L'infirmière Libérale Magazine n° 275 du 01/11/2011

 

PROFESSION

Actualité

MOLLE RENTRÉE →Réunionite aiguë, lenteurs administratives, dossiers épineux, multiplication des versions de décrets… Vos syndicats s’agacent du temps et de l’abnégation nécessaires pour faire avancer les chantiers et améliorer vos conditions d’exercice.

L’année 2011 avait si bien commencé pour les infirmiè­res… Les syndicats s’étaient investis avec volon­tarisme dans les négociations conventionnelles, parvenant le 24 ? juin dernier à un relevé de conclusions autour de la régulation démographique.

La profession sort de l’ombre

Ce faisant, la profession était subitement regardée sous un jour nouveau par l’ensemble du monde de la santé : oubliée dans l’ombre des médecins depuis trop longtemps, la profession infirmière devenait l’exemple à suivre, faisant preuve de courage pour faire avancer ses conditions d’exercice, allant de l’avant de manière décidée. Mieux : à la différence de bien des professions de santé, cet accord conventionnel était signé par l’ensemble des syndicats (FNI, Onsil, Sniil et Convergence infirmière). Du jamais vu pour Frédéric van Roekeghem, le directeur général de l’Assurance maladie, et pour Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, qui n’en espéraient sans doute pas tant ! Mais, passé l’été à savourer leur blason redoré, les syndicats infirmiers ont le sentiment que, depuis la rentrée, le soufflé est bel et bien retombé.

Gare au comité d’alerte

Si les syndicats ont bel et bien tous signé le projet de l’avenant conventionnel le 28 septembre dernier, l’accord ne pourra pas être appliqué avant le printemps prochain. En effet, l’Union des complémentaires (Unocam) dispose encore d’un mois pour s’opposer éventuellement à ce texte. Le ministre de la Santé devra ensuite le signer et le faire publier au Journal officiel. L’accord ne sera ensuite applicable que passé le délai légal des six mois dits de “stabilisateurs économiques”, période pendant laquelle le comité d’alerte qui suit l’évolution des dépenses de santé peut s’opposer à l’application de toute revalorisation tarifaire. Du coup, entre le moment où le protocole d’accord a été signé, en juin dernier, et son entrée en vigueur sur le terrain, un an se sera quasiment écoulé.

Guère mieux en région

Même scénario dans les régions, où les Unions régionales des professionnels de santé (URPS) sont à la peine. Interlocutrices directes des Agences régionales de santé (ARS), les URPS connaissent de nombreuses difficultés. La pire d’entre elles, critiquée lourdement par les syndicalistes, toutes professions confondues, étant son caractère chronophage.

En effet, les membres des URPS doivent représenter et défendre les intérêts de leurs professions au sein de commissions diverses et variées, souvent pléthoriques, où les libéraux ont tendance à être noyés dans la masse des participants. Siègent ainsi dans les commissions, outre les libéraux de santé, les représentants du monde hospitalier, les élus locaux, les représentants des usagers, et ceux, évidemment, de l’ARS. Comble du comble : ces réunions sont souvent organisées au beau milieu de la journée, empêchant les libéraux d’exercer sereinement leur métier premier : le soin. Qui plus est, relève Annick Touba, présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) et présidente de l’URPS infirmiers des Pays de Loire, les médecins, qui bénéficiaient de leur expérience passée des Unions régionales des médecins libéraux (URML), écrasent quelque peu les autres professions, au sein de ces instances : « Ils ont les moyens humains, financiers, matériels. Ils sont en mesure de répondre à toutes les demandes. Comment voulez-vous que l’on fasse ? »

DPC, l’interminable dossier

Noyées dans la masse, les infirmières ? Ce n’est pas Philippe Tisserand, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI), qui dira le contraire, fustigeant certains projets de décrets autour du Développement professionnel continu (DPC). Dans sa ligne de mire, ceux qui établissent que les orientations nationales en matière de DPC seront déterminées sous l’égide d’une commission scientifique du Haut conseil des professions paramédicales (HCPP) (voir encadré ci-dessous). « En tant qu’infirmier libéral, je ne m’autorise pas à dire quoi que ce soit sur la formation continue d’un manipulateur-radio et j’attends que ce soit réciproque », s’emporte-t-il. Et d’ajouter : « On nous laisse sous le joug du HCPP. On ne veut pas créer de commissions scientifiques par profession. »

Cela fait un an que syndicats et représentants du ministère de la Santé travaillent à la rédaction de ces décrets d’application de la loi HPST. Plus de 60 versions des textes ont été proposées, engendrant aujourd’hui une forme d’écœurement des syndicats.

Réécrire l’article de loi

Ainsi, l’Union nationale des professions de santé (UNPS) a-t-elle adopté à l’unanimité, le 12 octobre dernier, une motion demandant au ministre de la Santé de « renoncer à publier les décrets et d’entreprendre la réécriture d’une loi », faute de quoi il devra assumer des textes sans l’adhésion des syndicats. « On peut accompagner ou subir une loi. Nous la subirons si Xavier Bertrand persiste dans sa façon de concevoir notre formation continue », fustige Christian Jeambrun, président du Syndicat des médecins libéraux (SML). Philippe Tisserand ajoute : « Si la motion de l’UNPS ne suffit pas, je propose que tous les syndicats d’auxiliaires médicaux écrivent ensemble au président de la République. Il est inacceptable qu’un ministre infantilise les représentants professionnels. » Tendu, le climat entre professionnels de santé et tutelle ?

DPC : les raisons de la colère

Selon le dernier projet de décret en date concernant le Développement professionnel continu (DPC) des infirmières, la commission scientifique du Haut Conseil des professions paramédicales (HCPP) sera composée de :

→ six représentants des professions infirmières, aides-soignantes et auxiliaires de puériculture ;

→ trois représentants des kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotricien, orthophoniste, pédicure-podologue, diététicien ;

→ deux représentants des manipulateurs radio et techniciens de laboratoires ;

→ un représentant pour les audioprothésistes, opticiens-lunetiers, prothésistes et orthoptistes ;

→ et un représentant des préparateurs en pharmacie.

Cette commission a pour mission de proposer les orientations nationales en matière de DPC de chacune des professions concernées, mais également d’établir une évaluation technique et scientifique des organismes de DPC. Pour les syndicats, c’est la qualité de la formation qui est en jeu.