La listériose - L'Infirmière Libérale Magazine n° 299 du 01/01/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 299 du 01/01/2014

 

Infection bactérienne

Cahier de formation

LE POINT SUR

AURELIE ANGOT  

La listériose est une pathologie infectieuse causée par l’ingestion d’aliments contaminés par la bactérie Listeria monocytogenes. Il s’agit d’une maladie rare, mais grave. La prise en charge précoce et la prévention constituent les piliers de la lutte contre cette maladie au pronostic souvent mortel.

Qu’est-ce que la listériose ?

Elle peut se présenter sous différentes formes.

→ Les formes non invasives, c’est-à-dire où l’infection est localisée. Elles concernent des sujets immunocompétents. Les bactéries, confinées dans le tube digestif, sont responsables d’un tableau gastroentérite et/ou de diarrhée fébrile. L’infection peut passer inaperçue.

→ Les formes invasives, c’est-à-dire où l’infection est systémique. Elles vont concerner principalement les sujets âgés, les femmes enceintes et les sujets immunodéprimés (patients transplantés, sous hémodialyse, cirrhotiques, atteints de cancer et/ou sous corticoïdes…). Le risque relatif est multiplié par 30 à 100 chez ces personnes.

Dans ces formes invasives, on distingue :

→ la forme septicémique (bactériémie) : les bactéries sont passées dans le sang ;

→ la forme neurologique (méningite, méningo-encéphalite et abcès cérébraux) : les bactéries sont passées dans le compartiment cérébral au moment d’une bactériémie ;

→ la forme maternonéonatale : infection de la mère puis de son enfant lors d’une bactériémie, par infection du placenta ou lors de l’accouchement exceptionnellement.

Symptômes et traitement

Dans la forme septicémique

Il peut y avoir une fièvre, un malaise, parfois des diarrhées. Elle apparaît souvent chez des personnes âgées, fragiles. L’hémoculture permet le diagnostic.

Dans la forme neurologique

La méningite à Listeria peut se manifester par des maux de tête, une raideur de la nuque, une fièvre, des vomissements. Il s’agit d’une méningite où le liquide céphalorachidien est clair. Listeria est le troisième agent des méningites bactériennes chez les adultes. L’encéphalite causée par Listeria peut engendrer des troubles de la conscience, une fièvre, des convulsions, des paralysies. 80 % des patients atteints d’une forme neurologique de listériose ont des troubles de la conscience allant jusqu’au coma. L’apparition d’un tel trouble doit conduire à une consultation d’urgence à l’hôpital.

Dans la forme maternonéonatale

Chez la femme enceinte, toute fièvre sans explication, même modérée, doit être considérée comme une listériose jusqu’à preuve du contraire : elle doit conduire à un prélèvement sanguin pour hémoculture au moment de la fièvre et à un traitement antibiotique préventif jusqu’à l’obtention des résultats. La listériose peut aussi se manifester par des complications obstétricales : perte fœtale (25 %), prématurité, naissance d’un enfant infecté. Tout contexte de fièvre au moment de l’accouchement doit faire rechercher une listériose (hémocultures chez la mère et l’enfant, prélèvements sur le placenta, le liquide gastrique de l’enfant). Les enfants infectés naissent le plus souvent avec des signes de détresse respiratoire et souffrent d’une bactériémie avec ou sans méningite associée.

Traitement

Le traitement de la listériose repose, en l’absence d’allergie, sur l’amoxicilline pour 2 à 3 semaines, selon la forme de l’infection. Le traitement sera débuté en milieu hospitalier, sous forme intraveineuse. En cas d’allergie à l’amoxicilline, d’autres antibiotiques seront utilisés : cotrimoxazole (Bactrim) ; chez la femme enceinte, des macrolides.

Prévention

Généralités

L’infirmière libérale a un grand rôle à jouer dans l’éducation alimentaire des patients et l’apprentissage des conduites à risque. Il est possible de prévenir l’infection par Listeria monocytogenes par le biais de mesures simples d’hygiène et d’habitudes de consommation. Il faut savoir que Listeria se multiplie à 4 °C (donc dans un réfrigérateur bien réglé) et n’altère pas le goût des aliments. En revanche, la bactérie est sensible à la chaleur : la cuisson des aliments jusqu’à ébullition est une mesure de protection. Des précautions supplémentaires s’imposent pour les sujets à risque, en particulier l’éviction des aliments les plus fréquemment contaminés.

Précisions

→ Laver fruits, légumes et herbes aromatiques avant consommation. Éviter la consommation de viandes et poissons crus.

→ Se laver les mains avant et après la manipulation de viandes ou de poissons crus et laver toute surface ou ustensile ayant été en contact avec ces produits.

→ Laver et désinfecter le réfrigérateur régulièrement, ne pas y déposer directement d’aliments crus, ne pas mélanger les aliments crus et les aliments cuits, respecter les dates limites de consommation, consommer rapidement les restes alimentaires.

→ Pour les sujets à risque : ne pas consommer les fromages au lait cru ou vendus râpés, les poissons fumés, les coquillages crus, le tarama, le surimi, les graines germées crues, les produits de charcuterie cuits (rillettes, pâtés…), éviter la charcuterie à la coupe. Avant consommation, cuire les viandes et les poissons, y compris les saucisses type “Francfort”, (pour les viandes hachées, cuire à cœur), réchauffer soigneusement les restes alimentaires jusqu’à ébullition, enlever la croûte des fromages.

Une maladie très surveillée

La listériose est une maladie à déclaration obligatoire. Le biologiste diagnostiquant la maladie d’après les résultats des analyses bactériologiques se charge du signalement auprès de l’Agence régionale de santé. Pour chaque nouveau cas, le Centre national de référence des Listeria (CNRL) est chargé de l’analyse de la souche bactérienne responsable. S’il est trouvé une parenté génétique avec une autre souche reçue, une enquête est lancée pour identifier une source commune et la contrôler. L’InVS va contacter le patient et ses proches pour les interroger sur leur consommation alimentaire des trente derniers jours. Ce protocole strict permet d’identifier au plus vite l’aliment contaminé puis de le retirer de la vente et de contrôler l’infection.

En chiffres

La listériose aujourd’hui en France.

→ 300 cas de listériose par an : une moitié de formes septicémiques, un quart de formes neurologiques, un sixième de formes materno-néonatales (le reste : formes rares)

→ 30 à 40 % de mortalité dans les formes septicémiques

→ 20 à 30 % de mortalité dans les formes neurologiques

→ 30 à 50 % de naissances prématurées chez les mères infectées ;25 % de perte fœtale ou néonatale

→ La mortalité maternelle est nulle

En savoir plus

Plusieurs sites peuvent être consultés pour plus de renseignements :

→ www.invs.sante.fr

→ www.anses.fr

→ www.pasteur.fr