Cahier de formation
Savoir faire
Monsieur G. vous dit qu’il a des problèmes avec une ampoule au pied qui ne cicatrise pas.
Après avoir vérifié l’absence de sécheresse ou de mycose, vous nettoyez la plaie au sérum physiologique et vous lui recommandez d’éviter les appuis sur cette zone. Vous contactez le médecin pour la recherche d’une éventuelle artériopathie et vous conseillez à monsieur G. de demander au médecin une gradation de son risque podologique.
Le “pied diabétique” désigne toute affection touchant le pied en lien avec le diabète, toute lésion ouverte ou non. La gravité de ces lésions est marquée par la fréquence des amputations des membres inférieurs (cuisse ou jambe), dont plus de la moitié concernent les diabétiques. C’est un problème majeur de santé publique dû, entre autres, à l’absence de douleur et à une sous-estimation de l’importance de la prévention.
La neuropathie fait intervenir plusieurs mécanismes ?:
→ une perte progressive de la sensation de douleur due à l’atteinte des fibres nerveuses qui prive le patient de ce signal en cas de blessure ;
→ des troubles moteurs et de la sensibilité profonde responsables à la longue de déformations (pieds creux et orteils “en marteau” ou “en griffe”) qui provoquent des appuis anormaux où surviennent des ulcérations (voir encadré de la page ci-contre) ;
→ une sécheresse cutanée et un épaississement de la couche superficielle de l’épiderme à l’origine de durillons, callosités, crevasses ou fissurations ;
→ des œdèmes et troubles vasomoteurs responsables d’une fragilisation des os du pied, source d’ostéonécrose (mort d’un fragment de tissu osseux) et de fractures indolores, entraînant à leur tour un effondrement de l’arche interne du pied (pied de charcot). Cette déformation est responsable de maux perforants.
L’artérite des membres inférieurs, ou artériopathie oblitérante des membres inférieurs, est secondaire à l’athérome, favorisé par le diabète et les autres facteurs de risque cardio-vasculaire (tabagisme, hypertension artérielle et cholestérol). Elle conduit à l’obstruction des artères qui amènent le sang et l’oxygène jusqu’aux pieds (ischémie chronique). Une plaie, même minime, due au frottement d’une chaussure par exemple, aura du mal à cicatriser à cause d’un déficit en oxygène. Une surinfection peut alors entraîner en quelques heures une gangrène de l’orteil.
C’est l’ulcération par excellence. Un durillon se crée sur une zone d’appui de la plante du pied. En l’absence de douleur, le diabétique continue d’appuyer sur cette corne et provoque un ulcère. Les lésions tendent à s’infecter très rapidement avec un risque d’ostéite (infection osseuse). C’est souvent l’infirmière ou le pédicure qui découvre ce mal perforant en ouvrant la corne formée par le durillon (plus d’informations dans notre cahier de formation Le pied diabétique de L’ILM n° 253 de novembre 2009).
C’est le risque de se blesser sans s’en apercevoir (neuropathie) ou le risque de se blesser sans cicatriser normalement (artérite). La classification en grades ouvre droit aux remboursements par l’Assurance maladie (voir tableau).
À effectuer chaque jour :
→ laver les pieds à l’eau tiède, bien sécher entre les orteils pour prévenir les mycoses (éviter les bains de pieds prolongés). À cause de la perte de sensibilité, éviter les brûlures en touchant l’eau avec la main (prendre garde à une bouillotte, radiateur chauffant ou feu de cheminée) ;
→ changer de chaussettes (de préférence chaussettes en coton) ;
→ choisir des chaussures confortables (cuir souple, semelle épaisse et assez rigide). Chasser les corps étrangers (gravier, aiguille…) en glissant systématiquement la main dans les chaussures et les chaussettes. Préférer les chaussons fermés dans la maison ;
→ faire des mouvements d’assouplissement des pieds ainsi que des massages ;
→ en cas de peau sèche, hydrater les pieds pour éviter les fissures avec une crème hydratante neutre (Dexeryl, Neutrogena…). Sécher les espaces interdigitaux avec un papier absorbant ;
→ ne pas couper les ongles trop courts ni à angles droits, les limer plutôt que les couper, ou utiliser des ciseaux à bout rond. En cas de difficultés, s’en remettre à un pédicure ;
→ éviter les instruments contondants (ciseaux, bistouris, lames…) ;
→ en cas de blessure superficielle : laver à l’eau et au savon, utiliser une compresse fixée par une bande. Consulter en cas de plaie inflammatoire ou de cause inconnue. Vérifier la vaccination antitétanique ;
→ retirer la corne au niveau des points d’appui ou de frottement avec un instrument non agressif (pierre ponce) ;
→ examiner les pieds avec un bon éclairage et un miroir. En cas de lésion ou de rougeur, il faut avertir le médecin, même en l’absence de douleur.
L’Assurance maladie rembourse les soins et actes de prévention des patients diabétiques de grades 2 et 3 comprenant :
→ 4 séances par an au maximum pour des lésions de grade 2 ;
→ 6 séances par an au maximum pour les lésions de grade 3.
Ces séances sont prescrites par le médecin du patient diabétique.
Remboursement à 100 % si le patient est déjà pris en charge à 100 % par l’Assurance maladie. Dans les autres cas, le patient est remboursé à 60 %.
Que peut apporter l’infirmière libérale dans le suivi du patient ? L’étude Entred met en évidence que le suivi des patients diabétiques n’est pas optimal. L’Idel a un rôle de sentinelle par rapport au bilan annuel. Ainsi le patient pourra interpeller son médecin pour effectuer les examens manquants.
Que peuvent apporter les réseaux de diabètes aux Idels ? Les réseaux sont des lieux où les Idels peuvent poser toutes les questions sur la prise en charge des patients et du diabète. Les réseaux ont des fonctionnements différents, certains ont formé des Idels pour réaliser des bilans éducatifs partagés. C’est aussi un lieu de formation.
Pour trouver un réseau du diabète près de chez vous : Ancred, tél. : 06 81 03 51 40, www.ancred.fr.
La neuropathie et l’ischémie sont les principales complications entraînant les ulcérations du pied diabétique (UPD) qui précèdent environ 85 % des amputations (1 patient sur 5 présentant un UPD devra être amputé).
Facteurs de risque d’UPD :
→ existence d’une neuropathie périphérique ;
→ artériopathie oblitérante des membres inférieurs ;
→ présence de déformation(s) du pied ;
→ antécédents d’ulcération et/ou d’amputation.
* “Séances de prévention des lésions des pieds chez le patient diabétique, par le pédicure-podologue”, Haute Autorité de santé, 2007.