AMÉNAGEMENTS > Les cabinets infirmiers doivent respecter les normes d’accessibilité pour accueillir les personnes en situation de handicap. L’échéance est fixée au 1er janvier 2015, mais des délais ont été prévus par les pouvoirs publics, à condition d’en faire la demande.
La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées renforce l’obligation d’aménagement des Établissements recevant du public (ERP), afin de permettre l’accès et la circulation de toutes les personnes handicapées, quelles que soient leurs difficultés. Cette loi prévoit qu’au 1er janvier 2015, l’ensemble des ERP, dont les cabinets d’infirmiers libéraux, soient rendus accessibles. Mais, face aux retards constatés dans la mise en œuvre de la loi, une concertation a été menée entre les associations de personnes handicapées, les associations d’élus, les représentants du secteur des transports, les acteurs du logement et de la construction, les représentants du commerce, de l’hôtellerie, de la restauration et des professions libérales, pour trouver une solution à la problématique.
À l’issue de 140 heures de réunions, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a conclu le 26 février cette concertation sur l’accessibilité. Les objectifs de la loi de 2005 ont été réaffirmés et maintenus. « La loi a manqué de portage politique, estime la sénatrice socialiste de l’Essonne, Claire-Lise Campion, auteure du rapport “Réussir 2015”. Mais le gouvernement a la volonté d’agir avec le souci de ne pas casser la dynamique en cours car des efforts ont été réalisés. » Une loi devrait être votée début avril, offrant la possibilité au gouvernement de statuer sur ce dossier par ordonnance à l’été 2014. La mesure phare qui devrait en découler sont les Agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap) qui permettraient aux acteurs publics et privés qui ne seraient pas en conformité avec les règles d’accessibilité au 1er janvier 2015 de s’engager sur un calendrier précis et resserré de travaux d’accessibilité, avec néanmoins « un certain nombre de sanctions si les délais ne sont pas respectés », précise Claire-Lise Campion.
Pour les cabinets libéraux – ERP de 5e catégorie – les délais accordés devraient être d’un à trois ans maximum. Le dossier d’Ad’Ap – ou un engagement d’entrer dans la démarche Ad’Ap – devra être déposé par les professionnels avant le 31 décembre 2014. En cas de simple engagement, le dossier devra être déposé au plus tard douze mois après la publication de l’ordonnance. Il sera validé par le préfet, marquant le point de départ de l’Ad’Ap. Le dispositif comportera des points de contrôle réguliers, et la fin de l’Ad’Ap ainsi que le respect des engagements devront être vérifiés. Une amende pourra être appliquée en cas de non-transmission des bilans et attestations finales. Le risque pénal sera suspendu pendant toute la durée de l’Ad’Ap, mais sera de nouveau possible en fin d’Ad’Ap si les obligations ne sont pas respectées. L’objectif annoncé est de permettre la validité de tous les dossiers qui vont donc être simplifiés.
Il est également envisagé de réajuster l’environnement normatif de l’accessibilité pour le rendre plus lisible et plus simple en actualisant de nombreuses normes et dispositions règlementaires. Les solutions techniques alternatives aux normes réglementaires seront autorisées, à condition de la démonstration, par l’ERP existant, que les solutions équivalentes proposées offrent le même niveau de service, et de la validation par la Commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité.
Au cours des réunions, les représentants des professionnels de santé libéraux, notamment des infirmiers, ont cherché à se faire entendre. C’est le cas de la Fédération nationale des infirmiers (FNI), membre de l’Union nationale des professions libérales, qui a participé aux concertations. « Il n’est nullement dans notre intention de remettre en cause le droit des personnes en perte d’autonomie, souligne Philippe Tisserand, président de la FNI. Cependant, il faut relativiser et replacer les choses dans leur contexte. Nous avons l’obligation d’avoir un cabinet, mais nous y dispensons peu de soins. » Conséquence : le coût des travaux engendré sera sans commune mesure avec le chiffre d’affaires réalisé au cabinet. « On propose aux associations représentant les personnes handicapées qu’elles acceptent que les infirmières se rendent au domicile, mais elles ont des positions très dures », ajoute-t-il.
Même tonalité du côté de l’Organisation nationale des syndicats d’infirmiers libéraux (Onsil). « Nous effectuons quasiment la totalité de nos actes à domicile, souligne Béatrice Galvan, présidente de l’Onsil. La priorité pour nous serait davantage d’aménager le domicile des patients. » Et d’ajouter : « On va nous faire engager des frais colossaux et beaucoup d’infirmiers vont devoir déménager. »
La loi de 2005 offre la possibilité aux professionnels de demander des dérogations aux travaux pour raisons économiques. Il existe dans la législation actuelle une dérogation pour disproportion manifeste qui peut être accordée à un ERP privé pour motif financier ou économique en raison d’une incapacité à financer les travaux d’accessibilité, ou en cas d’impact sur la viabilité future de l’établissement. Cette dérogation devrait bientôt être limitée dans le temps afin de réexaminer l’évolution du cadre bâti. De plus, des dérogations motivées peuvent être autorisées en cas d’impossibilité technique à réaliser les travaux ou en cas de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural. Mais la future ordonnance devrait apporter des précisions, notamment à la dérogation pour motifs économiques. Et une nouvelle dérogation devrait être introduite, celle liée au refus de la copropriété à effectuer des travaux.