Cahier de formation
Savoir faire
M. H., 53 ans, vient pour se faire injecter le vaccin Revaxis (Diphtérie/tétanos/poliomyélite). Il n’a pas reçu de vaccin depuis 1994 et se demande pourquoi le médecin ne lui a prescrit qu’une seule dose. Étant donné le délai, ne doit-il pas recommencer la vaccination depuis le début ?
Non, c’est inutile, l’organisme garde en mémoire les doses précédentes. Une dose de rattrapage suffit pour relancer la production des anticorps à un taux protecteur. Incitez-le par contre à un meilleur suivi de ses vaccins, le nouveau calendrier vaccinal électronique s’avère très utile pour ne plus oublier les rappels.
Quand un patient n’est pas à jour de ses vaccinations (négligence, manque d’information, fausses “contre-indications” à la vaccination…), il est possible de lui proposer un rattrapage.
Deux règles à connaître :
→ chaque dose compte, une vaccination initiée ne doit pas être recommencée depuis le début, mais juste complétée par les doses qui manquent ;
→ quand plusieurs doses sont nécessaires, un intervalle de quatre semaines au moins (parfois trois) est nécessaire entre deux doses d’un même vaccin.
Seule une démarche informative et éducative basée sur des connaissances solides permet de sensibiliser à l’intérêt d’atteindre de bonnes couvertures vaccinales. Le guide des vaccinations 2012 (voir partie Savoir plus p. 50) propose ainsi aux professionnels de santé une démarche éducative.
Saisir toutes les opportunités pour aborder le sujet avec vos patients ?: soins d’une brûlure /blessure (« Êtes-vous à jour dans votre vaccination contre le tétanos ? »), approche de l’hiver (« Pensez à la vaccination contre la grippe ! »)…
Il s’agit, si le patient n’est pas à jour, de comprendre pourquoi. « Quelque chose vous chagrine dans la vaccination ? », « Pensez-vous être protégé contre les maladies évitables par les vaccins ? » permettent au patient d’exprimer des réticences (« J’ai peur des effets indésirables… », « On ne sait pas comment c’est fabriqué… ») ou son manque d’intérêt (« À mon âge, c’est inutile… », « La grippe ne me tuera pas ! »)
→ En cas de réticences, les écouter puis apporter des éléments validés : les vaccins sont élaborés avec le même soin que tout autre médicament, des dizaines de contrôles sont effectuées…
→ En cas de manque d’intérêt : rappeler les bénéfices de la vaccination, les risques éventuels de la maladie, l’enjeu d’une couverture suffisante dans la population…
Voir l’encadré ci-dessous.
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) estime, selon un rapport sur l’état de santé de la population (2009-2010), que plus de 50 % des adultes n’ont plus aucun document sur lequel seraient reportées leurs vaccinations.
Les patients sont de plus rebutés par la complexité du calendrier vaccinal et finissent souvent par ne plus se vacciner du tout. L’infirmière libérale peut les aider.
Reprendre avec les traces des vaccinations précédentes, les comparer aux recommandations actuelles et déterminer les vaccins qui sont à faire et à quel moment.
Un calendrier de vaccination individuel à remplir et conserver peut être téléchargé gratuitement (www.semaine-vaccination.fr>Documents et outils> Professionnels>Le guide calendrier vaccinal des adolescents et des adultes / Carnet de vaccination individuel, mise à jour 2012).
À savoir : en cas de doute sur des vaccins antérieurs ou des antécédents, certaines sérologies peuvent être réalisées afin d’éviter des revaccinations obligatoires.
Conçu à l’initiative du groupe d’experts d’étude en préventologie (GEP), le carnet de vaccination électronique ou CVE est un carnet de vaccination qui peut être rempli via Internet. Une fois validé par un professionnel de santé, il a un caractère tout aussi légal que les carnets/certificats “papier”.
Le carnet est :
→ personnalisé et intelligent : il intègre non seulement l’âge des individus, mais aussi leurs particularités (profession, état de santé, grossesse ou de désir de grossesse, mode de vie…) et propose à chacun les vaccinations adaptées ;
→ évolutif : le carnet prend en compte les dernières recommandations en vigueur (qui peuvent différer de celles énoncées dans les AMM des vaccins) ;
→ sécurisé : le site Internet offre un hébergement agréé des données de santé ;
→ officiel : le carnet peut être partagé avec des professionnels de santé qui le valident et le rendent ainsi officiel.
Il permet :
→ de pallier les pertes (fréquentes) des documents papiers ;
→ de recevoir par mail et/ou par SMS les dates des rappels vaccinaux à effectuer ;
→ d’accéder à un historique à jour et d’éviter ainsi les injections inutiles, notamment en cas de situation d’urgence (à l’hôpital, par exemple) ;
→ de retrouver très vite les patients concernés lorsqu’un lot de vaccin présente un problème.
• Avantages pour le patient
→ Il se rend seul ou avec un professionnel de santé sur le site Internet mesvaccins.net.
→ Il peut créer gratuitement un compte individuel pour lui et/ou sa famille et renseigner les différentes rubriques concernant sa situation médicale, son mode de vie, sa profession, son âge, ses vaccinations déjà effectuées, son adresse mail et éventuellement son téléphone pour l’envoi des rappels.
