Échappées
Elles ont embarqué avec quelques effets et la photo de leur promis pour un voyage sans retour. Certaines n’avaient jamais vu la mer est un sublime roman dédié aux Japonaises qui ont immigré aux États-Unis en 1919, fuyant la pauvreté. Las ! La réalité ne fut pas bien tendre avec elles : les beaux maris ne ressemblaient pas aux photos et les professions vantées par les marieuses n’étaient que mirages. Une vie d’ouvrières agricoles les attendaient, une vie de misère souvent, d’exilée toujours. Jusqu’au pire : l’internement dans des camps à partir de 1942, et jusqu’à la fin de la guerre, en représaille de l’attaque de Pearl Harbor… De sombres pages de l’Histoire qui sortent de l’oubli : on entendra longtemps résonner les chœurs de ces déracinées.
Julie Otsuka, Certaines n’avaient jamais vu la mer. Phebus, 2012. 144 pages, 14,25 euros.
Cette rentrée littéraire nous offre un roman on ne peut plus addictif. Prenez deux trentenaires plus bohèmes que bourgeois, qui décident de vivre ensemble. La distribution paraît simple, sauf que, pour obtenir un toit à Paris, il leur faudrait deux CDI et gagner l’équivalent de trois fois le loyer… Pour sauver la mise, et un peu par hasard, Cyril et Pauline vont donc plonger dans l’univers du poker. Le milieu du jeu est décrit avec un tel réalisme qu’il réveillera l’âme de joueur de chaque lecteur. Un roman à ne pas mettre entre toutes les mains. Quoique…
Julien Capron, Trois fois le loyer. Flammarion, 2012. 380 pages, 20 euros.
Après 56 années de vie commune, Zika et Joseph sont contraints d’abandonner leur maison et de se séparer, car Zika doit se faire suivre à Paris pour des problèmes cardiaques. Leur fille Isabelle n’étant pas en mesure de les loger tous les deux, Joseph part habiter chez leur fils à Montfort. Mari et femme réapprennent à vivre chez leurs enfants, non sans douleur… Pour vaincre la distance, ne connaissant pas Internet et très peu le téléphone, le couple se lance à corps perdu dans l’échange de lettres : mots d’amour, de peur, d’espoir. On recommande ce roman épistolaire pour sa grande originalité de thème et de ton. Jusqu’à la dernière ligne.
Frédérique Martin, Le vase où meurt cette verveine. Belfond, 2012. 221 pages, 18 euros.