Cahier de formation
Savoir faire
M.J. est un patient rétentioniste qui pratique l’autosondage urinaire pour vidanger sa vessie. Il a appris récemment cette technique à l’hôpital. Aujourd’hui, il vous fait part de douleurs lors de l’insertion de la sonde et vous demande si cela est normal.
L’autosondage est en principe indolore. Il convient donc dans un premier temps de vérifier que M.J. a acquis les bonnes pratiques du sondage. Il doit s’installer dans une position confortable afin d’être le plus détendu possible. Le sondage masculin est assez délicat, car, chez l’homme, l’urètre est long et courbé : il faut soulever la verge pour supprimer la courbure pénoscrotale avant d’introduire la sonde, puis la faire progresser doucement, en abaissant la verge pour passer le sphincter strié.
D’autre part, il convient de s’assurer que les sondes utilisées par M.J. sont bien adaptées, tant en termes de charrière (diamètre interne) qu’en termes de forme : une sonde béquillée olivaire peut faciliter le sondage masculin en cas de rétrécissement urétral. Enfin, il faut aussi envisager le cas d’une infection urinaire, qui pourrait expliquer ces douleurs.
Les sondes sont caractérisées par :
→ leur longueur : un sondage masculin requiert une sonde plus longue (40 à 45 cm) qu’un sondage féminin (18 à 22 cm).
→ leur diamètre interne exprimé en charrière (CH). Une charrière correspond à un tiers de mm. Ainsi une sonde 12 CH a un diamètre interne de 4 mm. En général, pour un adulte, on utilise les charrières 12 ou 14 et, pour un enfant, une sonde de charrière 6 ou 8. La couleur de l’embase à l’extrémité proximale (qui sera au contact de la main pendant le sondage) correspond à la charrière de la sonde (pour exemples, une embase bleue correspond à 8 CH, noire à 10 CH, blanche à 12 CH, verte à 14 CH, orange à 16 CH, et rouge à 18 CH, quel que soit le laboratoire fabriquant).
→ leur extrémité distale (extrémité qui sera en contact avec le méat urinaire lors de l’introduction de la sonde), dont la forme détermine le nom de la sonde (voir schéma page ci-contre). Les sondes droites (de type Nelaton) sont plus adaptées au sondage féminin, tandis que les sondes béquillées de type Mercier ou Tiemann correspondent davantage à un sondage masculin (l’urètre masculin ayant une forme coudée). Les sondes à ballonnet (sonde de Foley) sont utilisés pour les sondages à demeure.
→ Ce geste est réalisé par un infirmier. Mais la première pose de sonde vésicale chez un patient masculin est un geste médical.
→ Il peut s’agir d’un sondage à demeure, consistant à introduire et à laisser en place dans la vessie une sonde pour permettre l’écoulement de l’urine, qui sera recueillie en continu dans une poche collectrice, ou de sondages intermittents. L’incontinence urinaire n’est pas une indication de sondage vésical à demeure. En cas de rétention chronique, les sondages intermittents doivent être préférés au sondage à demeure autant que possible, car ils entraînent moins d’infections urinaires que le sondage à demeure.
→ Si l’indication d’un sondage à demeure est posée, l’utilisation du système clos est impérative quelle que soit la durée du sondage, pour éviter une bactériurie. Le risque infectieux est plus important chez la femme, dont l’urètre est plus court que celui de l’homme et dont le méat urinaire est proche du vagin et de l’anus.
→ Le système clos représente tant un matériel qu’un principe, il est obligatoire quelle que soit la durée du sondage à demeure. Sondes et collecteurs sont stériles. Ils sont assemblés avant la pose et ne doivent jamais être déconnectés. L’ensemble est connecté par l’opérateur avant la pose ou est conditionné sous forme de kit déjà connecté par le laboratoire fabriquant. La vidange du collecteur s’effectue aseptiquement par le robinet inférieur.
