Prévention
LE POINT SUR
Liée au vieillissement, la sarcopénie peut s’observer même chez un sujet bien portant, et représente à elle seule un facteur de vulnérabilité. Sa prévention constitue donc un véritable challenge de santé publique.
La sarcopénie est une diminution progressive de la masse musculaire squelettique avec l’âge, fragilisant la personne âgée.
Le diagnostic de sarcopénie est difficile à établir, car il doit tenir compte non seulement de la réduction de la masse musculaire (appréciée par la mesure de la circonférence brachiale et du mollet, et mesurée par absorptiométrie biphotonique aux rayons X, en utilisant le même appareil de mesure que celui de la densité osseuse minérale), mais aussi de l’altération de la fonction musculaire (en termes de force et de performance).
La perte musculaire physiologique est multifactorielle et aggravée par une dénutrition. Or 4 à 10 % des seniors vivant à domicile sont dénutris, en raison de modifications métaboliques et de leurs habitudes alimentaires.
Avec l’âge, on observe une réduction de l’activité physique et une sédentarité qui altèrent la fonction musculaire.
Chez la personne âgée, il y a un déséquilibre entre les processus de synthèse et de dégradation des protéines musculaires. En effet, après un repas, la synthèse protéique est moins stimulée que chez un sujet plus jeune, probablement du fait de résistances à la fois à l’insuline et à l’effet stimulant de la leucine sur la synthèse protéique musculaire.
De plus, chez les personnes âgées, les acides aminés d’origine alimentaires sont séquestrés par les territoires splanchniques, c’est-à-dire qu’ils restent plus volontiers dans l’intestin et le foie, et sont donc moins disponibles dans la circulation générale pour participer à la synthèse protéique musculaire. L’anabolisme protéique diminue. Alors que, sous l’effet de certains médiateurs de l’inflammation, comme les cytokines, le catabolisme protéique et la protéolyse musculaire sont accrus chez le patient âgé, qui, à chaque épisode pathologique aigu, puise dans ses réserves musculaires. La dépense énergétique de la personne âgée se trouve donc augmentée. Ce phénomène est aggravé lors de stress physiques ou psychiques.
La synthèse d’hormones anabolisantes comme la testostérone, l’hormone de croissance et l’insulin-growth factor, diminue avec l’âge, ce qui pourrait expliquer la réduction de la masse musculaire.
Chez les personnes âgées, il y a une diminution de la consommation protéique du fait de troubles de l’odorat et du goût (l’appétence pour le salé, et notamment pour la viande, diminue en effet avec l’âge, au profit du sucré), de facteurs socio-économiques, d’un mauvais état bucco-dentaire qui peut constituer une entrave à la mastication et à la consommation de viande, de troubles cognitifs ou de troubles de la déglutition et de coordination main-bouche (notamment en cas de maladies de Parkinson ou d’Alzheimer).
Par ailleurs, la polymédication, fréquente chez le patient âgé, peut majorer les troubles de l’appétit.
La sarcopénie fragilise les personnes âgées et peut altérer leur qualité de vie.
La sarcopénie induit une fatigabilité, des difficultés motrices et un moindre équilibre qui augmentent les risques de chutes et de fractures, notamment du col du fémur.
Chez la personne âgée, du fait de la sarcopénie, il y a diminution de la masse maigre au profit de la masse grasse, ce qui peut avoir des répercussions sur les paramètres pharmacocinétiques des médicaments et être facteur de iatrogénèse médicamenteuse. En effet, la fonte musculaire modifie les volumes de distribution des médicaments, en particulier liposolubles. Les volumes de distribution et les demi-vies des médicaments liposolubles sont en effet augmentés chez la personne âgée, puisque la demi-vie dépend du rapport Volume de distribution/Clairance. Les médicaments liposolubles restent donc, chez le sujet âgé, plus longtemps dans l’organisme.
En outre, on note une baisse de sensibilité à l’insuline (les muscles étant un site de captation du glucose) et une baisse de la densité osseuse aggravant les conséquences d’une chute.
Elle provoque une altération du système immunitaire et un retard de cicatrisation.
Au contact des personnes âgées, l’Idel peut contribuer à la prévention de la sarcopénie en prodiguant des conseils pratiques ou en dépistant une dénutrition.
→ Lutter contre l’idée reçue des personnes âgées qui pensent qu’elles doivent moins manger de protéines car elles font moins d’exercice et, au contraire, augmenter les apports protéiques (1 à 1,2 g/kg/j contre 0,7 à 0,8 g/kg/j chez l’adulte jeune).
→ Éviter des périodes de jeûnes nocturnes trop longue en retardant l’horaire du dîner et en avançant celui du petit déjeuner.
→ Promouvoir une activité physique régulière, qui permet de conserver la masse musculaire et qui stimule l’appétit.
→ Conseiller des visites régulières chez le dentiste afin de vérifier l’état bucco-dentaire et prévenir les difficultés de mastication.
L’Idel est bien placée pour dépister une dénutrition et, le cas échéant, orienter les patients vers un médecin pour corriger cette dénutrition, par des compléments nutritionnels oraux hyperprotidiques (Fortimel, Resource, Clinutren HP…). Hormis une perte de poids sur la balance (supérieure ou égale à 5 % en 1 mois ou 10 % en 6 mois) et un IMC (indice de masse corporel) inférieur à 21, certains signes évidents doivent alerter l’Idel, comme la nécessité de serrer davantage sa ceinture, une jupe qui tourne, etc.
Il convient d’être très vigilant en cas de facteurs de risque de dénutrition (dépression, deuil, veuvage, isolement, démence d’Alzheimer, événements intercurrents de type diarrhées ou vomissements…).
Sources : Impact Pharmacien n° 230 du 30 sept. 2009, pp. 40 à 46, “Aider les seniors à ne pas entrer dans le cercle vicieux de la dénutrition” ; Actualités Pharmaceutiques n° 515 d’avril 2012, pp. 32 et 33, “Les troubles iatrogènes du goût” ; www.institutdanone.org, “La sarcopénie : une nouvelle préoccupation de santé publique” ; www.senioractu.com, “Nutrition, vieillissement et muscle : sarcopénie ou sarcoporose ; Vidal Recos, 4e édition, p 2100, “Enrichissement alimentaire chez la personne âgée”.
→ La polymédication nécessite l’ingestion de plusieurs verres d’eau pouvant couper l’appétit, surtout si l’administration a lieu en début de repas.
→ Par ailleurs, bon nombre de médicaments peuvent induire des dysgueusies (troubles du goût), voire des agueusies (pertes du goût) comme les anticancéreux, la metformine (Stagid, Glucophage), le métronidazole (Flagyl), les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, un antithyroïdien de synthèse (Thyrozol), un antifongique (la terbinafine). C’est le cas aussi des nombreux médicaments exerçant un effet anticholinergique (antidépresseurs imipraminiques, neuroleptiques, anti-histaminiques, anticholinergiques urinaires comme Ditropan…), qui provoque une sécheresse buccale.
→ Enfin, il faut tenir compte des nausées induites par certains médicaments : anti-épileptiques, antiparkinsoniens, anticancéreux, antidépresseurs…