L'infirmière Libérale Magazine n° 274 du 01/10/2011

 

PROFESSION

ACTUALITÉ

SCHYZOPHRÉNIE → Présentée dans le cadre du congrès du Collège européen de neuropsychopharmacologie, une étude réalisée auprès d’infirmiers psychiatriques et de psychiatres de nombreux pays souligne le caractère indispensable de la continuité dans le traitement.

La schizophrénie est une maladie grave et plus courante qu’on ne le croit : l’association américaine des psychiatres estime que, sur l’ensemble de la population mondiale, un individu sur cent sera atteint de schizophrénie à l’âge de 45 ans. Non guérissables par définition, les symptômes de la schizophrénie se traitent néanmoins de mieux en mieux : depuis le milieu des années 1950, les médicaments antipsychotiques se sont nettement améliorés. Mais le progrès pharmaceutique n’est rien sans une « réelle implication du patient, une adhésion au traitement », a insisté Pierre-Michel Llorca, chef du service de psychiatrie au centre médico-psychologique (CMP) du CHU de Clermont-Ferrand (63), dans le cadre du congrès du Collège européen de neuropsychopharmacologie(1). De fait, un mauvais suivi est associé à un risque important de rechute. Prévenir les réhospitalisations reste la clé d’un traitement efficient.

Mauvaise observance

Les résultats de l’étude EMEA(2) (pour Europe, Middle East, Africa), menée par les laboratoires Janssen en 2010 et 2011, confirment cette difficulté : 53 % des patients sont non ou partiellement adhérents au traitement, et ceux qui arrêtent leur traitement médicamenteux ont cinq fois plus de risques de rechute, ce qui aggravera leur isolement. Sachant que, pour 36 % des patients, la non-adhésion au traitement découle du manque de conscience de sa maladie, et que, pour 26 %, elle est liée aux moments de répit au cours desquels le patient se sent mieux et pense que le traitement n’est plus nécessaire, un suivi plus régulier et une éducation thérapeutique sont fondamentaux.

Collaborer avec les libéraux

En regard de ce constat, Pierre-Michel Llorca met l’accent sur un autre résultat : 93 % des infirmières travaillant en psychiatrie estiment que l’administration d’antipsychotiques à durée prolongée sous forme injectable (long-acting injectable antipsychotics) génère des bénéfices plus importants. Ces traitements se présentent sous forme d’injection toutes les deux à quatre semaines, pouvant être faites à l’hôpital, mais aussi par des infirmiers libéraux spécialisés en psychiatrie. « Face aux difficultés de l’hôpital public et au manque de moyens, le travail en collaboration avec les cabinets d’infirmiers libéraux porte ses fruits, se réjouit le psychiatre. Dans l’objectif d’un suivi plus resserré du traitement, d’une stabilité de l’état du patient et de sa resocialisation, l’infirmier libéral est un pilier. J’ai des retours très positifs des infirmiers libéraux avec lesquels je travaille, y compris en termes de remboursement des consultations par l’Assurance maladie. »

Manque de conscience de sa propre condition, inconscience du risque de rechute, troubles de la pensée, comportement inapproprié de l’entourage, suivi trop impersonnel, peur des effets secondaires des médicaments… Ce sont autant d’explications de la non-adhésion du malade à son traitement, sur lesquelles l’infirmier libéral peut agir directement et dans l’environnement familier du patient. Un soutien psychologique essentiel qui vient compléter le suivi du traitement médicamenteux, dont l’objectif est la diminution des hallucinations, de l’agitation, et des épisodes psychotiques.

(1) Le congrès du CENP s’est tenu au Palais des Congrès de Paris du 3 au 7 septembre.

(2) Étude menée par les laboratoires Janssen en 2010 et 2011 auprès de 4 722 psychiatres dans 36 pays et de 4 120 infirmiers psychiatriques dans 29 pays.