L'infirmière Libérale Magazine n° 282 du 01/06/2012

 

Cahier de formation

Savoir faire

Madame B., visiblement désemparée, vous fait part de son désarroi : son époux, hypertendu et insuffisant cardiaque, soumis à un régime désodé, a perdu l’appétit. Elle se demande si elle ne pourrait pas acheter un “faux sel” dans un magasin de diététique pour rehausser le goût des plats qu’elle prépare à son mari…

Il convient d’être très prudent quant à l’achat des sels de régime. En effet, ce type de produit contient du potassium, ce qui peut déséquilibrer la kaliémie des patients et les exposer à des risques musculaires et cardiaques. Il est préférable de demander l’avis du pharmacien ou du médecin de monsieur B. et de tenir compte des traitements anti-hypertenseurs de ce dernier (les IEC, les ARA II et l’aliskiren étant des médicaments hyperkaliémiants).

CONSEILS HYGIÉNO-DIÉTÉTIQUES

Certaines règles hygiéno-diététiques doivent faire partie intégrante de la prise en charge de l’hypertension artérielle, et il est important que l’Idel les rappelle aux patients.

→ En cas de surcharge pondérale, insister sur l’importance de la réduction du poids, qui permet de réduire la pression artérielle de 5 à 20 mm de Hg par 10 kg de poids perdus.

→ Réduire les apports en sodium à 6 g/j (le régime sans sel au sens strict étant réservé aux insuffisants cardiaques ou rénaux) : éviter la consommation de chips, biscuits apéritifs, charcuteries, fromages secs, faire attention aux plats cuisinés et aux eaux minérales effervescentes de type Vichy St Yorre ou Vichy Celestin, riches en sodium.

→ Faire attention à la consommation de sels de régime sans avis médical préalable, car, si les sels diététiques permettent de rehausser le goût des aliments et ne contiennent pas de sodium, ils renferment en revanche du potassium, dont la teneur n’est pas négligeable. À titre d’exemple, le sel Xal contient 32 g de potassium pour 100 g de poudre.

→ Avoir une alimentation saine et équilibrée riche en fruits et légumes, et privilégier les graisses végétales riches en acides gras insaturés.

→ Limiter la consommation d’alcool (à 2 verres par jour chez la femme et 3 verres chez l’homme), de caféine et de réglisse (la racine de cette dernière contenant un saponoside, la glycyrrhizine, capable d’inhiber la dégradation du cortisol, et pouvant donc être responsable d’hypercorticisme et d’élévation de la tension artérielle en cas d’ingestion massive).

→ Pratiquer une activité physique régulière comme la marche à pied par exemple (30 minutes par jour dans l’idéal, selon les comorbidités du patient pouvant constituer des entraves à la marche).

→ Le cas échéant, insister sur l’importance de l’arrêt du tabac.

ADMINISTRATION DES MÉDICAMENTS

→ Avant tout, il est important qu’une Idel sache expliquer aux patients que, en cas d’une HTA diagnostiquée, il est nécessaire de suivre correctement leur traitement, même s’ils ne se sentent pas malades et qu’ils n’ont pas de signes cliniques. La bonne observance du traitement anti-hypertenseur est primordiale pour assurer une bonne prise en charge de l’HTA et prévenir les complications. En effet, l’inobservance peut être source d’échappements thérapeutiques, de consultations supplémentaires, voire d’hospitalisations.

→ Il est également important d’éduquer les patients à bien respecter les horaires de prise : ainsi est-il préférable d’administrer les diurétiques le matin pour éviter les levers nocturnes, de même il est préférable d’administrer les bêtabloquants liposolubles le matin ou à midi afin de limiter les problèmes de cauchemars et d’insomnie.

→ L’infirmière libérale, qui intervient auprès des patients âgés, joue un rôle important en termes d’administration des médicaments anti-hypertenseurs, en préparant les piluliers. Elle peut également établir des schémas de prise cohérents pour faciliter la bonne observance des traitements, limiter les effets indésirables et éviter les interactions médicamenteuses.

→ En cas d’oubli, il ne faut surtout pas doubler la dose lors de la prise suivante afin de rattraper l’oubli, car cela expose le patient à un risque d’hypotension.

PRÉVENTION D’UNE HYPOTENSION ORTHOSTATIQUE

→ Il est important d’éduquer les patients sous anti-hypertenseurs à pratiquer le lever en deux temps : passer de la position allongée à assise, puis debout.

→ Après avis médical, des bas de compression veineuse peuvent être prescrits. Ils permettent de lutter contre l’hypotension orthostatique, en favorisant le retour sanguin veineux. Dans cette indication, il est important de les porter dès le lever (ce qui sous-entend de ranger ses bas dans sa table de chevet, et de les enfiler dans la position assise du lever en deux temps).

GESTION DES AUTRES EFFETS INDÉSIRABLES

→ Si un patient hypertendu a l’impression de mal tolérer son traitement, il ne doit pas l’arrêter brutalement (car un arrêt intempestif pourrait provoquer un rebond de l’hypertension artérielle), mais, au contraire, signaler sans délai ces effets indésirables au médecin, qui décidera de la réévaluation éventuelle du traitement.

→ Inciter les patients à consulter en cas d’œdèmes de membres inférieurs, de toux sèche, d’impuissance, etc.

Hypotension orthostatique et facteurs de risque

→ L’âge constitue un facteur de risque d’hypotension orthostatique, puisque, chez un patient âgé, les barorécepteurs sont altérés : ce dernier a donc plus de mal qu’un adulte jeune à rééquilibrer les pressions lors des changements de position.

→ Le risque d’hypotension orthostatique augmente aussi en cas de diabète, d’hypertriglycéridémie, de maladies neurologiques comme la maladie de Parkinson, d’ambiance surchauffée, voire de canicule… Les femmes minces et longilignes sont également prédisposées à l’hypotension orthostatique.

→ Outre les anti-hypertenseurs, de nombreux médicaments sont susceptibles d’induire ou d’aggraver une hypotension orthostatique : les dérivés nitrés, les alphabloquants urinaires, certains neuroleptiques, les antidépresseurs tricycliques, les anti-parkinsoniens et les médicaments utilisés dans les troubles de l’érection, entre autres. Aussi est-il important d’informer les patients sur les risques de chutes et sur l’intérêt d’un lever en deux temps, notamment s’il s’agit de patients âgés et polymédicamentés.