Régime alimentaire Y A-T-Il UN MODE D’EMPLOI POUR PERDRE DU POIDS ?

Jean-Michel Cohen Nutritionniste et auteur, entre autres, de Au bonheur de maigrir(1)

Chaque année, au printemps, fleurissent les couvertures de magazine sur tel ou tel régime. Que pensez-vous de cela et de ce diktat de la ligne ?

On se rend compte qu’il s’agit d’un vœu collectif de société. Ce n’est même plus sous la pression de la presse et de la mode que les gens souhaitent maigrir. Les médecins ont contribué à cette évolution de la société, mais en s’exprimant plutôt sur la question du surpoids.

Existe-t-il cependant un régime miracle ?

Hélas non ! Et c’est ce qui fait le bonheur de certaines entreprises qui surfent sur ce créneau. L’argumentaire est simple : les personnes qui s’estiment trop grosses tentent ces régimes en se disant qu’au pire cela ne marchera pas et que ce n’est pas grave. Au fond, les gens font ce qu’ils ont envie de faire. Ils grappillent ici une connaissance, là une recette. Ils fabriquent leur propre régime en voulant maigrir le plus possible, de la façon la moins contraignante possible et dans un laps de temps le plus court possible.

Un régime sans effort, en somme.

Oui. Or il y a souvent un travail sur soi à effectuer quand on veut maigrir. Il faut passer au-delà des troubles alimentaires et s’habituer à consommer de nouveau des produits qui semblent moins savoureux. Et puis, la petite révolution produite en matière de régime est sans doute le coaching sur Internet. Si vous êtes accompagné dans votre régime, cela marche mieux. Les femmes se réunissent dans des communautés virtuelles, elles s’encouragent, etc.

S’il n’existe pas de régime miracle, que faire pour maigrir ?

Le régime que je propose limite le nombre de calories consommées quotidiennement, entre 1 100 et 1 800 calories, selon les personnes. Mais si j’avais un paramètre à mettre en évidence, ce serait celui des matières grasses, incriminées entre autres dans les maladies cardiovasculaires. Cela dit, nous ne sommes pas constamment derrière les gens. Sur les produits laitiers, par exemple, on commence à dire qu’au-dessus de trois produits laitiers par jour, certains hommes ont une plus forte probabilité de déclencher un cancer de la prostate. Dans ce cas, que fait-on pour les femmes à qui l’on conseille au contraire de consommer plus de produits laitiers ? La nutrition est un domaine fantasmique, nous devons garder cela à l’esprit.

Marc Menant Journaliste et écrivain, auteur de Médecine, régimes, la terrifiante imposture

Chaque année, au printemps, fleurissent les couvertures de magazine sur tel ou tel régime. Que pensez-vous de cela et de ce diktat de la ligne ?

En tant que journaliste, les marronniers me révoltent. A fortiori quand on tend le micro à des soi-disant experts qui, en l’occurrence, se présentent comme nutritionnistes sans aucun certificat en la matière. Regardez comment les choses se passent : Jean-Michel Cohen est devenu nutritionniste parce qu’il était là au moment de la création d’un service hospitalier. Il recommande de consommer trois produits laitiers par jour et il est conseiller chez Nestlé-Danone. Pierre Dukan est devenu nutritionniste le jour où un patient qui aimait surtout la viande est venu le voir parce qu’il voulait maigrir. Quant au cancérologue David Khayat, il a découvert la nutrition à 56 ans. En un an à peine, il a synthétisé des pseudo-enquêtes, en a tiré la quintessence et publié un livre(3). C’est une imposture !

Existe-t-il un régime miracle ?

Sans doute pas. Je ne suis pas nutritionniste, mais il semble que le régime crétois et le régime du nord du Japon, avec très peu de protéines animales, mais des légumes, des fruits, voire des algues, ont des bienfaits qui ne sont plus à démontrer. Après, le régime en tant que tel ne sert à rien si vous ne faites pas de sport à côté. Donc, pour avoir la santé et maigrir, il faut limiter les protéines animales – notre corps n’arrive pas à les détériorer, ce qui favorise les tendinites, les douleurs musculaires, l’arthrite, etc. –, le sucre et les produits raffinés, et faire du sport. Mais nous sommes dans une société où les gens ne se sentent pas bien, où l’on grignote comme on boit ou comme on fume. Nous nous trouvons dans un plaisir compensatoire.

Que reprochez-vous vraiment aux régimes Cohen, Dukan et autres ?

On ne tient pas compte de la physiologie des individus, mais on calcule des calories. Cela dit, gardons aussi à l’esprit que, dans un cycle de formation de huit ans des médecins, il n’y a que trois heures consacrées à la nutrition…