POLITIQUE DE SANTÉ
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ALIMENTATION > La dénutrition des seniors est un phénomène majeur et pourtant mal connu. Des médecins et des responsables de restauration ont échangé avis et retours d’expérience lors d’un colloque, co-organisé à Lyon par les sociétés SPH Conseil, EC6 et l’Ifross.
« Les médecins et les infirmières dépistent mal la dénutrition des personnes âgées, affirme le Pr Bruno Lesourd, gériatre au CHU de Clermont-Ferrand et président d’Areva (Association de recherche et d’enseignement sur le vieillissement en Auvergne). Encore peu enseignée à la Faculté, la nutrition n’est pas suffisamment considérée comme un soin. » Et d’évoquer l’importance d’appliquer davantage de protocoles de surveillance, tant à l’hôpital qu’en institutions : « Il est nécessaire de détecter les évolutions de poids et de suivre le taux d’albumine, tant qu’il est inférieur à 35 g/l. »
Quant à Martine Laville, médecin nutritionniste au CHU de Lyon, elle se « méfie des régimes trop stricts, qui font plus fondre la masse maigre que la masse grasse. Être un peu enrobé procure des réserves bénéfiques au très grand âge ».
« Il suffit de huit jours de maladie pour qu’une personne fragile arrive dans un état lamentable à l’hôpital, confirme le Pr Lesourd. En Ehpad, on ne consacre pas assez de temps à nourrir les personnes âgées. Il y a aussi des prescriptions abusives et définitives de mixé (au détriment par exemple du haché). » Il faudrait promouvoir “l’alimentation-plaisir”, dans et hors l’assiette (importance des couleurs, des formes, de l’ambiance…).
De multiples paramètres individuels sont susceptibles d’intervenir en matière de mauvaise alimentation : état dentaire, état mental (isolement, deuil…), pathologie (augmentation de la dépense énergétique en cas d’Alzheimer ou de Parkinson), etc. « Pendant cinq ans, indique le Pr Lesourd, l’Areva a étudié l’alimentation à domicile ainsi que le portage des repas. Les plateaux livrés pour le midi servent aussi souvent aux repas du soir. Comme en institutions, les menus sont parfois insuffisamment équilibrés, répétitifs, peu goûteux (manque d’assaisonnement…). Les approches sensorielles sont pourtant indispensables pour motiver la personne à manger. Tenir compte de son histoire culinaire est également fondamental. Pour les grands malades de 80 ans, deux à trois jours par semaine, mieux vaut concentrer 80 % de la charge protéique sur le repas de midi. Le soir, on peut aussi servir des potages enrichis, à la crème fraîche par exemple. »
« Parfois, nous travaillons avec des médecins généralises ou hospitaliers, mais c’est rare. Ce sont souvent les assistantes sociales qui s’occupent de l’alimentation en sortie d’hôpital, sans un accompagnement suffisant de la part du personnel soignant. On aurait aussi besoin des infirmières des Ssiad pour repérer les gens dénutris à domicile. » Paul Tronchon dénonce également les gestionnaires de certaines cuisines centrales « qui établissent des cahiers des charges à un trop faible coût financier pour pouvoir répondre aux besoins nutritionnels des personnes âgées. Il faudrait pousser les acteurs des assurances complémentaires à investir davantage le champ de la prévention nutritionnelle ».
* Saveur et vie est une société spécialisée dans le portage de repas personnalisés à domicile (voir le site Internet www.saveursetvie.fr).