Prévention, cœur du métier - L'Infirmière Libérale Magazine n° 288 du 01/01/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 288 du 01/01/2013

 

PROFESSION

Actualité

RÉFLEXION → Pour la deuxième année consécutive, trois syndicats d’infirmiers libéraux et salariés ont organisé début décembre leurs États généraux. L’occasion d’aborder, entre autres, le rôle des infirmières dans le domaine de la prévention.

« Nous faisons beau­coup de prévention en France, mais elle est mal identifiée », souligne Yann Bourgueil, directeur de l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), au cours des États généraux(1)organisés à Paris par le Syndicat des infirmiers et infirmières libéraux (Sniil), le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) et le Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs de santé (Snies). Les champs qu’elle recouvre sont complexes et les enjeux importants, car « il apparaît que toutes les démarches de prévention augmentent les inégalités sociales de santé », rapporte-t-il. Et d’expliquer : « Les programmes mis en place bénéficient avant tout aux personnes qui disposent déjà d’un certain confort de vie leur permettant de s’intéresser à leur santé et à l’accès aux soins. »

Cette problématique pose donc la question du ciblage de la prévention afin de réduire les inégalités. Et de rappeler qu’il existe trois types de prévention : la prévention primaire, qui concerne l’éducation à la santé ainsi que l’information sur la santé et le système de soin ; la prévention secondaire, qui donne lieu au dépistage et à la recherche sur les maladies, et qui implique « la mise en œuvre d’un vrai travail de gestion de l’information médicale », estime Yann Bourgueil ; et, enfin, la prévention tertiaire, qui consiste, au moment où la maladie est déclarée, à chercher à en minimiser les effets.

« L’éducation thérapeutique du patient (ETP) entre dans ce cadre, souligne-t-il. Et les infirmières sont très présentes dans ce champ. »(2)

Un exemple d’ETP

Pour rappel, l’ETP induit un recueil de données et la mise en place d’un projet éducatif pour le patient. Cette démarche doit être formalisée par un contrat intégré au processus de vie de la personne. Généralement, les professionnels de santé acquièrent en amont des compétences pédagogiques. Deux infirmières libérales travaillant à Ajaccio ont d’ailleurs témoigné sur le travail qu’elles mènent pour le développement de l’ETP dans leur région. « Au sein de l’Union régionale des professionnels de santé Corse, nous avons fait des réunions de coordination sur l’ETP et certains voudraient que l’éducation thérapeutique soit mise en place via une ordonnance, raconte Marie-Claude Milhau, l’une des deux infirmières libérale. Ce que nous refusons car nous estimons que les infirmières sont à même de repérer les patients qui ont besoin d’éducation thérapeutique. L’ETP est la propriété des infirmières et il faut se battre pour la faire reconnaître. » Les deux infirmières ont participé à l’ouverture à Ajaccio en juillet 2011 du Réseau Corse maladies chroniques, qui existe déjà à Bastia depuis cinq ans.

Dans le cadre de ce réseau, elles font de l’ETP sur des pathologies repérées par l’Agence régionale de santé (ARS): obésité, insuffisance rénale chronique, diabète, tabac et maladies cardiovasculaires. Différents professionnels de santé, tous formés à l’ETP, prennent part à ce réseau – médecin coordonnateur, infirmière coordonnatrice, diététicienne, sage-femme, kinésithérapeute, pharmacien, psychologue. Ensemble, ils élaborent un projet personnalisé de soins qui doit être validé par le patient, et chacun anime des ateliers, gratuits pour les patients, car financés par l’ARS. « Cela permet à nos patients volontaires atteints de maladies chroniques de mieux comprendre leur maladie », soutient Marie-Claude Milhau. Avant d’ajouter : « Nous les incitons à venir avec leur famille ou avec les personnes qui s’occupent d’eux. »

Actuellement, 350 patients sont pris en charge au sein du Réseau Corse maladies chroniques pour une durée comprise entre six mois et un an et demi.

(1) Les États généraux se sont tenus le 4 décembre à Paris. Lire aussi notre actualité Mieux encadrer les stagiaires sur le site www.espaceinfirmier.com

(2) Lire, sur le sujet ETP, notre Cahier de formation de L’ILM n° 283 (juillet/août 2012).

Mobilisation requise

Ils étaient 280 infirmiers et infirmières – contre une centaine l’année dernière – à se retrouver le 4 décembre aux États généraux organisés par le Sniil, le SNPI et un nouveau venu cette année, le Snies. Les trois syndicats s’entendent pour dire que peu importe le mode d’exercice – libéral, salarié, public ou privé – il est impératif que les infirmières se mobilisent et affirment leurs compétences, afin de mettre un terme à une culture médico-centrée.