Le débat
Les médicaments anti-Alzheimer ont été réexaminés par la Commission de la transparence de la HAS avec un an d’avance sur le calendrier initial. Les conclusions, rendues publiques en octobre, n’apaisent pas tous les doutes.
Que s’est-il passé avec les médicaments anti-Alzheimer ?
C’est assez simple. Ils sont au nombre de quatre
Pourquoi un SMR faible et non insuffisant, quand Gilles Bouvenot
C’est une question de degré. Il y a des médicaments dont l’intérêt thérapeutique est nul. Dans le cadre de la maladie d’Alzheimer, nous avons quatre médicaments, et rien d’autre. Nous avons considéré qu’en comparaison à rien, ces médicaments apportaient une petite réponse à certains patients. La délibération de la Commission de la transparence s’est faite dans un contexte particulier, avec la suspension dès le mois de mai de la recommandation de bonne pratique et dans le cadre d’une polémique largement médiatisée cet automne entre l’association France Alzheimer qui souhaitait le maintien de ces médicaments et les médecins généralistes qui considéraient que ces produits n’apportaient aucun bénéfice. Quand, en 2007, la Commission de la transparence avait rendu son dernier avis, elle avait tenu compte du fait que ces médicaments avaient un effet structurant dans la prise en charge des malades.
Pourquoi suspendre votre recommandation avant la réévaluation des produits ?
Cela fait suite à une plainte du Formindep
Que s’est-il passé avec les médicaments anti-Alzheimer ?
En 2011, on a fait appel à des experts indépendants, ce qui n’était pas le cas en 2007. Aujourd’hui, la communauté médicale est très divisée sur ces médicaments. On a vu encore très récemment des grands pontes dire qu’ils sont très utiles. La communauté scientifique reste très dépendante des firmes. Elle pense que, sans médicaments, on ne soigne rien. Les médicaments anti-Alzheimer n’ont pas démontré leur efficacité, en matière de qualité de vie, d’autonomie, de troubles du comportement, de mortalité. En revanche, ils ont des effets indésirables graves, notamment cardiovasculaires et neuropsychiques.
Pourquoi un SMR faible et pas insuffisant ?
Indépendance ne veut pas dire compétence. La décision s’est forcément faite avec une dimension économique. Ces produits continuent à être remboursés et rapportent de l’argent aux différents laboratoires concernés. Entre 2006 et 2009, la Cnam a dépensé un milliard d’euros pour leur remboursement… Un milliard pour des médicaments dont la pertinence est en cause. La décision de la HAS, c’est le verre à moitié plein ou à moitié vide.
Votre thèse soutenue l’été dernier a-t-elle joué un rôle dans les décisions du Pr Harousseau ?
Sans doute un peu. Cela dit, retirer des recommandations au compte-goutte sur pression des citoyens n’a pas beaucoup d’intérêt. La HAS n’a pas modifié totalement ses règles en matière de transparence. Les pouvoirs politiques n’ont rien créé qui sanctionne les manquements de transparence. On ne met pas de moyens ambitieux pour constituer des comités d’experts indépendants. Le Leem continue à être consulté par la Commission de la transparence. C’est la même chose que lorsqu’Areva est consulté sur les négociations entre le Parti socialiste et les Verts… La HAS n’a pas à demander son avis à l’industrie pharmaceutique.
(1) Ebixa (Lundbeck), Aricept (Eisai), Exelon (Novartis Pharma) et Reminyl (Janssen Cilag).
(2) Président de la Commission de la transparence.
(3) Le Formindep est une association de médecins qui milite « pour une formation et une information médicales indépendantes de tout autre intérêt que celui de la santé des personnes ».
(4) Deux recommandations sur la polyarthrite rhumatoïde, une sur les spondylarthrites, une sur les AVC, une sur la dépression chez l’adulte et une dernière sur l’HTA.
→ En date du 16 décembre (à l’heure où nous bouclons), la HAS publie une nouvelle recommandation “diagnostic et prise en charge” pour les maladies d’Alzheimer et apparentées. À lire sur www.has-sante.fr.