Cahier de formation
Savoir faire
Le rhumatologue de Mme P. lui a diagnostiqué une polyarthrite rhumatoïde et prescrit du Novatrex 2,5 (méthotrexate), de la Speciafoldine, du Cortancyl 5 (prednisone, 2 comprimés/j) et une supplémentation calcique. Sur l’ordonnance est mentionné : “Faire attention au sel”. Que doit faire Mme P. ?
Des conseils diététiques peuvent permettre de prévenir un grand nombre d’effets indésirables des traitements corticoïdes. Le médecin préconise de manger peu salé pour éviter une hypertension artérielle : vous donnez donc à Mme P. une liste d’aliments à éviter. Vous lui recommandez une alimentation pauvre en sucres rapides et en graisse et de privilégier protéines, laitages et aliments riches en potassium.
Hormis le cas d’une pathologie aiguë où le traitement est débuté sans attendre et celui d’un traitement à forte posologie avec fragmentation de la dose journalière en deux prises (matin et midi), les corticoïdes s’administrent en une prise unique préférentielle au cours du repas pour prévenir les gastralgies, et ce, le matin, pour, d’une part, respecter la sécrétion physiologique du cortisol et ainsi limiter la freination de l’axe hypothalamo-hypophysaire, et, d’autre part, pour prévenir les troubles du sommeil (notamment chez l’enfant).
Il faut éduquer les patients à être bien observant du traitement, et aussi à bien respecter la décroissance progressive des doses lors de l’arrêt des traitements prolongés : en effet, les traitements supérieurs à dix jours doivent être arrêtés progressivement sur plusieurs jours, voire plusieurs semaines, non seulement pour éviter un effet rebond de la maladie, mais aussi pour éviter une insuffisance surrénalienne.
Dans le cadre d’un traitement long, des mesures hygiéno-diététiques permettent de prévenir les effets indésirables métaboliques et endocriniens des corticoïdes : exposition solaire suffisante (productrice de vitamine D) et, si possible, pratique physique régulière pour stimuler les cellules osseuses, entretenir les muscles et limiter la prise de poids, régime hyposodé, riche en protéines, en calcium, potassium, pauvre en sucres et lipides.
En pratique, il faut conseiller aux patients d’éviter les aliments riches en sel comme les biscuits apéritifs ou les chips, la charcuterie, les plats cuisinés, certaines eaux pétillantes (comme Vichy St-Yorre ou Vichy Célestin), et de ne pas resaler les plats à table.
Il faut également limiter la consommation de confitures, de bonbons, de barres chocolatées et de sodas, de viennoiseries, de pâtisseries (privilégier les fruits frais au dessert), fritures, matières grasses animales et privilégier les huiles végétales (riches en oméga 3).
En revanche, le patient doit veiller à avoir une alimentation riche en protides (petit-déjeuner de type anglais, viande ou poisson au déjeuner ainsi qu’au dîner).
Pour prévenir l’ostéoporose, il convient de consommer quatre laitages par jour et de boire des eaux minérales riches en calcium (mais pauvres en sodium) comme Contrex ou Courmayeur.
Enfin, pour éviter une hypokaliémie, il convient d’enrichir l’alimentation en potassium (dans les bananes, les fruits secs et éventuellement le chocolat noir).
Il est important d’éduquer le patient sous corticoïdes, de lui apprendre à éviter le contact avec un entourage malade, à respecter une bonne hygiène bucco-dentaire et intime tout comme une hygiène rigoureuse des mains et des pieds, et à se rincer la bouche ou à boire après l’administration de formes orodispersibles, de formes inhalées ou de gouttes buvables, pour éviter la survenue de mycoses buccales.
Et il faut inciter les patients à consulter en cas de fièvre ou de survenue de signes infectieux (comme une éruption cutanée qui peut être évocatrice d’un zona).
Il est utile d’éduquer les patients à énoncer leur traitement corticoïde à tout prescripteur potentiel ainsi qu’au pharmacien pour éviter les interactions médicamenteuses.
Il est important de conseiller la prise d’AINS per os au cours des repas pour prévenir ainsi la toxicité digestive.
La prise orale d’AINS doit se faire avec un grand verre d’eau pour éviter l’adhésion des comprimés sur la muqueuse œsophagienne qui pourrait être à l’origine de lésions digestives.
En cas d’oubli, il ne faut surtout pas doubler la dose de la prise suivante : ceci est tout à fait inutile, puisqu’il s’agit d’un traitement purement symptomatique. En revanche, les effets indésirables pourraient être majorés.
Afin de contrôler la survenue de complications liées aux effets secondaires, il est important de dire aux patients de signaler au médecin la survenue de gastralgies, la présence de sang dans les selles ou l’apparition d’une coloration noire des selles, ainsi qu’un essoufflement, des lésions ou une éruption cutanées qui pourraient signer une allergie.
Bien sensibiliser le patient au risque de vertiges.
Recommander la prudence lors de la conduite automobile.
Recommander la prudence aux utilisateurs de machine.
Il est préférable d’éviter de recourir à l’automédication en raison des interactions avec les salicylés et les autres AINS (interaction, entre autres, avec l’aspirine et l’ibuprofène, qui sont en vente libre). Il convient par conséquent de bien rappeler aux patients sous AINS que l’antalgique/antipyrétique de première intention demeure le paracétamol.
Il est également important d’éduquer les patients sous AINS à indiquer leur traitement anti-inflammatoire à tout prescripteur potentiel, en raison des nombreuses autres interactions.
Le cas échéant, il est aussi utile d’expliquer aux patients que certains traitements peuvent justifier une surveillance renforcée lors de la prise d’un AINS, comme les anti-hypertenseurs par exemple.
« Lors d’une corticothérapie au long cours, certaines mesures diététiques doivent être respectées, comme un régime hyposodé et pauvre en sucre. Si certains patients font bien attention à ne pas manger trop salé, en revanche, sans le savoir, ils boivent salé : il faut bien expliquer aux patients que les eaux pétillantes sont riches en sodium. Parfois, ce sont les auxiliaires de vie qui nous font part des habitudes de consommation des patients et nous décelons les erreurs ! De même, ce sont les auxiliaires de vie qui nous confient les éventuels écarts des patients et les consommations excessives d’alcool. Les écouter est très précieux ! »