→ Le sondage à demeure utilise des sondes de Foley, dont le ballonnet sera dilaté en utilisant de l’eau stérile (proscrire le sérum physiologique qui peut cristalliser et détériorer la sonde). Les sondes en latex ne sont pas recommandées car les urines les dégradent rapidement, même si le sondage est de courte durée (inférieure à 8 jours). Il est préférable d’utiliser des sondes en latex enduit de silicone, mais il faut tenir compte du risque d’allergie au latex. En cas de sondage de longue durée, les sondes les mieux tolérées et recommandées sont celles en silicone pure.
→ La sonde sera fixée sur la cuisse chez la femme. Chez l’homme, elle sera fixée sur l’abdomen pour respecter l’angle anatomique de l’urètre masculin et prévenir l’érosion de ce dernier, ou sur la cuisse si le patient est valide.
On parle d’autosondage quand le patient se sonde lui-même afin d’assurer la vidange régulière et pluriquotidienne de sa vessie, en cas de rétention urinaire, qui ne permet plus une évacuation naturelle des urines.
L’autosondage est prescrit par un urologue et est précédé de plusieurs hétérosondages, afin d’éduquer parfaitement le patient à cette technique. La mise en place de la sonde s’effectue de manière propre mais non stérile. La notion d’autosondage intermittent propre remonte aux années 1970, quand le Dr Lapides, urologue américain, a affirmé que la fréquence des sondages était plus importante que la stérilité. Le patient n’a pas besoin de porter de gants. Il faut cependant se laver soigneusement les mains avant et après de pratiquer le sondage.
Il convient de faire 5 ou 6 sondages intermittents par jour, et notamment un au réveil, ainsi qu’un au coucher pour éviter les sondages nocturnes. Le volume des sondages doit être compris entre 300 et 400 ml, pour éviter la distension vésicale qui favorise les infections urinaires. Si le volume recueilli est supérieur à 500 ml, il faut augmenter la fréquence des sondages.
Le patient peut se sonder au-dessus des toilettes ou peut adapter sur l’embase de la sonde un dispositif de recueil d’urine, ce qui lui permet de se sonder en position assise sur un fauteuil (cas de patients à mobilité réduite, paraplégiques, ou de patients qui ne sont pas encore très à l’aise avec l’autosondage, car cette position est plus confortable). L’autosondage peut aussi être réalisé au lit. L’utilisation d’un miroir peut aider les femmes à repérer leur méat urinaire. Si par erreur la sonde a été introduite dans le vagin, il faut impérativement changer de sonde. Chez l’homme, il faut insérer la sonde en soulevant la verge vers l’estomac pour effacer la courbure de l’urètre qui a une forme de S. Selon la technique “non-touch”, il faut faire bien attention à ne pas toucher la sonde avec les mains, mais seulement l’embase. Si nécessaire, une compresse stérile peut être utilisée. Une sonde dont l’emballage est déchiré ne doit pas être utilisée, ni une sonde tombée au sol.
Pour l’autosondage intermittent, on utilise des sondes en PVC (chlorure de polyvinyle) semi-rigides et sans ballonnet. De nos jours, les laboratoires fabriquants proposent des sondes courtes et rigides, autolubrifiées et prêtes à l’emploi, discrètes à emporter avec soi, et facilitant l’autosondage grâce à leur longue embase, qui constitue une véritable poignée de préhension, et évite le contact main-sonde; ainsi que des sondes munies d’un dispositif d’introduction, permettant d’éviter le contact de la sonde avec les germes présents dans le premier centimètre de l’urètre. Les fabricants proposent également des lingettes pour la toilette génitale avant sondage. Chez la femme, il faut effectuer cette toilette intime d’avant en arrière, pour éviter de ramener des germes d’origine vaginale ou anale vers le méat urinaire.
La détermination du bon diamètre de la sonde est importante, car la charrière choisie doit procurer confort au patient, mais doit également permettre d’assurer un débit suffisant. Si le sondage est douloureux, la charrière est peut-être trop élevée et la sonde irrite l’urètre. Mais, s’il y a des fuites pendant un sondage, cela signifie que le diamètre de la sonde est trop petit.
