L'infirmière Libérale Magazine n° 278 du 01/02/2012

 

HYGIÈNE

L’exercice au quotidien

À la campagne comme à la ville, certains domiciles de patients ne sont pas forcément propres. Ce qui n’empêche pas Sylvie G., infirmière en milieu rural depuis huit ans, de trouver des solutions pour soigner.

« Soigner dans un domicile sale, pour moi, ce n’est pas vraiment plus compliqué. Parfois, je préfère, car les gens qui y habitent sont souvent très sympathiques ! Quand vous travaillez dans le lien et que vous arrivez dans une maison d’exposition “nickel”, vous avez parfois l’impression qu’il n’y a pas de vie.

Il m’est souvent arrivé d’aller dans une ferme isolée, chez des gens adorables, faire une INR au monsieur, en fauteuil. Ils m’accueillaient constamment avec le sourire, toujours prêts à m’offrir le café. Devant la porte d’entrée, il fallait passer devant les poubelles de la semaine. Dans la cuisine, il y avait des chats, des poules… et des milliers de mouches ! Je comprends que cela puisse choquer au premier abord. Mais, quand on prend le temps d’aller à la rencontre de la personne, on entre dans une autre dimension, moins matérielle.

En ville, des gens vivent également dans des conditions déplorables. Ils ont pourtant des sanitaires, l’eau courante, tout… Quand on ouvre la porte, la main reste collée à la poignée et l’odeur monte jusqu’au fond des narines. Mais, en tant qu’infirmière, il est nécessaire de faire abstraction. On a un soin à prodiguer, il faut passer au-dessus du reste. Et s’adapter. Avec l’expérience, cela devient plus facile. En tant que libérale, je n’ai rien à dire sur leur choix de vie. En revanche, je peux parfois donner des conseils, comme “faites attention, votre pied risque la gangrène puis l’amputation”.

Dans beaucoup de maisons, cela ne sert à rien que je me lave les mains avec le savon qui traîne depuis des lustres au bord de l’évier : j’utilise le gel hydroalcoolique ! Et je m’organise pour faire ma tournée dans ces maisons en dernier ou juste avant de repasser au cabinet me laver les mains ou changer de vêtements. En guise de mallette, j’ai un sac en bandoulière que je garde tout le temps à l’épaule. Pour les prises de sang, les petits soins, on se débrouille. Sinon, je prends une chaise et je déplie un champs stérile dessus pour poser le set à pansements. Je travaille avec des pinces, avec les mains propres, plus rarement avec des gants. Tout le reste, je l’ai dans ma mallette, à l’épaule. Si je prends un flacon d’alcool, je le range directement, sans le poser, pour éviter d’amener des microbes aux autres patients. Finalement, contrairement aux idées qu’on peut s’en faire, les gens semblent très bien immunisés face à leur environnement… D’ailleurs, à force d’aller moi-même dans ces lieux, je pense l’être un peu. »

Avis de l’expert

La recommandation, des précisions utiles
Dr Alain Simavonian, chargé de projet pour la recommandation “Hygiène au cabinet médical et paramédical” de la HAS*

« Il n’existe pas d’études, ni de consensus d’experts sur les soins à domicile. Mais on doit se référer au texte de la recommandation publiée par la HAS dès lors qu’il apporte une réponse à une question précise. Au domicile, il faut trouver un compromis. Si c’est très sale, on essaie d’alerter une assistante sociale et/ou obtenir le passage d’une auxiliaire de vie. Le lavage des mains reste primordial. Mécanique en arrivant et en repartant du domicile et, si elles sont manifestement souillées, à défaut et en cours de réalisation du geste, on utilise une solution hydro-alcoolique. La recommandation fournit, en fonction du geste à réaliser, des précisions utiles pour l’antisepsie, le port de gants, de masque et la protection individuelle. C’est le site de l’acte qu’il faut protéger. »

* Plus d’infos sur http://petitlien.fr/5s8k.