Cahier de formation
Savoir faire
Mme J. vous évoque le cas de son père, âgé de 75 ans et atteint de BPCO : il utilise « un aérosol pour mieux respirer », mais Mme J. a remarqué que de la fumée sortait de sa bouche quand il prenait son médicament. Elle vous demande si cela est normal.
Ce phénomène signe une fuite de produit lors de l’inhalation et une mauvaise utilisation du dispositif. Vous conseillez à Mme J. d’en parler avec le médecin et le pharmacien de son père, car l’utilisation d’une chambre d’inhalation peut dans ce cas s’avérer utile pour pallier les difficultés de coordination main-bouche que peuvent rencontrer certains patients et optimiser l’efficacité du traitement.
→ Il est important que le patient sache utiliser correctement les dispositifs d’inhalation. Une Idel peut lui demander s’il rencontre des difficultés à manipuler son inhalateur, repérer d’éventuelles erreurs et réexpliquer les bonnes techniques de manipulation lors de ses visites à domicile (en en faisant la démonstration puis en vérifiant l’acquisition de la technique).
→ Le cas échéant, l’Idel peut enjoindre le patient à prendre conseil auprès de son pharmacien, de son kinésithérapeute ou de son médecin pour apprendre à se servir correctement des dispositifs d’inhalation. Il faut savoir que ces professionnels peuvent se procurer des modèles factices auprès des laboratoires, permettant au patient d’avoir une véritable démonstration d’utilisation à l’officine ou au cabinet (para)médical.
→ En outre, sur certains sites Internet (lire Savoir plus p.44), on trouve des vidéos démontrant la manipulation des différents dispositifs et les bonnes techniques d’inhalation.
→ Exemples : Ventoline, Atimos, Atrovent, Formoair, Serevent.
→ Mode d’utilisation : agiter le dispositif et ôter le capuchon. Tenir le flacon verticalement (le fond de la cartouche vers le haut). Expirer profondément et placer l’embout buccal à l’entrée de la bouche. Inspirer lentement et profondément en pressant la cartouche (nécessité d’une bonne synchronisation). Retenir la respiration pendant 10 secondes à la fin de l’inspiration. On ne doit pas voir de fumée sortir ni par le dispositif, ni par la bouche du patient.
→ Exemples : Airomir.
→ Mode d’utilisation : placer l’embout buccal entre les lèvres. Expirer profondément puis inspirer. La bouffée est auto-déclenchée par le début de l’inspiration (pas de nécessité de coordination main-bouche). Il faut poursuivre l’inspiration après le déclenchement.
→ Exemples : Spiriva Respimat.
→ Mode d’utilisation : introduire la cartouche dans le dispositif lors de la première utilisation. Armer le système. Inspirer tout en pressant le bouton. Il est important d’inspirer à fond pour éviter une fuite de produit (se traduisant par une sortie de fumée visible).
→ Exemples : il existe différents dispositifs à poudre. Certains sont dits unidoses, comme l’aerolizer (Foradil), le breezhaler (Oslif, Onbrez) et l’handihaler (Spiriva), c’est-à-dire qu’ils nécessitent l’insertion dans le dispositif d’une gélule de poudre avant chaque administration, puis la perforation de cette dernière. D’autres sont multidoses comme le diskus (Serevent Diskus, Seretide Diskus) constitué d’un blister circulaire contenant les doses unitaires de poudre, le novolizer (Asmelor, Ventilastin), qui nécessite l’insertion d’une cartouche de poudre munie d’un compteur de doses, le clickhaler (Asmasal) et le turbuhaler (Bricanyl Turbuhaler, Symbicort Turbuhaler).
→ Mode d’utilisation : certains dispositifs sont constitués de blisters circulaires contenant les unidoses de poudre, d’autres nécessitent la mise en place et la perforation de gélules (il peut être utile, dans ce cas, de rappeler au patient que les gélules sont destinées à la voie pulmonaire et non orale !) ou l’insertion de cartouches avant administration. Souffler à fond hors de l’appareil (risque d’agglomération des particules de poudre), puis inspirer aussi rapidement et vigoureusement que possible à travers le système d’inhalation (nécessité d’un débit inspiratoire élevé pour entraîner la dispersion de la poudre dans les poumons). Puis retenir la respiration quelques secondes.
