, hyperemesis gravidarum) sont dues à l’effet thyréostimulant de l’HCG (hormone chronique gonadotrophique) produite pendant la grossesse. En principe, la grossesse n’est pas recommandée chez une patiente médicalement traitée pour une maladie de Basedow.

MALADIE DE BASEDOW ET GROSSESSE

Diagnostic en cours de grossesse

Signes cliniques

Certains symptômes de la grossesse sont superposables aux signes d’une hyperthyroïdie. Toutefois, une tachycardie persistante, supérieure à 100 battements par minute, une prise de poids limitée, un amaigrissement, ou une asthénie peuvent évoquer une hyperthyroïdie.

Signes biologiques

En présence de signes cliniques, le dosage de la TSH est complété par un dosage de la T4L si la TSH est anormale. En effet, une baisse isolée de TSH n’est pas exceptionnelle chez la femme enceinte à la fin du premier trimestre. Cette diminution est habituellement transitoire. Une TSH isolément abaissée (TSH basse, T4L normale) en début de grossesse justifie un contrôle quelques semaines plus tard afin de vérifier le caractère transitoire de cette anomalie.

Risque d’hyperthyroïdie fœtale

Les anticorps antirécepteurs de l’hormone thyréostimulante (ARTSH)

Les ARTSH se lient aux récepteurs de la TSH avec une action stimulante. Ils sont un marqueur de la maladie de Basedow. Les ARTSH passent la barrière placentaire et peuvent provoquer des dysfonctions thyroïdiennes chez le fœtus et le nouveau-né.

Dosage des ARTSH

Le risque d’hyperthyroïdie fœtale ou néonatale apparaît pour un taux d’ARTSH chez la mère trois à cinq fois supérieur à la norme (valeurs normales < 15 UI/L). On recommande un dosage des ARTSH au moins à la 28e semaine chez les patientes ayant ou ayant eu une maladie de Basedow.

Évolution en cours de grossesse

Une aggravation des symptômes d’hyperthyroïdie est observée dans la première moitié de la grossesse, avec une amélioration à partir du deuxième trimestre. Dans un tiers des cas, l’arrêt du traitement antithyroïdien peut être envisagé au troisième trimestre.

Après la grossesse

Une récidive est fréquente durant le post-partum et jusqu’au douzième mois après l’accouchement. Une surveillance des dosages hormonaux sera maintenue pendant cette période.

Risques pour la mère

Parmi les risques encourus par la mère, on relève :

→ prééclampsie : état pathologique de la femme enceinte caractérisé par une hypertension artérielle, une protéinurie et une prise de poids avec œdème. Une prééclampsie peut mettre en danger la vie de l’enfant et de la mère et nécessite une hospitalisation ;

→ fausses couches spontanées et accouchements prématurés ;

→ ruptures placentaires ;

→ état de thyréotoxicose sévère.

TRAITEMENT MATERNEL

Les antithyroïdiens de synthèse (ATS)

Risque tératogène

Des anomalies congénitales sont dues au carbimazole (Neomercazole), événement rare qui survient tôt, avant la 12e semaine, parfois avant que le diagnostic de grossesse soit connu.

Chez les jeunes femmes qui présentent une maladie de Basedow et qui n’ont pas de contraception, on préfère le propylthiouracile (Proracyl), aussi appelé PTU, qui n’a jamais montré d’effet tératogène.

Choix de l’ATS

Dans le cas d’une grossesse diagnostiquée avant 7 semaines d’aménorrhée, si la patiente reçoit déjà du carbimazole, il est remplacé par du PTU ou du benzylthiouracile (Basdene).

Si la grossesse est connue après 7 semaines d’aménorrhée chez une patiente traitée par carbimazole, le traitement peut être poursuivi.

Posologie minimale

Il est recommandé de maintenir la T4L dans le tiers supérieur de la norme. Ceci permet d’administrer une dose minimale d’ATS qui pourra être arrêtée au troisième trimestre dans 30 % des cas (si les ARTSH ne sont plus présents). De plus, un passage placentaire trop élevé des ATS peut entraîner un goitre et une hypothyroïdie chez le fœtus.

La chirurgie

Elle est indiquée en cas d’allergie ou de contre-indication aux ATS, ou d’inefficacité de ces médicaments, et en cas de sévérité de l’hyperthyroïdie ou de taux d’ARTSH élevés.

L’irathérapie

Le traitement par l’iode radioactif est formellement contre-indiqué en cas de grossesse.