L'infirmière Libérale Magazine n° 302 du 01/04/2014

 

Cahier de formation

Savoir faire

Les traitements du cancer de la prostate sont à l’origine de nombreux effets indésirables. Il est essentiel de les connaître et de les comprendre pour les prévenir lorsque c’est possible, les limiter et/ou répondre aux questions des patients.

Monsieur X. a subi une prostatectomie il y a cinq jours. Alors que vous êtes à son domicile pour réaliser l’injection de Lovenox prescrite, vous remarquez que sa sonde urinaire n’est plus correctement en place. Pouvez-vous la remettre ?

Non, il ne faut surtout pas tenter de la remettre, au risque d’endommager la suture réalisée lors de l’intervention. La sonde sera remise en place par l’urologue, généralement sous contrôle échographique.

SOINS IMMÉDIATS

→ Comme après toute intervention chirurgicale, outre le port de bas de compression (contention) durant quinze jours à trois semaines et l’injection d’une héparine de bas poids moléculaire (HBPM) durant minimum deux à trois semaines (selon reprise de l’activité physique), en prévention du risque thromboembolique périopératoire, des soins locaux peuvent être prescrits. Selon le cas, il s’agit de soins de pansements d’incision classique (prostatectomie par voie péritonéale) ou d’incision de trocarts (technique laparoscopique) avec présence de fils résorbables ou non résorbables ou d’agrafes.

→ La sonde vésicale est laissée en place pendant une semaine environ après l’opération pour garantir la bonne cicatrisation de l’anastomose (suture entre la vessie et l’urètre). La sonde doit être lavée à l’eau et au savon sous la douche. Il faut vérifier qu’il n’y a pas d’écoulement anormal (pus) au niveau du méat urinaire et que la sonde est toujours fonctionnelle (lire point de vue ci-dessous).

SUITES OPÉRATOIRES

→ Le patient doit veiller à boire régulièrement (au moins 1,5 litre par jour) : le but est de se réhydrater et de diluer les urines pour limiter le risque d’infections urinaires. La présence de sang dans les urines est fréquente après l’opération, il ne faut pas s’en inquiéter.

→ Il ne faut pas prendre de bain les semaines suivant l’opération pour limiter le risque infectieux (au niveau urinaire et de la cicatrice) et ne pas nuire à la cicatrisation. La toilette sous la douche s’effectue à l’eau et au savon classique (pas d’antiseptiques systématiques), en veillant à bien sécher la cicatrice après la douche, sans frotter.

→ Rappeler au patient les signes qui nécessiteraient d’alerter l’hôpital : fièvre supérieure à 38,5 °C, douleur allant en s’aggravant, doivent amener à contacter l’hôpital où a eu lieu l’opération et à réaliser une analyse d’urine (ECBU).

→ Comme après toute intervention chirurgicale, le patient doit éviter les efforts physiques intenses les premiers jours pour permettre une bonne cicatrisation de la paroi abdominale.

→ La reprise d’une activité sportive peut être encouragée après le premier mois. Des fuites urinaires fréquentes à la suite de l’intervention peuvent toutefois gêner la reprise du sport tant qu’elles ne sont pas contrôlées (lire partie suivante sur les troubles urinaires). Associée à une alimentation saine et équilibrée, cette dernière limite le risque de prise de poids, elle-même liée à un risque plus élevé de récidive du cancer (lire le point de vue ci-contre). Il est recommandé de privilégier une alimentation riche en fruits et légumes, de préférer les huiles végétales et de restreindre les graisses saturées.

Point de vue…

Suivre un patient après une prostatectomie Céline Poulain, cadre de santé en urologie

Céline Poulain, cadre de santé en urologie

« À son retour à domicile, le patient peut être porteur d’une sonde vésicale. Il est nécessaire de surveiller la perméabilité de la sonde (sonde fonctionnelle), la diurèse, la couleur et l’odeur des urines. En cas d’anomalie d’un des critères de surveillance, il est primordial d’aviser le service d’urologie. L’incident redouté est que la sonde ne soit plus en place. Il ne faut pas tenter de la remettre car il y a un risque de faire une fausse route et de traverser l’anastomose (suture entre l’urètre et la vessie). Il faut alerter l’hôpital. La sonde sera remise en place par un urologue, au besoin sous contrôle d’imagerie. »

Point de vue…

L’obésité, un risque de récidive

Pr Alexandre de la Taille, service d’urologie de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil

« Encourager une alimentation saine et variée et une activité physique régulière pour limiter la prise de poids est, dans tous les cas, du bon sens, valable pour de nombreuses pathologies, y compris le cancer de la prostate. Il a été démontré que les patients atteints de cancer de la prostate qui suivaient un régime alimentaire visant à limiter la prise de poids réduisaient le risque de progression et le risque de récidive de leur cancer. Concernant la consommation particulière de certains aliments (tomate, lycopène, protéines du soja, thé vert, sélénium vitamine?E, etc.), aucune étude solide n’a à ce jour montré leur rôle protecteur dans le cancer de la prostate. »