Sauf indication contraire du médecin, les infirmiers sont, depuis 2007, autorisés à prescrire des sondes vésicales pour autosondage et hétérosondage, lorsqu’ils agissent pendant la durée d’une prescription médicale d’actes infirmiers et dans l’exercice de leur compétence.
L’ordonnance doit préciser le nombre de sondes, la marque ou le matériau (PVC, silicone…), la forme (droite, béquillée, ou Nelaton, Mercier ou Tiemann…), la charrière, la longueur. En cas de doute sur la charrière et la longueur, il faut penser à préciser si le patient est un homme, une femme ou un enfant.
Les sondes sont remboursées par la Sécurité sociale.
Ce geste est réalisé par un infirmier. Mais la première pose de sonde vésicale chez un patient masculin est un geste médical.
→ Boire 1,5 à 2 litres d’eau/jour afin d’assurer une diurèse suffisante.
→ En cas de sondage à demeure : veiller à l’absence de coudure de la sonde et de la tubulure de raccord à la poche collectrice, s’assurer que le collecteur est bien en dessous du niveau de la vessie. La nuit, ou dans le cas d’un patient alité, l’utilisation d’un support de poche de recueil (fixé au lit) évite que la poche ne soit en contact avec le sol. La survenue d’une hyperthermie peut faire craindre une infection urinaire, et doit être signalée au médecin.
→ En cas d’autosondages intermittents : bien se laver les mains avant et après les sondages. Apprendre aux patients à reconnaître les signes d’infection urinaire (température, fatigue, sensation de malaise général, fuites urinaires) et à les signaler au médecin. En cas de suspicion d’infection urinaire, augmenter les apports hydriques et réaliser 1 à 2 sondages quotidiens supplémentaires. Consulter impérativement un médecin en cas de survenue de saignements abondants (qui pourraient être d’origine vésicale) ou itératifs et persistants.
« Il faut veiller au confort physique et psychologique du patient, respecter son intimité et sa pudeur, et suivre scrupuleusement les règles d’asepsie, comme le lavage antiseptique (ou la friction hydro-alcoolique) des mains, la toilette intime du patient à l’eau et au savon doux, suivie d’une toilette antiseptique, le port de gants stériles. Pour tout sondage à demeure, il faut utiliser le système clos, et veiller à ne pas désolidariser la sonde de la poche collectrice. L’objectif est de laisser une sonde à demeure le moins longtemps possible pour prévenir le risque infectieux. Il est aussi important de donner certains conseils aux patients et à leur entourage : la poche ne doit pas toucher par terre, elle ne doit jamais être placée au même niveau que la vessie, mais en déclive (pour empêcher les reflux), et il faut la vider dès qu’elle est remplie aux 2/3, pour éviter qu’elle ne devienne trop lourde et ne tire sur la tubulure et la sonde (ce qui pourrait léser l’urètre), mais aussi pour limiter les proliférations bactériennes. »
À l’hôpital, j’ai entendu parler des “œils de sonde”. De quoi s’agit-il exactement ?
Il s’agit des orifices situés à l’extrémité distale de la sonde. Ces orifices, terminaux (au bout de la sonde) ou latéraux, permettent l’écoulement de l’urine dans la sonde en vue de son évacuation. Au pluriel, on ne dit pas les yeux de la sonde, mais bien les œils !
« La pudeur doit être respectée, car on touche à l’intimité, et il faut surmonter l’appréhension du patient. La réussite de l’autosondage dépend de la qualité de l’éducation thérapeutique, qui doit être personnalisée, et de la bonne compréhension par le patient des bénéfices de cette pratique en termes de qualité de vie. L’autosondage permet d’acquérir une autonomie, d’avoir davantage d’activités, de pouvoir sortir sans être tributaire de quelqu’un. Quand le patient a compris cet intérêt, il accepte ce soin. Et quand il a acquis la bonne technique, il est fier de démontrer ses acquisitions ! »