MESURES JURIDIQUES
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Près d’un million de personnes sont placées aujourd’hui sous un régime de protection juridique. Avec le vieillissement de la population, ce chiffre augmentera dans les années à venir, et pourtant les professionnels de santé connaissent mal les droits de ces personnes. Levons le voile sur un système qui vise à protéger les plus vulnérables.
Il existe trois régimes de protection, allant du plus léger au plus contraignant, décidés en fonction de l’importance de l’altération des facultés psychiques et physiques des personnes : sauvegarde de justice, curatelle et tutelle.
La sauvegarde de justice est une mesure provisoire et de courte durée, qui permet de représenter une personne, dont les facultés sont passagèrement altérées, notamment à la suite d’un accident, ou qui est en instance de placement sous tutelle ou curatelle. Dans cette dernière hypothèse, la mesure est décidée par le juge des tutelles. Dans le premier cas, elle résulte d’une simple déclaration faite au procureur de la République auprès du tribunal de grande instance, soit par le médecin de l’établissement de santé où se trouve le patient, soit par le médecin traitant si la personne se trouve à son domicile, cette déclaration devant alors être accompagnée d’un avis conforme d’un psychiatre.
La curatelle concerne des personnes qui ont besoin d’être assistées pour les actes importants de la vie sans être cependant hors d’état d’agir elles-mêmes. Elle peut être de degré variable, simple ou renforcée.
La tutelle est une mesure de représentation pour des personnes souffrant d’une altération de leurs facultés mentales ou corporelles.
Une mesure de protection est lourde de conséquences pour la personne et elle ne sera décidée par le Tribunal que si elle apparaît nécessaire et en l’absence de toute autre solution.
La loi a mis à la charge du tuteur et du curateur une obligation générale d’information à l’égard de la personne.
Le droit à l’information médicale est un droit fondamental pour toute personne, dès lors qu’elle a une conscience suffisante pour la recevoir. Bien entendu, il appartient au corps médical de lui délivrer une information adaptée à ses facultés de compréhension. Sauf en cas d’urgence, ou lorsque le majeur se trouve hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin doit tenter de recueillir le consentement personnel du patient, même s’il est sous protection.
Une personne est toujours en droit de refuser les soins qui lui sont proposés, même si ce refus met sa vie en danger, dès lors que sa décision est libre et éclairée. La difficulté, pour le corps médical, sera d’apprécier le degré de discernement d’un patient dont les facultés mentales sont altérées.
La personne sous curatelle pourra exprimer seule sa volonté. En revanche, en cas de tutelle, le dernier mot appartiendra au tuteur, sauf si le majeur peut clairement affirmer son refus de soins.
Comme tout patient, le majeur protégé, sous sauvegarde de justice ou sous curatelle, peut demander à consulter son dossier médical.
Mais s’il est sous tutelle, seul le tuteur pourra effectuer, en son nom, cette demande (article R. 1111-1 du Code de la Santé publique). Il est alors tenu au secret médical et ne peut divulguer les informations communiquées dans ce cadre. Le curateur n’a pas accès au dossier médical.
Tout individu majeur capable peut désigner une personne de confiance qui pourra l’assister dans son parcours de soins (article L. 1111-6 du Code de la Santé publique). Une personne sous curatelle reste libre de pouvoir en désigner une.
Si la personne est sous tutelle, la désignation d’une personne de confiance est impossible. Cependant, si elle en avait désigné une avant sa mise sous tutelle, le juge peut soit confirmer la mission de la personne de confiance qui avait été désignée, soit la révoquer.
La personne protégée, hospitalisée en milieu psychiatrique, bénéficie, comme tout patient, de droits garantis, et notamment celui de s’adresser aux autorités pour contester son hospitalisation sous contrainte. Il appartient alors au curateur ou au tuteur de les faire respecter.
Pour un majeur sous tutelle ou sous curatelle, le prélèvement d’organe en vue d’un don est interdit (article L. 1232-2 du Code de la Santé publique), tout comme le don de sang, le prélèvement de tissus (moelle osseuse, peau…) ou de produits du corps humain (ovocytes, sperme…), sauf exceptions strictement encadrées par la loi.
La stérilisation des majeurs sous tutelle ou sous curatelle est interdite, en dehors d’une contre-indication médicale absolue aux autres méthodes contraceptives ou dans le cas où il existe une impossibilité avérée de les mettre en œuvre. Dans ce cas, le juge est seul à pouvoir donner l’autorisation de faire pratiquer cette intervention, après audition du majeur, du tuteur (ou du curateur) et de toute autre personne dont l’audition lui paraîtrait utile. Il ne peut être passé outre le refus du majeur protégé (article L. 2123-2 du Code de la Santé publique).
S’agissant d’une demande d’interruption volontaire de grossesse (IVG), il n’est rien prévu pour les majeurs protégés.
Le Code de la Sécurité sociale ne prévoit aucune disposition particulière pour les majeurs protégés en matière de choix du médecin, qu’il s’agisse du médecin traitant ou du médecin consultant. C’est le majeur, qu’il soit sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice, qui signe le formulaire du médecin traitant. Cependant, dans le cas de la tutelle ou de la curatelle renforcée, c’est le tuteur ou le curateur qui règle les frais médicaux. Il peut donc imposer un choix guidé par des considérations budgétaires.
Les personnes, dont les facultés physiques ou mentales sont altérées, doivent être juridiquement protégées dans le cas où toute autre solution alternative n’a pu être trouvée. Mais, qu’elles soient sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice, leurs droits doivent être respectés : droit d’être informées sur leur état de santé, en fonction de leur degré de compréhension, droit de donner leur consentement aux soins proposés, droit de choisir les professionnels qui les leur délivreront, etc.