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FICHE PRATIQUE
Il n’est pas rare qu’un patient souhaite exprimer sa reconnaissance à une infirmière libérale venue régulièrement lui dispenser des soins à domicile. Mais est-ce tout à fait légal ?
L’article 909 du Code civil dispose que « les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci ». Tel est le cas d’une infirmière qui prodiguerait des soins à une patiente en phase terminale, laquelle décèderait de son cancer. Dans cette situation, elle ne peut bénéficier d’aucun don, du vivant ou au décès de la personne.
Les professionnels de santé sont en effet automatiquement suspectés d’avoir influencé leurs patients. Pèse sur eux une présomption irréfragable (ce qui signifie qu’ils ne peuvent se défendre en tentant d’apporter la preuve du contraire) de captation d’héritage, qui conduira à l’annulation de tout testament rédigé en leur faveur. Par ailleurs, ils peuvent faire l’objet de poursuites pénales sur la base de l’article 223-15-2 du Code pénal qui réprime l’abus frauduleux de la situation de faiblesse d’une personne, dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique, connue de son auteur, conduit cette personne à un acte qui lui est gravement préjudiciable (3 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende).
Tout d’abord, l’interdiction ne porte qu’à l’encontre des praticiens intervenus pendant la dernière maladie. Le Conseil régional de l’Ordre des médecins (décision du 28 avril 2004) a ainsi considéré que l’interdiction posée par la loi ne s’appliquait pas lorsque le médecin, désigné comme légataire universel, n’était plus le médecin traitant du patient depuis longtemps, qu’il ne l’avait pas soigné pour la maladie dont il était décédé, et que le testateur était en pleine possession de ses moyens au moment de la rédaction de l’acte. Ces différentes composantes ont ainsi exclu, d’une part, l’abus de faiblesse ainsi que, d’autre part, la présomption de captation d’héritage.
Ensuite, l’article 909 du Code civil permet les dons rémunératoires à titre particulier faits par un patient, dans une juste proportion avec ses facultés et les services rendus, au professionnel de santé. Ce sont les juges qui apprécieront, au cas par cas, l’adéquation entre la libéralité consentie et lesdits services.
Enfin, la loi ne trouve pas à s’appliquer si l’infirmière est héritière en ligne directe de la personne (elle est sa fille, par exemple) ou si elle s’avère être, en l’absence d’héritier en ligne directe, un parent jusqu’au 4e degré (cousine germaine, petite-nièce).
Il s’agit des Idels exerçant une partie de leur activité comme salariées dans un établissement d’hébergement.
L’article L. 331-4 du Code de l’Action sociale et des Familles dispose que « les personnes physiques (…) employées des établissements hébergeant, à titre gratuit ou onéreux, des mineurs, des personnes âgées, des personnes handicapées ou inadaptées ou en détresse ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires faites en leur faveur par des personnes hébergées dans le ou les établissements (…) dans lesquels elles sont employées ». Cependant, la Cour de cassation (Cass. civ. 24/10/2000) a spécifié que de telles dispositions ne pouvaient pas être systématiquement étendues aux anciens pensionnaires ayant regagné leur environnement habituel. Ainsi a-t-elle considéré comme légal le testament rédigé en faveur du directeur d’une clinique dans laquelle une patiente avait été hospitalisée, dans la mesure où, au moment de cette rédaction, intervenue pourtant quelques jours seulement après son retour à domicile, elle avait repris la direction de ses affaires. Pour les juges, eu égard aux circonstances de l’affaire (liens affectifs entre le légataire et la patiente antérieurs à l’hospitalisation, absence d’altération des facultés intellectuelles de la testatrice, décès intervenu quatre mois après sa sortie de la structure), la présomption de captation d’héritage invoquée ne pouvait s’appliquer en l’espèce.