Fibromes et reproduction - L'Infirmière Libérale Magazine n° 274 du 01/10/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 274 du 01/10/2011

 

Cahier de formation

Savoir faire

Mme B., une patiente de 81 ans pour laquelle vous préparez le pilulier, vous montre avec fierté les photos de mariage de sa petite fille Nathalie. Mme B. vous apprend que son gynécologue a dit à Nathalie qu’elle avait un fibrome. Mme B. espère que cela ne posera pas de problème à Nathalie pour être enceinte.

Il convient tout d’abord de rassurer Mme B. : une infertilité est rarement directement liée au fibrome et, dans la majorité des cas, la grossesse se déroule normalement. Cependant, tout dépend du type et du nombre de fibromes, et s’il(s) nécessite(nt) ou non un traitement. Le mieux pour Nathalie est d’en reparler avec son gynécologue pour planifier ses grossesses en fonction de son projet de famille et, le cas échéant, des éventuels traitements envisagés.

IMPACT DES FIBROMES SUR LA FERTILITÉ

Un fibrome n’entraîne qu’exceptionnellement une stérilité. En effet, les fibromes seraient responsables de seulement 2 à 3 % des cas d’infécondité. Il s’agit alors de fibromes très volumineux qui compriment les trompes de Fallope ou plus volontiers de fibromes sous-muqueux qui gênent la nidation. En général, les fibromes intersticiels ou sous-séreux n’empêchent pas la survenue d’une grossesse. L’infertilité est plus souvent en rapport avec une pathologie gynécologique associée : anovulation, endométriose, conséquences de salpingites (infections des trompes). C’est pourquoi la découverte d’un fibrome au cours d’un bilan d’infertilité ne dispense pas de réaliser l’exploration complète de ce trouble, tant chez la femme que chez son partenaire (estimation de la réserve ovarienne, évaluation de la perméabilité des trompes par hystérographie, spermogramme).

IMPACT DES FIBROMES SUR LA GROSSESSE

La présence d’un fibrome peut gêner le diagnostic de grossesse. En outre, l’utérus étant déjà augmenté de volume par le fibrome, ce dernier rend difficile l’évaluation exacte de l’âge gestationnel.

Pendant la grossesse, les risques de douleurs pelviennes sont augmentés du fait de l’augmentation rapide du volume de l’utérus et de celui du fibrome, sous l’influence des modifications hormonales. Cependant, il est à noter que la majorité des grossesses se développant dans un utérus fibromateux se déroulent sans problème. En effet, les fibromes (notamment sous-muqueux) peuvent être associés à une augmentation du risque d’avortement spontané et de fausses couches à répétition, mais leur responsabilité réelle est difficile à établir. Les principales complications sont des insertions anormales du placenta sur le segment inférieur de l’utérus (placenta praevia, qui nécessite une surveillance échographique renforcée) et des présentations dystociques (podalique ou transverse ou par le siège) du fœtus lors de l’accouchement pouvant justifier une césarienne. Le risque d’accouchement prématuré dépend de la taille et de la localisation des fibromes. Des hémorragies de la délivrance peuvent survenir. Elles sont liées à une mauvaise rétraction de l’utérus. En suite de couches, un fibrome peut favoriser la survenue de phlébites par compression des vaisseaux pelviens.

IMPACT DE LA GROSSESSE SUR LES FIBROMES

Au deuxième trimestre de la grossesse, le fibrome se ramollit et devient plus difficile à diagnostiquer, s’il ne l’a pas déjà été. La grossesse augmente le risque de complication du fibrome à type de nécrobiose aseptique, qui se manifeste par des douleurs utérines intenses et très localisées, associées à de fréquentes contractions utérines, des nausées et des vomissements, une hyperthermie et une asthénie. Pendant la grossesse, le traitement de la nécrobiose aseptique sera médicamenteux et fera appel à des antalgiques et éventuellement à des tocolytiques pour supprimer les contractions. Le repos au lit est nécessaire. La chirurgie sera envisagée à distance de l’accouchement.

IMPACT DES TRAITEMENTS SUR LA FERTILITÉ ET LA GROSSESSE

Toutes les techniques d’ablation comme de destruction des fibromes peuvent avoir une répercussion sur la fertilité.

L’embolisation peut induire des troubles de la fonction ovarienne.

La myomectomie laisse un utérus “cicatriciel”, fragilisé par l’intervention. Elle peut être responsable d’adhérences autour des trompes ou de synéchies (adhérences intra-utérines) qui peuvent entraver une grossesse. Ces adhérences seraient moins fréquentes par cœlioscopie que par laparotomie. En outre, une myomectomie augmente légèrement le risque de rupture utérine lors de l’accouchement.

La myolyse peut léser l’endomètre, rendant plus difficiles de futures nidations embryonnaires.

Point de vue…
Docteur Xavier Deffieux, chirurgien gynécologue, maître de conférences des universités et praticien hospitalier à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart (92), AP-HP

Planifier les grossesses

« Il est important de conseiller aux patientes en âge de procréer de planifier rapidement leurs grossesses. Car la poursuite évolutive de la maladie fibromateuse et les traitements chirurgicaux peuvent entraver la reproduction. Chez les femmes de 25 à 30 ans, une fois le fibrome traité, il faut en effet essayer d’obtenir rapidement les grossesses, car, quand une femme a un fibrome, souvent il y en a d’autres plus petits qui risquent de grossir et de devenir gênants quelques années après. Il faut éviter d’ajouter aux problèmes de fibromes celui de l’âge ! »

Grossesse et fibrome : à retenir

Il n’existe pas de données permettant d’indiquer une myomectomie à une patiente porteuse d’un fibrome asymptomatique, qui désire une grossesse.

Lorsqu’un fibrome est découvert pendant la grossesse (0,5 % des cas environs), le seul examen recommandé est l’échographie, et aucun traitement n’est proposé car l’association fibrome/ grossesse n’entraîne généralement aucune complication, ni pour l’un, ni pour l’autre. En effet, les fibromes les plus fréquents sont les fibromes sous-séreux et interstitiels (se développant respectivement vers l’extérieur de l’utérus ou au sein du muscle utérin) et ils ont peu de répercussion sur la grossesse, laquelle suit son cours normalement, le plus souvent.

Les fibromes sous-muqueux (qui se développent vers l’intérieur de la cavité utérine et qui sont les plus rares) peuvent cependant gêner la grossesse et provoquer des avortements spontanés. Ils peuvent aussi être à l’origine d’anomalies de l’insertion du placenta ou de la présentation de l’enfant au moment de l’accouchement.

La complication la plus importante susceptible de survenir pendant la grossesse est la nécrobiose du fibrome due à un arrêt de la circulation sanguine à son niveau.

Il existe un consensus pour contre-indiquer en général toute myomectomie pendant une grossesse ou au cours d’une césarienne.