L'infirmière Libérale Magazine n° 287 du 01/12/2012

 

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QUÉBEC → Les infirmières d’une douzaine de Centres de santé et de services sociaux à Montréal effectuent des actes… minutés !

Huit Centres de santé et de services sociaux (CSSS)(1), à Montréal, expérimenteraient sur les soins à domicile une adaptation de la méthode “Toyota”, développée par une firme-conseil en gestion, la bien nommée Proaction. Alertés par des syndicats d’employés, nos confrères de La Presse et Le Devoir(2) ont révélé, début novembre, l’existence d’une grille de “planification et de réalisation” sur laquelle tous les actes, de l’administration d’un gavage à une intervention psychosociale, sont rigoureusement minutés.

Citons quelques exemples : pas plus de quinze minutes par infirmier pour le lavage d’une oreille, deux oreilles vingt minutes, un soin de plaie simple pas plus de quinze minutes, et trente minutes, pas plus, pour un suivi “post-décès”. « J’ai l’impression de travailler sur une chaîne de montage de conserves de tomates », leur a confié une infirmière.

Le temps, c’est de l’argent

Rentabilité oblige, sur le terrain, les ergothérapeutes seraient invités à ne pas intervenir auprès des patients en situation de détresse psychologique, activité jugée trop chronophage, et à transférer la tâche au travailleur social. Autre travers, si un employé n’a pas été en mesure d’effectuer sa tâche dans les délais prescrits, il doit en expliquer “les motifs” à ses supérieurs, lesquels rapporteront “les erreurs de minutage” à leurs propres supérieurs. Une infantilisation dont les infirmiers et les travailleurs sociaux se passeraient bien.

Contacté par les médias québécois, le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, le Dr Réjean Hébert, s’est dit « préoccupé » mais pas prêt pour autant à condamner les projets d’optimisation des services de soins à domicile, grand chantier du moment. Le patron de Proaction a quant à lui préféré parler d’une « résistance au changement de la part du personnel, dans un contexte de courbe émotionnelle à la hausse ».

(1) Le gouvernement du Québec a adopté en décembre 2003 la Loi sur les agences de développement des réseaux locaux de services de santé et de services sociaux. Au cœur de chacun des réseaux locaux de service, on trouve un établissement appelé CSSS et, dans la majorité des cas, un centre hospitalier. En 2011, le nombre de CSSS était de 94, tous chargés de promouvoir la santé et de rendre son accès plus accessible, mieux coordonné et continu.

(2) À suivre sur les sites d’actualité de La Presse (www.lapresse.ca) et Le Devoir (www.ledevoir.com).