→ À savoir : avec ce type de dispositif (notamment turbuhaler ou diskus), la prise n’est pas toujours ressentie par les patients. Il est important de les en informer pour qu’ils ne renouvellent pas abusivement l’administration. Cependant, certaines poudres (comme celle des dispositifs aerolizer, breezhaler, handihaler, par exemple) contiennent du lactose délivrant un goût sucré lors de l’administration et pouvant permettre de ressentir la prise. Par ailleurs, certaines gélules sont transparentes, ce qui permet de confirmer visuellement la prise lorsque l’inhalation est terminée.
→ Chez les personnes âgées maîtrisant mal les techniques d’inhalation ou souffrant de troubles de coordination main-poumon ou encore lorsqu’un aidant administre les traitements (sujets dépendants), les chambres d’inhalation sont spécialement indiquées. Elles ne peuvent être utilisées qu’avec les dispositifs aérosols doseurs.
→ La chambre d’inhalation est constituée d’un réservoir avec un embout buccal ou un masque. L’aérosol est inséré à l’autre extrémité de la chambre. Une pression exercée sur l’aérosol libère le produit dans la chambre et sera inhalé par le patient qui respire par la bouche dans l’embout ou le masque.
→ Démonter la chambre et la laver une fois par semaine à l’eau et au liquide vaisselle.
→ Si la chambre est en polycarbonate (Aerochamber Plus, L’Espace) ou en plastique (Able Spacer, Babyhaler, Tips-Haler), il ne faut pas la rincer pour éviter l’adhérence ultérieure des principes actifs sur la paroi de la chambre et optimiser l’efficacité du traitement. En revanche, les chambres en aluminium (Vortex) ou en silicone (Itinhaler) ne sont pas électrostatiques et peuvent être rincées à l’eau claire.
→ Laisser sécher à l’air libre sans essuyer pour limiter les phénomènes d’électrostatisme. Si les valves durcissent et ne fonctionnent plus correctement ou si la chambre est cassée, il faut en changer.
La plupart des chambres sont compatibles avec tous les types d’aérosols doseurs, mais la chambre Babyhaler n’est compatible qu’avec les aérosols commercialisés par le laboratoire GSK (Ventoline, Serevent).
→ Rappeler au patient qu’il est important de se rincer la bouche après l’administration de corticoïdes inhalés pour éviter le développement de mycoses buccales.
→ Une Idel peut participer à la surveillance de l’état buccal. En cas de suspicion d’une mycose, il faut orienter le patient vers une consultation médicale, pour confirmer le diagnostic et en vue d’une prescription d’antifongiques. De même, l’utilisation d’une chambre d’inhalation pourra à cette occasion être envisagée avec le médecin. En effet, grâce à la chambre, l’impaction et le dépôt des corticoïdes au niveau de l’oropharynx se trouvent diminués, ce qui réduit le risque de mycoses.
En cas de corticothérapie par voie générale, il est important que l’Idel (à l’occasion de préparation de pilulier, par exemple) rappelle au patient que les corticoïdes oraux s’administrent le matin (non seulement pour reproduire la sécrétion physiologique du cortisol, mais également pour limiter les problèmes d’excitation le soir et d’insomnie) au cours du petit déjeuner (pour prévenir d’éventuelles gastralgies).
Pr Nicolas Roche, service de pneumologie, groupe hospitalier Cochin, site Val-de-Grâce, groupe BPCO de la Société de pneumologie de langue française
« Quand un patient est au stade sévère de la maladie, une Idel peut être amenée à avoir des contacts réguliers avec lui : elle est alors bien placée pour renforcer l’observance des traitements et prodiguer des conseils concernant la manipulation des inhalateurs, la préparation des nébulisations et l’oxygénothérapie. Certains conseils comme la pratique d’une activité physique ou l’arrêt du tabac (en particulier à côté de l’oxygène) sont simples à donner et paraissent évidents, mais il ne faut pas hésiter à les répéter aux patients ! »