→ Il obtient un code de partage qu’il pourra communiquer à un ou plusieurs professionnels de santé qui auront un accès sécurisé à son dossier.
• Avantages pour le professionnel
→ Il peut créer un compte sur le site (“Accès professionnel”). La licence annuelle pour les professionnels coûte 30 euros. Cette participation des professionnels aux frais de gestion du site permet son indépendance (pas de publicité ni de partenariat labo). L’espace professionnel donne en outre accès à de multiples avantages : recommandations vaccinales adaptées aux caractéristiques individuelles des patients, information de toute nouveauté vaccinale, liste des noms commerciaux de vaccins selon des critères individuels, accès au site MedecineDesVoyages.net pour des informations personnalisées et à jour aux voyageurs…
→ Il s’authentifie sur le site (“Accès professionnel”) grâce à sa CPS (Carte de professionnel de santé).
→ Il renseigne le code de partage donné par son patient. Il peut alors modifier/ajouter des nouveaux actes vaccinaux, valider les actes saisis par le patient. Le CVE du patient est ainsi authentifié et acquiert une valeur légale.
→ Le patient garde le contrôle de l’accès à son carnet, il en autorise l’accès aux professionnels de son choix et peut révoquer l’accès comme bon lui semble.
→ Le patient a la possibilité d’imprimer son carnet, mais seules les données validées par un professionnel apparaissent.
→ Seuls les médecins peuvent valider/modifier le “profil santé” (antécédents de maladies…).
→ Les données de couverture vaccinale ne sont communiquées qu’aux autorités sanitaires.
Les livrets Questions de vaccinations à remettre au patient apportent les réponses aux questions les plus fréquentes sur la vaccination.
La version 2012 du Calendrier vaccinal simplifié est disponible sous forme de carte postale, en français mais aussi en anglais, espagnol, roumain, arabe, chinois, turc, en russe et même en braille. Ces documents et autres outils peuvent être consultés, téléchargée et commandés gratuitement sur le site www.inpes.sante.fr.
Le disque calendrier vaccinal 2012 permet de connaître rapidement, en fonction de l’âge, les vaccins obligatoires et recommandés pour une couverture immunitaire optimale. Il informe également sur les rappels, les vaccinations spécifiques et la marche à suivre en cas de retard.
Modalités de commande (gratuite) sur le site www.inpes.fr. Cliquer sur Espaces thématiques > Vaccination > Publications professionnels > Divers outils > Calendrier vaccinal 2012-Disque.
Hélène Royer, infirmière de santé publique, ARS d’Aquitaine, délégation territoriale d’Agen (47)
« Les infirmières sont un relais important d’informations sur la vaccination, en particulier dans les zones rurales et auprès des adolescents et jeunes adultes qui sont peu malades et fréquentent peu les établissements de santé. Quand elles sont appelées pour un soin, elles sont un point de contact privilégié avec ces populations qu’on a plus de mal à capter. Elles peuvent saisir ces occasions pour rappeler les injections à faire, notamment celle de la coqueluche ou de la rougeole. Elles peuvent relayer les informations du calendrier vaccinal par des outils comme des calendriers, des flyers mais aussi s’impliquer dans l’outil innovant qu’est le carnet de vaccination électronique et qui sera sans doute à terme intégré au DMP. »
Hélène Royer, infirmière de santé publique, ARS d’Aquitaine, délégation territoriale d’Agen (47)
« Parler vaccination ne veut pas dire convaincre à tout prix. À mon sens, il faut aborder le sujet comme un entretien motivationnel, on discute, on voit où éventuellement ça bloque, quelles sont les réticences, tout cela pour comprendre où se situe le patient, puis on part de là pour tenter d’avancer. On essaie de débloquer et, progressivement, on avance au stade suivant, l’idée étant de sensibiliser aux intérêts de la vaccination et d’amener à une décision du patient lui-même. Sans lui cacher les éventuels effets indésirables, car des douleurs au point d’injection et de la fièvre sont possibles. Mais ils sont à mettre en balance avec les risques des maladies qu’on ne connaît plus : la coqueluche et la rougeole peuvent tuer en France, il faut aussi le rappeler. De plus, se vacciner est un acte citoyen qui permet de se protéger et de protéger les autres. »
Dans son rapport du 25 mai 2012, le Haut Conseil de la santé publique approuve globalement le programme national d’amélioration de la politique vaccinale 2012-2017.
Parmi les actions retenues prioritaires :
→ simplification du calendrier vaccinal, notamment réduction du nombre de doses injectées et rappels à âge fixe chez l’adulte ;
→ simplification de l’accès aux données, notamment via le carnet de vaccination électronique ;
→ sensibilisation dans les lieux de vie (établissements scolaires, entreprises…) ;
→ simplification du parcours vaccinal en libéral ;
→ promotion de la formation des professionnels de santé parmi lesquels « l’enseignement des professionnels infirmiers et sages-femmes est à développer en priorité compte tenu des modifications récentes concernant leurs responsabilités dans la vaccination et les réticences identifiées à l’occasion des épidémies récentes » ;
→ plus de transparence en facilitant « le recueil et l’analyse des données de pharmacovigilance des vaccins et de les porter à la connaissance du public ».
Des réflexions seront également menées, concernant :
→ la gratuité des vaccins ;
→ la redéfinition des notions de vaccinations obligatoires ou recommandées.