Formation initiale
le débat
Depuis la réforme de leur formation, les étudiants en soins infirmiers voient apparaître dans leur cursus des enseignements sur supports numériques. Le phénomène, qui avait démarré du côté de Bordeaux, s’étend peu à peu. Ce qui suscite des remous dans certaines régions, comme récemment en Paca.
chargé de mission auprès du président de l’université de Bordeaux Segalen pour les formations paramédicales
Suite à une décision des pouvoirs publics en 2009, l’université s’est vue confier la responsabilité d’unités d’enseignement en soins infirmiers. Or, dans la région Aquitaine, nous avons 15 Ifsi, dont un à plus de 50 kilomètres de Bordeaux, cinq à plus de 100 kilomètres et trois autres à plus de 150 kilomètres. L’université ne pouvait pas y envoyer des enseignants. Deux possibilités ont été envisagées par des représentants des Ifsi, de l’université et du Conseil régional. La première solution était d’instaurer des visioconférences, mais elle a été abandonnée pour des raisons pratiques (périodes de stage différentes, problèmes techniques). Nous nous sommes donc tournés vers l’autre solution, qui consistait à enregistrer des cours et à les diffuser.
Un peu plus de 150 heures de cours sur trois ans ont été gravées sur DVD. Lesquels ont été transférés aux Ifsi. Ces cours sont aussi téléchargeables sur le site Web de l’université. Pour l’année 2010-2011, 103 cours ont été vus plus de 62 000 fois, soit un total d’environ 30 000 heures de consultation. Pour 2011-2012, la consultation est montée à 50 000 heures, pour un volume de 135 cours. Cette évolution s’explique sans doute par une meilleure appropriation par les étudiants. Par ailleurs, certains cours, qui n’avaient pas pu être enregistrés l’année précédente, l’ont été pour 2011-2012. Les étudiants peuvent interroger la plateforme soit en Ifsi (car la plupart des Ifsi en ont une), soit depuis leur ordinateur personnel.
L’intérêt d’une telle démarche est d’obtenir une homogénéité des enseignements, sans laisser à la traîne les établissements éloignés de Bordeaux. Les directrices d’Ifsi constatent que leurs étudiants finissent leur cursus avec un niveau supérieur aux promotions précédentes. Cela dit, certains points sont à améliorer. Les étudiants sont de provenances différentes, donc certains s’adaptent plus vite que d’autres. On ne peut pas se passer de l’accompagnement des formateurs. On a par ailleurs observé la mise en place spontanée de tutorats entre étudiants. Une piste intéressante.
présidente de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnési)
Ce type d’enseignement s’est répandu quasiment en même temps que la réforme. Les Ifsi délocalisés des grandes villes avaient des difficultés pour faire venir les intervenants universitaires. D’où la mise en place de cours par visioconférence et par DVD. Cela concerne toutes les unités d’enseignements qui relèvent de l’université. Il s’agit de matières telles que la psychologie, la législation, la déontologie, la physiologie, l’anatomie…
Le gros problème de ces cours relève du fait que les formateurs n’aident pas forcément les étudiants à comprendre ces enseignements. L’idéal serait que le cours sur DVD soit un support dans l’apprentissage avant d’être évoqué durant les cours collectifs. Deuxième problématique : les moyens dont disposent les Ifsi. Les établissements ne sont pas toujours adaptés pour les cours par visioconférence. Ce qui entraîne des vidéos qui sautent ou un son de mauvaise qualité. S’ajoute à cela un autre dysfonctionnement visible en Midi-Pyrénées : lorsque la date de visioconférence est commune à tous les Ifsi, certains étudiants peuvent ne pas être prévenus car ils sont en stage. Ils ont par la suite des difficultés pour rattraper ce cours. Même si les Ifsi ont mis en place des plateformes sur lesquelles il est possible de revoir les cours en question, les étudiants éprouvent souvent des difficultés pour pouvoir les visionner et les retravailler.
La Fnési réclame la suppression des cours par DVD. Nous sommes en revanche favorables au maintien de la visioconférence si les moyens octroyés aux Ifsi sont suffisants pour proposer des cours de qualité. Ce sont des points que nous abordons régulièrement avec le ministère, au niveau du comité de suivi de la réforme. Nous comptons en outre retourner vers les étudiants concernés pour envisager avec eux d’éventuelles solutions. Malgré ces désagréments, nous considérons que cette réforme était nécessaire. Elle est positive. Aujourd’hui, on ne demande plus à l’étudiant de tout connaître par cœur. En revanche, on l’amène à être plus autonome et à savoir rechercher l’information.