Un patient plutôt cabot - L'Infirmière Libérale Magazine n° 271 du 01/06/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 271 du 01/06/2011

 

MON PREMIER CLIENT

L’exercice au quotidien

En juin 2009, Marie-Thérèse Lambert ouvre son cabinet à Boucau (64). À peine a-t-elle posé sa pancarte qu’elle reçoit son premier client, sur quatre pattes et à la toison blanche : un chien diabétique…

« Après plusieurs années dans un centre d’hémodialyse, suivies de remplacements en tant que libérale, j’ai décidé d’ouvrir mon cabinet, en juin 2009, juste à côté de chez moi, à Boucau. C’était un lundi matin. J’ai alors vu ma première cliente approcher, une dame, qui promenait souvent son chien dans le quartier, un mignon Scottish blanc appelé Capi. Or elle ne venait pas pour elle… mais pour son chien, diagnostiqué diabétique peu de temps avant ! Capi a donc été mon premier client.

Le vétérinaire consulté quelques jours auparavant par la dame lui avait montré le geste d’injection d’insuline, mais elle n’avait pas eu le temps de bien l’intégrer. Et elle n’osait pas retourner le voir. Pendant tout le week-end, sa fille, son gendre et elle-même avaient tenté de piquer le chien, en vain. Ils n’osaient pas piquer franchement, et le chien leur avait mordillé les bras à plusieurs reprises ! Quand elle est arrivée dans mon cabinet, cela faisait 48 heures que Capi n’avait pas eu d’insuline…

Aussi ai-je en urgence piqué le chien. Comme il était assez nerveux, j’ai demandé à sa maîtresse de repasser dans l’après-midi pour que je lui enseigne, au calme, le geste à effectuer. De l’édu­cation thérapeutique, en somme ! Quelques heures plus tard, je lui ai donc montré comment pratiquer une injection d’insuline dans une éponge – c’est ainsi que l’on nous apprend à piquer, à l’Ifsi. Le soir venu, elle est revenue avec Capi, que j’ai couché sur la table. J’ai montré à sa maîtresse comment lui tenir la tête, pour éviter les morsures, et elle l’a piqué devant moi. Avec un animal, il ne faut pas montrer qu’on a peur, sinon, c’est fichu. Il faut y aller franchement. Ayant grandi à la campagne, au milieu d’élevages de chevaux, j’ai l’habitude des soins aux animaux. Il m’arrive régulièrement de piquer mes chats.

Aussi cette expérience ne m’a pas gênée. Après mon troisième rendez-vous avec Capi, sa maîtresse m’a demandé combien je lui devais. Je lui ai répondu qu’en l’absence de carte Vitale du chien, je ne pouvais pas facturer et que c’était gratuit ! Cet apprentissage lui a permis de bien intégrer le geste. Aujourd’hui encore, je croise souvent Capi, qui se porte bien. »

Avis de l’expert

Un défi pédagogique pour les vétérinaires !

Le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL)

« L’anecdote est intéressante. La réciproque existe aussi, les vétérinaires étant parfois sollicités pour quelques injections familiales…Toutefois, la loi ne prévoit pas de dérogation à l’exercice de la médecine et de la chirurgie sur des animaux par les professionnels de la santé humaine. Seuls les cas d’urgence autorisent un professionnel non vétérinaire ou un particulier à intervenir. Le cas du diabète sucré du chien est souvent un défi pédagogique pour les vétérinaires, qui doivent convaincre le propriétaire de l’animal de sa capacité à réaliser lui-même les injections. Car l’adhésion du maître conditionne totalement le succès du traitement. Des échanges entre infirmières et vétérinaires sur cet apprentissage pourraient être bénéfiques, illustrant l’intérêt du concept “une seule santé” que notre profession entend promouvoir à l’occasion de Vet 2011, l’année mondiale vétérinaire. »