POLITIQUE DE SANTÉ
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SOCIÉTÉ → Manque de personnel correctement formé, méconnaissance de la Loi Leonetti, infirmiers libéraux mal rétribués en dépit d’une récente revalorisation… Le rapport rendu par l’Observatoire national de la fin de vie pointe le doigt sur de nombreux dysfonctionnements.
Le chiffre tombe comme un couperet : alors que deux tiers des malades en fin de vie nécessiteraient le recours aux soins palliatifs (SP), soit 322 000 par an, seul un tiers en bénéficie à l’hôpital. Et seulement 7 % aux services des urgences… C’est l’une des informations les plus frappantes contenues dans le rapport
C’est à la suite de l’affaire Chantal Sébire, du nom de cette femme atteinte d’une maladie incurable qui réclamait le droit à l’euthanasie, qu’a été créé l’Observatoire national de la fin de vie en 2010. L’objectif affiché à l’époque était de « dépassionner le débat ». Le moins que l’on puisse dire est qu’il n’est pas atteint. C’est en premier François Hollande qui a jeté un pavé dans la mare en invitant le débat sur l’euthanasie dans sa campagne présidentielle, s’affichant ouvertement pour une évolution de la loi française sur le sujet. Immédiatement contredit par Nicolas Sarkozy, il a remis la passion à l’ordre du jour. Dans le même temps, une autre campagne a terminé d’échauffer les esprits. Lancée par l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), celle-ci met en scène des photomontages représentant trois des candidats les plus opposés à une évolution de la Loi Leonetti, couchés dans des lits d’hôpital, visiblement proches de la mort. On est bien loin du contexte de sérénité nécessaire à la réflexion sur un tel sujet…
Parmi les points mis en avant par le rapport, un déficit de formation aux spécificités des SP chez les professionnels de santé, médecins comme infirmières, ce que confirme Guy Caugen, infirmier dans un service de médecine générale à l’hôpital de la Côte fleurie (Calvados) : « La formation aux SP devrait être obligatoire. Les jeunes diplômés qui arrivent dans notre service sont un peu perdus. » Du côté des infirmiers libéraux, le problème est le même, empiré par l’incompétence de certains médecins de ville, comme en témoigne Brigitte Boaglio, infirmière libérale à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) : « En fin de vie, il arrive qu’on doive surdoser certains médicaments pour le confort des malades. Les dosages semblent effrayants à certains médecins qui ne sont pas formés aux SP. Ils ont du mal à comprendre que nous ne voulons pas accélérer la fin de vie de nos patients, mais seulement les aider à moins souffrir. »
Les familles, elles aussi, supportent mal de voir leurs proches mourir à domicile. En France, environ 58 % des gens meurent à l’hôpital alors que la proportion est de 33,9 % aux Pays-Bas. Une disparité qui s’explique, selon Paulette Le Lann, présidente de l’association Jalmalv, par « l’évolution d’une société dans laquelle la plupart des adultes n’ont jamais vu un mort ». Mais aussi par l’isolement des familles. C’est la raison pour laquelle elle a créé cette association de bénévoles dont l’objectif est « d’accompagner les proches aussi bien que les malades ».
Sur le sujet des circonstances des décès et du recours à l’euthanasie, le rapport reste encore incomplet. Tous les acteurs du secteur attendent avec impatience une grande étude de l’Institut national des études démographiques (Ined) dont la publication est prévue en avril prochain. L’Observatoire fournit néanmoins une analyse précieuse de ce qui se fait dans le domaine chez nos voisins, comme la Belgique ou les Pays-Bas, par exemple. Les termes utilisés sont également choisis avec précision. « L’Observatoire national de fin de vie invite à ne plus employer les termes euthanasie “active” (pléonasme) ou euthanasie “passive” (terme qui n’a pas de sens et qui est source de confusion) », se félicite la Sfap selon laquelle une distinction claire est faite entre « l’arrêt des traitements inutiles et disproportionnés » et « l’euthanasie et le suicide assisté ». Des questions pourtant abordées par la loi Leonetti au sujet de laquelle le rapport déplore une mauvaise connaissance par le public et les professionnels de santé dans leur ensemble malgré ses sept ans d’existence (voir encadré à gauche).
Annoncée dans la même période, la revalorisation
C’est, du moins, l’avis de Valérie Violle, présidente d’une association
(1) Le rapport de l’Observatoire est téléchargeable sur http://petitlien.fr/5uue.
(2) Avenant concernant la revalorisation des actes infirmiers à lire sur http://petitlien.fr/5uuf.
(3) Ailapa, association des infirmiers libéraux d’Aix et du pays d’Aix.
→ Les directives anticipées
Celles-ci seront rédigées par le malade, pour le cas où il serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Il y sera fait état des souhaits de la personne concernant « les conditions de la limitation ou l’arrêt de traitement ».
→ La désignation d’une personne de confiance
Désignée officiellement par le malade « en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable », cette personne s’exprimera à sa place si celui-ci devient « hors d’état d’exprimer sa volonté ».
→ Pas d’acharnement
Le médecin a la faculté de suspendre ou de ne pas entreprendre des actes médicaux jugés « disproportionnés ou inutiles ».
→ Sauvegarder la dignité du mourant
Le devoir des soignants est d’accompagner par les soins palliatifs et d’accompagnement la qualité de la fin de vie du malade.
→ CAMPAGNE D’INFO
Le 22 mars dernier, l’association Jusqu’à la mort accompagner la vie (Jalmalv) a lancé une campagne “Droits des malades et fin de vie”. L’objectif est d’organiser partout en France « des débats citoyens de proximité » afin de contribuer au développement « d’une réelle culture de l’accompagnement ».
Plus d’infos sur www.jalmalv.fr.
→ MEETING
Les candidats Eva Joly et Jean-Luc Mélenchon ont participé le 24 mars à un meeting organisé au Cirque d’hiver par l’association ADMD afin de réclamer une « loi d’ultime liberté » pour légaliser « l’aide active à mourir ». 2 000 personnes étaient réunies.